La rentrée à Poudlard lors de sa première année était un événement que Daedra avait toujours appréhendé. Il faut dire que dans sa famille c’était un évènement très important, une sorte de rite de passage. Peut-être pas à l’âge adulte mais à une autre phase de leurs vies. Et évidemment, ce qui l’effrayait le plus, c’était la décision du choixpeau magique. Tous les Mills, absolument tous, avaient soit été à Serpentard, soit à Serdaigle. Pas d’exception. Aucun Gryffondor ou Poufsouffle. Ou alors, c’était bien caché et ils n’en parlaient jamais. Quoi qu’il en soit, pour les parents de la jeune fille, il était certain que le choix de sa maison – enfin, leurs maisons, puisque sa sœur jumelle passait par le même évènement – se réduisait à deux options. Et pourtant, elle avait de plus en plus l’impression que ces options ne lui allaient pas du tout. Elle n’était pas particulièrement brillante et détestait travailler d’arrache-pied, si bien que Serdaigle lui semblait inaccessible. Quant à Serpentard… elle ne pensait tout simplement pas avoir le caractère pour. Elle n’était pas fourbe ou manipulatrice ou quoique ce soit dans le genre. Et elle n’avait certainement pas d’aspiration à la magie noire. Il faut dire qu’à onze ans, on ne pensait pas forcément à ce genre de choses et elle ne pensait que tous les Serpentard étaient comme ça. Mais en ce qui concernait sa famille, tous ceux qui venaient de cette maison remplissaient ces traits de caractère. C’est pourquoi elle ne tenait pas en place ce jour-là, dans la Grande Salle, plantée-là à attendre que son nom soit appelé, à attendre que tout le monde passe avant elle. Elle avait à la fois aucune envie d’y aller et hâte que ce soit fini. Les noms en M commencèrent à être appelés et elle su qu'elle serait certainement la prochaine à passer, venant avant sa sœur sur la liste. La table des Serpentard acclama l’entrée de leur nouveau camarade dans la maison et la jeune fille se doutait qu’ils n’allaient pas être les prochains à s’enthousiasmer. Pas pour elle en tout cas.
« Mills, Daedra ! »
Elle se fraya un chemin jusqu’au tabouret sur lequel le choixpeau était posé, tremblant comme jamais. Cette histoire n’allait pas bien finir. Elle souleva le choixpeau, s’assis et le mis sur la tête. De là où elle était, elle voyait parfaitement sa jumelle lui sourire, confiante. Elle n’arriva pas à le lui rendre. Sans mentir, à chaque fois qu'elle la regardait, c’était exactement comme si elle se regardait dans un miroir. Les expressions en moins, étant assez différentes chez l’une et l’autre. Le choixpeau semblait hésiter, ce qui ne fit qu’ajouter à sa panique. Après quelques instants de silence, il rendit son verdict. La table des Gryffondor hurlait de joie, l’acclamant. Daedra n’arrivait pas bien à saisir ce qu’il se passait. Son regard croisa celui de sa sœur, dont le visage s’était décomposé. Elle éprouva tout de suite un sentiment de honte grandissant mais elle ne pouvait pas s’empêcher d’être complètement soulagée. Elle descendis du tabouret et Skyler Mills fut appelée. En descendant, elle la croisa et son regard en dit long. Dae allait avoir des soucis avec ses parents.

« Père, arrête, je t’en supplie ! » supplia Daedra pour la énième fois.
