• 23 Octobre, début de soirée.

« C'est une fille. Bienvenue au monde, Ahnès »
Un cri de nourrisson mêlé à celui d'une mère à bout de forces déchira l'atmosphère chargée de sueur et d'attente de la pièce. Un homme relâcha son souffle, un air soulagé sur le visage. Sa femme avait enfin cessée de lui broyer la main.
On déposa doucement la petite fille contre le sein de sa mère, qui, les cheveux collants à son front par la sueur, regardait le nouveau-né vagissant comme s'il était une des plus belle chose sur terre.
La petite Ahnès Clarence Ó Meadhra est née.

• 19 Décembre, tard dans la nuit.

« Chuuut... arrête de pleurer ! »

Serrés dans un seul lit, sous une énorme couverture moelleuse, Ahnès serra doucement Siolaan, son petit frère de quatre ans son cadet qui sanglotait doucement. Sous la porte de leur chambre filtrait un léger rayon de lumière. Et des cris. À neuf ans, Ahnès est déjà habituée à entendre ses parents se hurler dessus, et elle ne comprends pas pourquoi est-ce que Siolaan en fait tout un plat. Malgré tout, elle frissonna lorsqu'un une assiette s'écrasa contre le mur, faisant trembler la fenêtre. Le service en porcelaine de mamie... Oh... De toute façon, elles étaient moches, ces assiettes.

• 25 Mai, en plein après midi ensoleillé

« Tu l'as fait exprès ! J'vais le dire à maman ! T'as pas le droit de faire ces trucs bizarres ! »
« Tais toi ! J'ai rien fais du tout ! Moi j'vais dire à maman que t'es une menteuse ! »

Deux enfants, debout, poings serrés au milieu du salon. La plus grande, une rouquine de dix ans, tremblait de rage. Et au centre de la pièce, une poupée de porcelaine initialement installée sur une étagère en hauteur, gisait là, le corps disloqué uniquement retenu par sa robe de mousseline violette. Ahnès refoula les larmes amères qui menaçaient de rouler sur ses joues empourprées de colère. C'est vrai ça ! Elle n'avait rien fait ! Kathryn n'avait qu'à pas déchirer son dessin, et la poupée n'aurait pas bougée. De plus en plus de choses étranges se produisaient lorsque la fillette se mettait en colère, et même si elle faisait comme si de rien n'était, elle avait peur. Et si elle n'était pas normale ? Et si elle... avait un problème ?

• 10 Août, à l'heure du dîner.

« Tu crois que c'est quoi ? »
« Je sais pas... On dirait une chouette avec des oreilles... »
« C'est un hibou, crétin ! »
« Je suis pas un crétin »

Loin de toute l'agitation produite par ses frères et sœurs, Ahnès déchira d'une main tremblante le sceau de cire marqué d'un P qui empêchait l'ouverture de la lettre que le volatile venait de déposer sur la table de la cuisine. Recevoir du courrier, à onze ans, ça impressionne toujours. Surtout lorsqu'on ne le reçoit pas par les voies habituelles.

« Ahnès O Meadhra,
Nous vous informons avec joie que vous êtes inscrite à Poud... »

• 28 Août, début de matinée.

« Allez Maman, plus vite ! Sinon je n'arriverai jamais à tout trouver. »

Ladite Maman soupira, et tenta de suivre sa fille qui voletait tel un … colibri entre les différentes boutiques du chemin de Traverse. Il était loin derrière elle le temps où elle se faisait un sang d'encre à l'idée de mettre un pied du coté sorcier. Maintenant, elle rentrait en cinquième année, et ce n'était plus le moment de s'émerveiller devant tout ce qui se trouvait dans cette allée fabuleuse. Elle avait des BUSE à obtenir, et il fallait commencer à travailler dès le début de l'année.

• 1er Septembre, Poudlard express.

« Deux Patacitrouilles, s'il vous plait »
La rouquine tendit les deux noises et trois mornilles qu'elle avait préparée et se saisit des sucreries qu'elle empocha après avoir adressé un sourire à la vendeuse. La porte du wagon de la rouquine se referma et elle se laissa tomber lourdement sur la banquette rouge, tout en commençant à macher le bonbon. Septième année... Elle ne comptait plus le temps qui passait, et se focalisait uniquement sur son but : ASPIC. Elle avala sa bouchée et tira de sa valise un énorme livre acheté d'occasion. Son manuel de potion. Tournant avec soin la couverture, elle inspira. Bon. Allons-y.

• 09 Août, tôt le matin.

« Danse de la joie ! Elle part en avant, elle part en arrière »

Anhès dansait dans le salon de la petite maison familiale, faisant tourner sur elle même sa petite sœur Bjorg de huit ans. Sur la grande table en chêne reposait le parchemin contenant ses résultats. Elle s'en était plutôt bien sortie. Même TRES bien sortie. Avec ces resultats là, elle allait pouvoir suivre le cursus qu'elle voulait. Potions, en avant !

• 10 Novembre, pause de midi.

* Ferme la *
*Non ! *
* Horrible petite chose moche et poilue, tu ne pouvais pas être un patronus comme les autres ? J'ai envie de t'engluer dans un pot de cire orientale...Et d'arracher un par un tes poils colorés de tubercule. Tanrentule.*
* Tu vas souffrir, si je souffre. Et puis, si tu voulais avoir un patronus agréable, tu n'avais qu'à pas avoir une âme aussi pourrie. *
* Bordel... J'ai dû être une horrible mégère dans une autre vie pour avoir un karma aussi pourri. Non mais sérieusement ! Reprends ta forme d'araignée, je ne veux pas voir ta tête de faon. On dirait le .. comme dans le film moldu, là... *
* Bambi.*
* Ouais, Bambi. Tu vas finir comme lui. *
* C'est sa mère qui meurt. Pas lui. *
* Et ? Ca n'empêche que je peux essayer. J'ai toujours voulu goûter du pâté de Bambi. *


• 27 Décembre, fin d'après midi.

