« Bienvenue en Angleterre, Alinka. » Emmitouflée dans un gros manteau en polaire, perdue devant la gare de King's Cross au milieu de tous les passants, la fillette de six ans regardait tout ce qui se passait autour d'elle. Ses grands yeux verts se posaient à la fois sur le paysages, les immeubles, les gens qu'elle croisait, le ciel, et les mines réjouies de ses parents et de sa soeur. Pourquoi est-ce qu'ils étaient tous aussi contents ? On était pas à la maison. On avait quitter maison et amis, tout ça pour que Natalia fasse ses études à Poudlard et non pas à Durmstrang. C'était des balivernes. Alinka n'avait pas envie d'être ici, elle voulait rentrer chez elle et reprendre ses excursions dans la forêt qui se trouvait au bout de leur maison. Rien ne serait plus pareil. Cette ville était tellement grise qu'elle se sentait encore plus déprimée. Jouant avec une mèche de ses cheveux, comme à chaque fois qu'elle était chagrinée, elle continuait de balayer tout ce qui se passait de son regard d'un vert d'eau. « Chcę iść do domu. » Oui, rentrer à la maison, reprendre les transports, tout de suite et ne plus jamais revenir dans ce pays moche et gris où les gens sont moches et ne lui ressemblent pas. Son père s'approcha doucement d'elle, posa sa main sur son épaule avec tendresse et soupira un instant. Il comprenait que sa cadette soit déconcertée, mais pourtant elle devrait faire avec. Au fond, il était persuadé que ce mal du pays finirait par passer, ce n'était qu'une question de temps avant qu'elle adopte l'Angleterre. « Notre maison est ici, à présent. Tu ne dois plus parler polonais, mais seulement anglais, comme te l'as appris ta nourrice. » Les sourcils froncés, la mine renfrognée, Alinka n'était pas du tout convaincue de ce changement brutale et la mine réjouie de Natalia lui donnait envie de la frapper. Elle pouvait bien être contente d'être là, bientôt elle serait à l'école et elle n'aiderait pas sa soeur à s'habituer à son nouvel environnement.

« Alinka Jelena Galinski, vient ici, immédiatement. » La voix d'Anka Galinski avait tranché l'air d'un air menaçant. Elle n'avait pas le regard bon, et se préparait à disputer sa cadette, pour la énième fois. D'un air penaud, l'enfant exécuta l'ordre et vint à la confrontation. Sa mère la réprimandait régulièrement, mais cela ne l'atteignait pas. Elle ne l'aimait pas. Elle aurait préférée qu'elle ne soit pas là, à vrai dire. C'était une pauvre femme très belle mais qui n'avait que ça pour elle. Elle s'était mariée à un sorcier et avait toujours tenté d'intégrer un monde qui n'était pas le sien, et sa fille se faisait une joie de le lui rappeler. Cette fois-ci, Alinka avait fait du balais dans la maison et, accessoirement, tout renversé sur son passage. Les tableaux étaient par terre, les vases brisés en mille morceaux, et les rideaux éventrés. « Combien fois je t'ai dis de ne pas faire de balais à l'intérieur de la maison ! Bientôt à cause de toi, plus rien ne sera en état ici. Tu es punie pendant deux semaines ! » Les grands yeux verts de la jeune fille s'écarquillèrent et s'agrandir encore plus. Ses lèvres pulpeuses et roses frémirent sur le coup de l'énervement. Pour qui se prenait-elle ? Déjà qu'ils l'avaient forcé à venir ici, elle ne pouvait plus faire ce qu'elle voulait et ce qu'elle aimait ! Avant, en Pologne, elle allait voler en balais dans la forêt qui était en bordure de leur propriété. Mais ici, dans tout cet amas de bitume, elle n'avait plus d'endroit à l'abri des regards des moldus, si ce n'est à l'intérieur de sa maison. Si elle cassait tout parce que les passages étaient étroits, c'était de leur faute. Ils n'avaient qu'à la laisser chez sa grand-mère, elle en aurait été parfaitement heureuse. « Tu n'as pas le droit ! Tu ne comprends pas, tu es une moldue ! » Le visage d'Anka se referma et on pouvait y lire la peine qu'elle avait à l'écoute des propos de sa fille. Néanmoins, la première concernée n'en n'avait que cure, et elle tourna les talons pour aller s'enfermer dans sa chambre en claquant la porte pour montrer à quel point elle était furieuse.