Alistair lui dit de se taire et continua ce qu’il était en train de faire. Skyler, Setheleh et Daedra étaient rentrés de Poudlard pour Noël et cela faisait seulement quelques jours qu'ils étaient là que la situation tournait déjà au vinaigre. Prendre le train pour rentrer chez elle n’enthousiasmait pas du tout la jeune fille. Elle préférait largement l’ambiance conviviale de Poudlard à celle tendue et stricte de leur château familial situé au fin fond de l’Ecosse. Leurs parents venaient les chercher en transplanant à la gare de Londres mais ça se voyait qu’ils le faisaient à contrecœur. Ils auraient préféré que leurs enfants se débrouillent tous seuls et qu’ils reprennent un train vers la gare la plus proche de chez eux. Mais même là, il aurait fallu qu’ils transplanent pour les récupérer parce que la gare était quand même trop loin. Autant qu’ils fassent un effort et qu’ils pensent un petit peu plus loin. C’est donc en s'agrippant chacun fort au bras de chacun de nos parents que les triplets Mills arrivèrent devant le portail de leur immense château. C’était une grande bâtisse perdue au milieu de nulle part, un héritage qui était dans la famille depuis la nuit des temps. Rien qu’à le regarder, Dae en avais froid dans le dos. Cet endroit la mettait mal à l’aise au possible et pourtant c’était chez elle. Elle y avait passé toute son enfance, elle n’avait connu que cet endroit et pourtant. Pourtant, elle ne pouvait chasser de son estomac ce nœud persistant, cette sensation de dégoût qui la prenait aux tripes à chaque fois qu'elle passait le pas de la porte. Cette impression que cet endroit était horriblement malsain, que des choses horribles s’y étaient produites et se produiraient encore. Il faut dire qu’avec un père qui prenait un malin plaisir à torturer psychologiquement son fils ainé, il y avait de quoi. Et c’était exactement ce qu’il était en train de faire à cet instant précis. Sauf qu’aujourd’hui, il y allait plus fort que d’habitude. Le frère de Dae était une forte tête et n’obéissant que rarement, si bien que son père utilisait des méthodes peu habituelles pour le punir. Il recourrait au sortilège de l’imperium, bien que ce soit un des trois sortilèges impardonnables – ce dont il se fichait éperdument – pour forcer Seth à faire ce qu’il voulait. Il n'avait jamais infligé ce genre de choses à ses filles, préférant corriger l’héritier de la famille, celui qui allait reprendre le flambeau. Il y avait des soirs où leur frère restait collé à sa chaise jusqu’à ce qu’il finisse de manger. Mais ce jour-là, c’était bien pire. Les larmes coulaient à flots sur les joues de la jeune Daedra et elle continuait de supplier son père d’arrêter. Elle avait beau ne pas adorer son frère et même le prendre carrément pour un psychopathe, il restait sa famille et elle l’aimait. Et voir ceux qu’elle aimait souffrir lui était insupportable. Son père ignora les plaintes de sa fille et continua ce qu’il faisait. Seth avait refusé de finir un travail que son géniteur lui avait demandé de faire, préférant aller faire un tour sur son balai dehors. C’est à ce moment-là qu'Alistair était intervenu, recourant d’abord à la méthode douce, c’est-à-dire essayer de le convaincre, sans magie. Mais ça avait dérapé, son fils lui avait répondu de manière bien trop insolente et Dae avait vu les yeux de son père briller de colère. Il avait immédiatement attrapé sa baguette et lui avait lancé le sort. Sauf qu’il ne s’était pas contenté de le forcer à faire ce qu’il avait refusé d’exécuter. Ça durait depuis des heures, Seth était exténué, ça se voyait. Il en était à présent à nettoyer les chaussures de mon père avec rien d’autre que sa langue et ses yeux étaient sur le point de se révulser, comme s’il allait tourner de l’œil tellement il était fatigué. Son père l’avait crevé avant, à faire des taches impossible à l’aide seulement de sa force physique. Ce spectacle me faisait physiquement mal à Daedra, de le voir dans cet état et elle ne pouvait plus contrôler ses sanglots. Elle jeta un regard à Skyler, qui était à côté d'elle. Elle n’avait pas l’air plus perturbée que ça. Comment ne pouvait-elle pas l’être ? Dae comprenait qu’elle porte son frère en horreur depuis qu’il lui avait fait les pires crasses imaginables mais le spectacle qui se déroulait sous leurs yeux était révulsant. La jeune fille abandonna l’idée de chercher de l’aide du côté de sa jumelle et se retourna vers la scène.
« Père ! Arrête, il a compris ! »
C’est à ce moment qu'Alistair stoppa net et se tourna vers elle.
« Je t’ai dit de la fermer. Ce n’est certainement pas une Gryffondor que je vais écouter. »
Il repartit de plus belle et Dae enfouie la tête dans ses mains. Quoi qu'elle fasse, elle restait la honte de la famille, celle qui n’était pas ‘‘normale’’ et jamais on ne l’écouterait, jamais on ne la prendrait au sérieux. Elle était totalement impuissante.

