Numéro de la mission: 23
Intitulé de la mission: Racontez trois anecdotes sur votre personnage. Loisir, voyages, etc..
Réponse commune:
♦ Elle ôta l'anneau qu'elle portait à son annulaire depuis des années, le regard évasif. Elle l'avait aimé, elle l'aimait peut-être encore, mais elle n'avait jamais été faite pour cette vie, une vie familiale, et elle savait bien qu'il en était de même pour l'homme qui avait partagé avec elle une partie de son existence. Pour autant, elle ne regrettait pas. Enfermant l'alliance dans un écrin, elle expira, pensant à sa carrière, et à toute ces choses qui restaient les mêmes. Elle gardait cet ami éternel qui n'était plus lié à elle par un contrat écrit, mais elle en revenait à cette indépendance dont elle avait toujours soif, de la même soif qui la portait vers son ambition de carrière. Rien n'était fini, tout pouvait maintenant recommencer.
♦ Le bois du palais de justice emplissait encore son odorat lorsqu'elle avait retrouvé son appartement ce soir-là, des dossiers sous le bras, ceux qui n'avaient pas leur place dans un bureau, ceux qui la suivaient jusqu'au repos qu'elle ne prenait pas. Les noms griffonnés à la plume sur les tranches des pochettes, peu à peu, devenaient ceux qu'elle lisait plus jeune dans les journaux. Les inconnus étaient confiés aux recrues moins expérimentées désormais. Son talent pourtant ne résidait pas dans la technicité des règles, ni dans les rhétoriques mathématiques. Le nom qui figurait à la tête de la pile était, au public, parsemé de fange : affaires de mœurs, détournements – que lui restait-il ? Non, son talent à elle résidait dans l'image. À cet homme déchu, il restait l'histoire. Et elle, elle était là pour la raconter. Songeuse alors qu'elle tournait la clé dans la serrure, elle s'éloigna doucement des précédents qui guidaient la voie d'avocate qu'elle avait choisie, pour se représenter un homme, un scénario, leurs couleurs et leurs potentialités. Une dérive qu'elle se voyait emprunter de plus en plus souvent. Et à chaque fois qu'elle s'y surprenait, une idée tombait, incessante. Spin doctors les appelait-on, officieusement, parfois avec défiance. Ceux qui construisaient l'image et la défaisaient, ceux qui écrivaient l'Histoire au présent pour guider ce qu'elle deviendrait. Le bois du palais de justice emplissait encore son odorat lorsqu'elle prit place dans le fauteuil sous sa lampe de travail, et il lui parut évident qu'il portait des accents de passé. En vérité, elle l'avait déjà décidé : les clients du cabinet allaient bientôt devenir les siens.
♦ Des cris de joie se faisaient entendre depuis le jardin et pendant un instant elle se retrouve arrachée à ses dossiers. D’un coup d’oeil vers la fenêtre, elle attrape la vue charmante de Jaya et sa petite fille batifolant dans la neige de décembre. Un instant elle se laisse gracieusement distraire par cette scène si domestique qu’elle n’avait jamais connue. Trop occupé par ses dossiers et sa carrière pour se laisser aller à ces enfantillages. Certains de ses amis lui assuraient qu’elle avait manqué quelque chose, une partie importante de la vie de sa fille. Mais elle n’entendait rien à ses yeux ce qu’elle avait bâti aujourd’hui valait largement ces petits sacrifices. Des après-midi comme celles-ci passées la tête dans un dossier au lieu d’assister sa progéniture dans quelqu'activité de son choix. Sa fille pouvait très bien se divertir par ses propres moyens, merci bien. Elle s’était bien assurée de ça, de l’élever forte, indépendante, à son image. Elle aurait pu avoir une carrière spectaculaire pour s’élever au niveau des plus grand mais la jeune femme avait aujourd’hui préféré se dévouer à sa petite fille.
Elle fut tirée de ses pensées par le grincement de la porte, se retournant elle fut accueillie par la vue du nouveau membre de la famille. Les joues rosies par le froid elle la regardait du pas de la porte. Maintenant délestée de son gros manteau et de ses moufles elle tenait entre ses mains un petit livre d’images elle demanda timidement pour une des histoires du recueil. D'un dernier regard vers les dossiers étalés sur son bureau, Sabah enleva les lunettes perchées sur son nez pour se diriger vers le fauteuil qui garnissait la pièce s’arrachant pour quelques minutes à ses précieuses affaires.