« Hé, Nès ? »
« Quoi ? »
« T'es déjà tombée amoureuse ? Je veux dire, vraiment amoureuse, le genre de truc qui te rends malade ? »
« Ouais, une fois. J'ai même été jusqu'à lui déclarer ma flamme. »
« Et alors ? »
« Je m'adressais à une pierre tombale, alors je n'attendais pas de réponse particulière. »

La rousse resserra sa cape autour d'elle. Le temps était gris et froid, un froid sec qui colle aux os et mord la chaire et la neige faisait crisser les bras des deux jeunes gens. Son regard d'eau glissa sur la surface calme du lac qui se couvrit un instant de ridules. Un être aquatique ? Strangulot ? Calamar géant ? A vrai dire, elle s'en foutait. Tandorri se blottit contre elle, cherchant sa chaleur. Et pour une fois, elle le laissa faire.

• Hiver, temps glacial, milieu d’après midi

Elle l’avait embrassé. Au creux d’un tourbillon neigeux, cachée au coeur d’une volière silencieuse, elle avait laissé libre court à la passion qui animait son coeur sous couvert d’une vengeance enfantine, elle s’était laissé aller. Comme une enfant, une collégienne tremblante, elle avait posé ses lèvres avec un tremblement de peur. La peur d’être rejetée, la peur de l’abandon, la peur d’un jeu dans lequel elle s’était déjà trop engagée.
Rien de tout ça n’était arrivé. Un bras s’était chargé de rapprocher la jeune femme du corps masculin. Aujourd’hui, au coeur d’une volière silencieuse, elle avait embrassé l’homme de sa vie.

Il était professeur, et avait trente-trois ans.

• …

Ils avaient tous changés. La peste avait ravagé le château, obscurcissant les coeurs tandis que, dehors, le ciel de printemps s’éclaircissait. Tous en étaient sortis, indemnes d’apparence et transformés de coeur. Elle même avait changé. Ses convictions s’étaient brisées au creux de ses nuits de solitude, passées sur le sol de la salle de bain, le corps secoué de sanglots silencieux qui refusaient de sortir, obstruant sa gorge en de légères plaintes gutturales.

Ils avaient tous changés. Leurs patronus, d’abord, avaient pour la plupart abandonné leur forme originelle au profit d’une autre. Elle s’était laissée aller dans un amour qui, elle l’espérait, comblerait le vide d’un coeur trop longtemps endurci par ses soins. Oh, elle avait été comblée. Et il était parti, quittant son poste d’enseignant pour et à cause d’elle. Elle avait comprit, elle avait accepté, mais elle n’avait pas pardonné. Ils pouvaient se voir, durant les vacances, mais l’amour à distance ne dure qu’un temps.

“ C’est terminé “.

Sans un geste brusque, sans une seule expression faciale, elle avait lâché cette bombe fatale qui achèvera le peu de bonheur dont elle bénéficiait. C’était terminé, oui. Lorsqu’elle avait quitté la petite maison du bord de mer, l’iris de ses yeux s’était mis à couler le long de ses joues blêmes. Non. Ce n’était que les embruns qui déposaient sur ses lèvres cette humidité salée. Simplement les embruns… toujours les embruns.

Mais comme le printemps revient, les fleurs refleurissent. Son bonheur n’était pas qu’auprès de lui, il était partout. Dans la bibliothèque de Poudlard, dans le sourire innocent de Charline. Dans les taquineries d’Alec qui lui donnaient envie de le frapper. Dans les vols sur son balais, si haut qu’elle en atteignait l’azur. Dans les bêtises qu’elle mettait au point avec Cicéron et dans les soirées alcoolisées avec ce vieux con de Ryan. Dans toutes ces petits choses, et bien plus encore.

• Fin des cours - Trois Balais.

“ Je vais partir, Cha.”

Le regard noyé dans sa bierraubeurre, elle observait sans réellement la voir l’aérienne mousse blanche qui couvrait le breuvage tiède. Oui, elle devait partir. Quelques temps, rien de bien méchant. Juste s’aérer, loin du monde sorcière. Là où elle pourrait oublier l’année qu’elle venait de passer. Une gorgée, et un sourire.

“ Je serai rentrée pour septembre. “

• Maison familiale - Irlande.
Le retour aux sources avait été nécessaire. Elle n’était plus sorcière pour un temps, elle était Ahnès. La Ahnès d’avant la lettre, la Ahnès moldue. Toutes ses affaires étaient restées dans son studio et sa baguette fermement rangée dans un petit écrin de bois dissimulée sous le matelas. Plus de magie. Rien. La jeune femme resserra doucement les pans de sa veste autour d’elle, assise sur une chaise de jardin en plastique bon marché. Devant elle, les enfants de la famille couraient dans l’herbe, se lançant un ballon dans des cris de joie, sous les “chhhhuuut, les voisins ! “ des adultes agacés. Le tabac allumé grésilla lorsqu’elle porta le filtre de sa cigarette à ses lèvres. Le temps s’était écoulé. Elle avait bêtement pensé que ce séjour pourrait lui faire tout oublier. Peine perdue. Sa douleur restait la même, et seul le temps réussirai à la patiner comme elle le souhaitait. A présent, il fallait songer au retour.