Daedra l'avait à présent bien compris, elle n’était pas comme sa famille. Elle n’avait pas les mêmes centres d’intérêts, pas les mêmes idées, pas les mêmes goûts. Même avec ses triplets, elle se sentait complètement différente, à l’écart. Il n’y avait qu’avec ses amis de Poudlard, qu'elle se sentait à sa place. Ce jour-là, elle était particulièrement contente d’aller en cours de Défense contre les Force du Mal. C’était un de ses cours préférés, tandis que Skyler préférait les matières plus ‘‘intellectuelles’’, moins pratiques. Elle venait de fêter ses treize ans avec elle et Seth, le dix-huit septembre et pourtant, elle se rendait déjà compte à quel point ce cours était important, à quel point le monde dans lequel elle vivait était dangereux. De plus, les cours étaient plus que passionnants. Le professeur leur annonça au début de l’heure qu’ils allaient étudier les épouvantards et mettre en pratique le sort qui permettait de les contrer. Dae jeta un regard à Skyler qui se tenait à côté d'elle, excitée à l'idée mais elle ne partageait pas son enthousiasme. Seth était là également, au fond de la salle avec ses amis, ne les ayant pas rejointes. Bien qu'ils ne soient pas tous les trois dans la même maison, les cours communs étaient fréquents. Les deux filles étaient proches l'une de l'autre mais certainement pas de leur frère. Dae attendait donc son tour avec impatience, prête à mettre en pratique ce que le prof leur avait expliqué. La personne juste devant elle réussit son tour et l’épouvantard retourna dans la caisse que le prof avait mis en place. La jeune fille fit quelques pas, baguette prête et il la rouvrit. Deux personnes en sortirent, comme si elles se battaient. Dae reconnu son frère et... elle-même. Son triplet tenait un couteau à la main. D'un geste vif, il trancha la gorge de sa soeur. Alors que le corps de la jeune fille tombait au sol, Daedra remarqua la cicatrice qu'elle portait sous l'oeil. Ce n'était pas elle. Skyler. Son teint vira d’une pâleur maladive, du sang s'écoula à grand flots de sa blessure, ses yeux étaient grand ouverts. Et sa poitrine était immobile, ne se soulevant pas sous l'effet de la respiration. Morte. Les larmes vinrent piquer les yeux de Dae mais elle les ravala, tentant d’ignorer le nœud qui se formait dans sa gorge. Elle avait envie de hurler. De tout casser. De perdre contrôle de ses émotions. Cette scène criait la vérité. Elle avait peut plus que tout qu'un jour les piques que se lançaient ses triplets tournent mal. Que son frère succombe à la folie dont il semblait être pris. Mais autre chose aussi. Malgré leurs désaccords, malgré le fait qu’elles se provoquent en permanence et se disputent à longueur de temps et bien que ses opinions si proches de celles leurs parents l’irritaient au plus haut point, Dae aimait sa soeur. Elle faisait partie d'elle-même et vice versa. Elles étaient liées par le sang et bien plus encore. Sa triplette comptait plus que tout au monde pour elle, elle était la personne la plus importante à ses yeux, la moitié de son être. Et la perdre reviendrait à signer son arrêt de mort, car elle n’imaginait pas une vie sans elle. Daedra leva sa baguette en tremblant, essayant de ne pas montrer ses émotions.
« Riddikulus ! » prononça-t-elle avec autant de conviction qu'elle le pouvait.
La partie de l'épouvantard qui était Seth glissa sur le sang de sa soeur et retomba avec fracas sur le sol. Skyler quand à elle se mit à ronfler bruyamment. En regardant le plus près, le sang se révéla être du jus de grenadine provenant d'un verre que Sky s'était renversé dessus. Tout le monde éclata de rire mais pas Dae. Elle se retourna et croisa le regard de sa sœur, pleins de questions. Elle lui laissa sa place et retourna se mettre au fond de la salle, jetant au passage un autre regard à son frère et sachant déjà que la prochaine forme que prendrait l’épouvantard serait une poupée de porcelaine.

Revenir l’été à la maison pour deux mois était l’une des choses que Daedra redoutait le plus. Elle redoutait toujours que son père s'énerve une fois de plus contre son frère. Mais depuis qu'il avait rejoint les rangs de Celui-dont-on-ne-doit-pas-prononcer-le-nom, c’était plus calme, puisqu'Alistair voyait cela plus comme une bonne chose et semblait satisfait de voir son fils se discipliner. Mais la jeune fille ne supportait toujours pas tous les dîners où elle entendait des propos tous plus horribles les uns que les autres à propos de moldus ou de nés-moldus. Même les sang-mêlés y passaient. Le pire dans tout ça restait que Sky et Seth participaient avec enthousiasme à la conversation, dégradant tous ceux qui se trouvaient à Poudlard. On aurait pu croire que c’était la situation actuelle qui leur donnait encore plus envie d’alimenter le débat mais non. Ça avait toujours été comme ça et à vrai dire, les Mills ne se souciaient pas du tout de ce qui se passait dans le monde de la Magie. Ils savaient qu’ils seraient épargnés et ça leur suffisait. Ils n’étaient pas non plus particulièrement d’un côté ou de l’autre. C’est vrai qu’ils partageaient les idéaux du Seigneur des Ténèbres mais ils n’étaient pas forcément pour les méthodes qu’il employait pour les affirmer. Au fond, ils s’en fichaient probablement comme de leur première chemise. Ils avaient toujours vécus reclus dans leur château, loin de tout le monde et ça ne changerait pas de sitôt. Ce soir-là, au dîner, la discussion sur les nés-moldus avait repris de plus belle, Skyler et Seth pariant sur qui reviendrait à Poudlard et se ferait arrêté. Daedra essayait de ne pas prêter attention, de ne pas prendre part à leur petit jeu quand elle remarqua qu’ils ne parlaient plus beaucoup. Ils avaient épuisé le sujet et le dîner tirait à sa fin. Alistair s’essuya la bouche et posa les mains sur la table, prêt à prendre la parole.
