« Par Merlin ‘Dice ouvre la porte ! »
Par de réponse. Tu l’entends juste ouvrir ses placards, balancer leur contenu sur le sol. Tu entends les livres qui tombent. Tu entends l’atroce vacarme qui le consume. La peur. Le désarroi. Tu veux l’aider. Tu ne peux pas. Il est déjà perdu.
« ’Dice je suis sûre qu’on peut arranger les choses ! Laisse moi t’aider je t’en prie ! »
La porte s’ouvre. Tu le vois. Le visage en sueur, l’affolement dans les yeux. Tu prends peur. Tu ne le reconnais pas. Il est pourtant si calme de nature. Il est pourtant si fort. Là il semble emporté par le courant, comme s’il ne maitrisait plus son destin. Ce n’est pas une impression. Il a été entrainé dans cette spirale infernale. On l’a détruit, poussé à commettre un crime qui pourrait le mener à Azkaban. C’est ce que tu penses.
« Non, il est hors de question que je te mêle à ça !
Tu ne lâches pas le morceau. Tu lui attrapes le bras, tu le sommes de s’arrêter et lui demandes des explications mais il ne répond pas. Il avance. Chacun de ses pas l’éloigne un peu plus de toi.  Alors, une fois la porte traversée, tu t’arrêtes. Les larmes aux yeux tu n’arrives plus à crier, juste à murmurer.
« Je t’en supplie… »
Il se retourne. Te souris en tentant de paraître plus fort mais tu sens qu’il n’est plus le même. Et il transplane.

Deux jours plus tard tu liras la Gazette du Sorcier qui relatera la mort d’un pauvre innocent du nom d’Euridice Chateaurois. Tu seras anéantie. Tu pleureras toutes les larmes de ton corps et pas même tes amis ne pourront te venir en aide. Car seule dans cette demeure londonienne, tu resteras convaincue que tu aurais pu faire quelque chose pour que ça n’arrive pas.

C’était toujours très fusionnel entre Euridice et toi. Toujours l’un avec l’autre à faire tourner en bourrique votre mère, vous ne cessiez de l’énerver et de vous faire punir. Mais lui plus que toi. Sûrement parce qu’il était un garçon et ainsi plus tendancieux à agir de la sorte ou était-ce peut-être parce que, malgré le fait que vous soyez jumeaux, il était toujours le plus extravertie. Toi tu étais la douce et parfaite Fleur alors que lui était le perturbateur et contraignant Euridice. Mais ça ne te plaisait pas. Tu détestais qu’on te dise quoi faire, qu’on t’oblige à être d’une telle façon. Alors quand l’adolescence était arrivée avec elle sa vague d’hormone, tu avais explosé. Tu étais devenue boudeuse et tu ne cessais de t’opposer à tes aînés. On te punissait souvent mais ça ne te faisait rien. Qu’importe les bonnes manières françaises que ta mère tentait en vain de t’enseigner, tu voulais juste vivre. Mais pas de la même manière que ton frère. Non, lui deviendrait dans quelques années un explorateur. Il transplanerait à travers le monde pour découvrir toutes les cultures, les créatures qui vous entouraient. Qu’elles soient sorcières ou moldus, il s’en moquait il voulait juste en savoir plus. C’était un explorateur alors que toi tu n’étais qu’une bureaucrate. Tu avais été très bonne élève à Poudlard, excellente Serdaigle même. Mais, alors que ton jumeau préférait apprendre sur le terrain, toi tu t’amusais à t’instruire par les livres. Et pourtant, après tes études tu ne trouveras pas tout de suite chaussure à ton pied. Tu seras au début une simple secrétaire, cherchant juste à mettre un peu de beurre dans les épinards. Puis, une fois ton frère rentré de ses expéditions, te comptant moult de ses aventures, tu te trouveras une passion nouvelle pour le monde. Tu t’y plongeras. Reprendras quelques cours et enfin tu tenteras de postuler pour un poste au Département de la coopération magique du Ministère.
« On vous recontactera »
Une fin d’entretien qui ne s’annonce pas bien. Et c’est en rentrant chez toi que tu te mets à pleurer. Roulée en boule dans ton lit, tu regardes la photo de Euridice. Son sourire est si sincère que tu le jalouses. Mais tu ne pourrais pas partir comme lui. Tu n’en aurais pas le courage. Il y a bien une raison pour que lui ait été à Gryffondor et pas toi.

Et il y a le tumulte de la vie. De nombreux accidents à Poudlard, des morts, une épidémie. Tu ne te sens plus en sécurité en Angleterre et t’apprêtes à migrer en France quand on te contact. On t’annonce qu’une place vient de se libérer au Ministère et qu’ils veulent bien te l’accorder. On t’explique que tu seras en période d’essai pendant quelques temps mais tu n’entends pas ces mots tellement ta joie est profonde. Tu  déballes tes affaires et t’empresses de tout raconter à ton frère. Mais tu n’arrives pas à le contacter. Tu t’inquiètes, te demandes où il est et laisse l’inquiétude te consummer.
Jusqu’à ce soir où il toque à ta porte, le visage pétrifié par la peur et les mains recouvertes de sang. C’est ce jour que tu lui poses des questions, que tu lui demandes où il était mais qu’il ne t’écoute pas. Ce qu’il ne te dira pas, c’est pour te protéger, car il sait qu’on le recherche. Non pas les autorités, mais des criminels. Il a vu. Vu la vie s’effacer d’un coup de baguette. Il a vu la mort. Il en sait trop et il ne veut pas que tu en saches autant. Alors il ne dit rien et part, le cœur lourd, sachant pertinemment que c’est la dernière fois qu’il te voit.