« Votre mère et moi avons quelque chose à vous annoncer. Nous avons tout planifié durant l’été et tout est en ordre, » annonça-t-il avant de marquer une pause, sondant ses enfants du regard.
Dae posa mes couverts et releva la tête. Elle n’avait plus très faim, ayant un mauvais sentiment sur ce qu’il allait leur dire.
« Vous avez tous les trois eu dix-sept ans l'année dernière et étant majeurs, vous êtes désormais en âge de vous marier, une fois vos études achevées, évidemment. »
Non. Ça ne pouvait pas arriver, ce n’était pas possible, pas maintenant. Daedra avait limite envie de vomir rien qu’à l’idée. Des mariages arrangés. Qui faisait encore ça. Et pourtant, elle savait au fond d'elle-même que ce jour arriverait, cette pratique étant plus que courante chez les Mills. Lier deux familles de sang pur par les liens du mariage. En l’occurrence, ça serait quatre puisqu'elle imaginait bien qu’ils voudraient se lier à plus de familles possibles et n’allaient certainement pas les promettre à des frères et soeurs. L’idée révulsait la jeune femme jusqu’au plus profond de son être. Justement, il l’avait dit, ils étaient majeurs. N’avaient-ils pas le droit de décider pour eux-même ? Dae regarda sa mère, cherchant du soutien de son côté mais elle avait les yeux baissés. Elle avait toujours été de nature plus douce que leur père, n’allant pas jusqu’à leur faire des démonstrations d’amour mais elle s’était toujours écrasé derrière son mari. Il disait qu’ils avaient décidés tous les deux mais il était évident qu’il avait été le seul à prendre la décision et faire les démarches auprès des familles. A côté de Dae, Skyler jubilait. Elle, au contraire, avait toujours rêvé de ce jour, rêvé de plus de puissance. Elle croyait à fond aux vieilles idées selon lesquels les sang-purs devaient se marier entre eux.
« Skyler, nous t’avons trouvé le fiancé idéal, » continua-t-il. « Il est à Serdaigle dans la même année que toi et est très brillant. Il s’agit de Phoenix Blackstone, peut-être que tu le connais déjà. »
Phoenix. Daedra le connaissait, elle, il était d’ailleurs l’un de ses très bons amis. Ca ne pouvait pas tomber plus mal, puisque sa meilleure amie était raide dingue de lui et elle savait qu’elle ne le laissait pas indifférent non plus. La jeune femme savait déjà qu'elle allait devoir lui annoncer elle-même et qu’elle lui voudrait, inconsciemment, même si c'était sa jumelle qui allait l’épouser.
« Quant à toi, Daedra, » reprit son père, le ton beaucoup plus sec, « nous avons pensé à t’unir à quelqu’un du même âge, toujours, qui serait à Serpentard. Cela rattrapera peut-être la honte de t’avoir chez les Gryffondor. »
Il dit le nom du concerné et parla de la fiancée de Seth mais elle n'y prêta pas attention. Elle ne l’écoutait plus et de toute manière, elle ne voyait pas de qui il parlait. Elle se leva brutalement, le coupant presque dans sa lancée.
« Très bien. Je peux sortir de table maintenant ? »
On l’y autorisa et la jeune femme fila dans sa chambre, prête à pleurer toutes les larmes de son corps, prête à mourir de désolation.

Dae ne savait pas très bien ce qu'elle faisait là. Elle ne voulait pas être là. Elle jeta un œil autour d'elle et vit tout un tas de gens qui pleuraient l’être cher qu’ils venaient de perdre. Mais elle ne le connaissait qu’à peine, ne l’ayant vu qu’une fois. Tout ça par ce qu'elle était supposée l’épouser lors d’un mariage arrangé. Et en plus, il était mort parce qu’on avait découvert qu’il était né-moldu et la vielle tante Morna Mills avait voulu lui faire une farce pour avoir menti. Ca avait mal tourné, comme d'habitude et ils avaient réussit à faire croire que c'était l'oeuvre des moldus du village d'à côté. Mais la famille Mills n’aurait pas dû accepter ça, qu'ils leur aient menti ainsi. Et pourtant, ils étaient là, à son enterrement et Dae était censée être en deuil. Sauf qu'elle s’en fichait puisqu'elle le connaissait à peine. A vrai dire, elle avait été infiniment soulagée à l’annonce de sa mort. C’était assez dégueulasse, elle le concevait mais elle avait presque cru qu’elle allait échapper à un mariage. Mais la réalité des choses lui était revenue avec fracas : jamais son père n’accepterait qu'elle ne me marie pas. Il trouverait surement un autre prétendant, bientôt qui plus est. Histoire de rattraper le fait qu'elle était à Gryffondor, comme il disait. Elle n’allait pas échapper à son destin, son père ne le permettrait pas et ça la tuait. Il était assis à côté d'elle et se pencha pour lui chuchoter à l’oreille.
« Les Goyle ont un fils qui te fera un parfait fiancé. Je vais leur parler bientôt, ne t’en fais pas, » lui glissa-t-il.
Ce qu’il venait de dire la mettait hors d'elle pour diverses raisons. Non seulement, c’était complètement irrespectueux pour la famille de lui dire un truc pareil alors qu’ils étaient en train d’enterrer son précédent fiancé mais en plus, il disait ça comme si elle était réellement triste de ne pas pouvoir se marier. Car elle le savais, il devait se douter et même savoir qu'elle n’était pas sur la même longueur d’onde que Skyler sur ce point-là. Bon, à vrai dire, elle n’était pas sur la même longueur d’onde que Sky sur beaucoup de points mais elle se gardait bien de le dire. Seulement, elle n’avait pas réussi à s’enthousiasmer autant qu’il aurait fallu à l’idée de son mariage et elle se doutait que son père l’avait remarqué. A peine eut-il prononcé ces paroles que la jeune femme laissait les larmes couler sur ses joues. Les larmes qu'elle retenait, à l’idée qu'elle ne pourrait jamais échapper à ce qu'elle considérait comme une fatalité. Qu'elle ne pourrait jamais connaître l’amour, le vrai, celui où on n’est pas déjà marié à quelqu’un d’autre et où on n’a pas besoin de se cacher. Celui où si on se fait découvrir, on ne se fait pas déshonorer pour adultère. Elle ne pensait pas être en mesure d’aimer son futur mari, pas si on l’y forçait. Alors elle se leva du banc, usant de ses larmes pour prétendre que le chagrin à l’idée d’avoir perdu son fiancé était trop intense et quittait la pièce. Elle savait qu'elle ne pouvait pas s'en aller en transplanant, que ça mettrait son père dans une colère noire. Mais elle ne voulait pas qu’on la cherche pour la ramener à la cérémonie. Elle avait besoin d’être seule donc elle se cacherait et ne ressortirait qu’une fois ce manège terminé. La seule pièce ouverte qu'elle trouva sans avoir besoin d'avoir recours à l'alohomora était un placard à balais. Elle s’assis par terre et renferma la porte, à présent seule avec ses pensées.
« Lumos, » murmura-t-elle à sa baguette, qui s’illumina.
Elle n’aimait pas particulièrement le noir et quelque part, cette petite lueur la rassurait. Elle était à peine là depuis quelques minutes que la porte s’ouvrit. Elle aurait dû la verrouiller. Skyler se tenait de l’autre côté et sans poser de questions, vint s’assoir à côté de sa soeur, refermant la porte. Elle posa la tête sur son épaule et lui tapota le bras.
« T’inquiètes pas, ça va aller, » lui dit-elle et pendant un instant, Daedra crut qu’elle la comprenait. Et surtout, qu’elle ne lui en voulait pas, qu’elle n’essayait pas de la faire changer d’avis, qu’elle avait de la peine pour elle parce qu’on la forçait à me marier. Mais elle reprit la parole : « Père va te retrouver un fiancé digne de ce nom et tu pourras faire ton deuil. »
Dae baissa la tête, ayant presque envie de rire. Elle avait tout faux. Parfois elle se demandait comment elle pouvait être sa triplette.