« Bienvenue à Poudlard, Alinka. » Cinq ans s'étaient écoulés depuis son arrivée en Angleterre, et voilà qu'on lui resouhaitait la bienvenue. Au fond, elle espérait quand même qu'elle apprécierait plus le château que Londres, ou, tout du moins, qu'elle s'y sentirais plus à sa place, plus chez elle. Ses grands yeux verts, encore une fois, examinaient tout ce qui passait devant elle, et tout ce qui se trouvait autour. Cela n'avait pas la beauté des paysages polonais, mais c'était tout de même fascinant. Elle fut, en particulier, impressionnée par le plafond magique qui lui donnait l'impression d'être dehors tout en étant enfermée entre quatre murs.

Ses premiers pas à Poudlard se firent dans le calme et sans qu'elle se fasse remarquer. A chaque fois qu'elle se trouvait dans un endroit nouveau entourée de personnes qu'elle ne connaissait pas, Alinka observait une période d'observation dont la durée variait. C'était ainsi jusqu'à ce qu'elle arrive à se forger une opinion sur le sujet ou sur la personne. « Galinski ? Tu n'es pas de la famille de Natalia ? » Linka fit volte face. Face à elle se trouvait une fille, affreusement laide, qui devait avoir l'âge de sa grande soeur et qui la gratifiait d'un air dédaigneux qui l'agaçait déjà. « C'est ma soeur. Un problème ? » La fille laide en face d'elle pouffa. De toute évidence ce n'était ni une amie, ni une admiratrice de sa grande soeur. Le sang commençait à bouillir dans les veines d'Alinka. Elle n'avait jamais fait preuve de patience et avait une capacité à s'énerver très rapidement, en particulier lorsqu'elle sentait que sa famille était attaquée? « Ta soeur est une bonne à rien et voilà qu'on irrite de sa miniature. Natalia, au moins, est jolie ! » Lâchant son sac d'école, Alinka se rua sur l'élève qui, de toute évidence, ne s'attendait pas à une réaction aussi excessive. Ce fut des élèves, des coincés de préfets, qui les séparèrent et Alinka écopa d'un nombre impressionnant d'heures de colle. Sa réputation était faite : une bagarreuse qui s'en prenait à des élèves beaucoup âgés qu'elle. Une vraie casse-cou. Au fond ce n'était pas la vérité, et elle pensa un instant à la rétablir, mais elle se ravisa. Après tout, avec un tel jugement sur elle, on viendrait moins lui chercher des noises, c'était une certitude. C'est ainsi qu'elle garda cette image fausse d'elle-même et qu'elle la cultiva par d'autres disputes mémorables au sein du château.

« Alinka, je t'aime. » Elle aurait dû se sentir flattée, heureuse, chanceuse même. Ce n'était pas toutes les filles de son âge qui avaient le plaisir d'entendre ses mots si convoités sortir de la bouche du garçon qu'elles fréquentaient. Le problème, c'est qu'Alinka n'était pas toutes ses filles. Elle ne voulait pas de l'amour. Pire, elle le fuyait comme la peste. Son coeur aurait dû battre la chamade, elle aurait dû ressentir cette chaleur intense de plénitude qui emplit les personnes heureuses, mais rien. Le vide total. Son coeur avait un rythme cardiaque normal et son cerveau était comme arrêté. Pourquoi est-ce qu'il avait fallut qu'il lui dise ça ? Maintenant, il avait tout gâché. Elle était occupée à remettre son uniforme après avoir profiter d'un moment d'intimité avec lui et fuyait à tout prix son regard. Au fond, elle l'appréciait quand même, elle n'avait pas spécialement envie de lui faire de la peine, mais elle ne l'aimait pas. Remettant ses cheveux en place en les ébouriffant un peu, elle posa ses yeux verts sur lui, et esquissa un léger sourire. Après tout, sa soeur lui avait toujours dit qu'il était plus facile de faire passer la pilule avec un sourire. « Je ne t'aime pas. Je suis désolée. » Le regard abasourdi du garçon lui fit comprendre ce qu'elle savait déjà. Il ne s'attendait pas à ça et il allait s'énerver. En trois secondes c'était fait et les insultes pleuvaient au dessus de la tête de la polonaise. Lassée d'autant d'immaturité, elle finit de se rhabiller et alors qu'elle renouait  nonchalamment sa cravate, elle coupa court à la discussion. « C'est de ta faute. Tu compliques tout avec des sentiments qui n'ont pas lieu d'être ! J'aimais bien passer du temps avec toi, mais je ne veux pas connaître l'amour. Navrée si ça blesse ton égo, mais c'est comme ça. » De toute évidence, la conversation allait tourner en rond, et elle n'avait aucune envie de se prendre la tête pour lui expliquer de trente façon différentes qu'elle n'était absolument pas amoureuse de lui. Elle ne le serait sans doute jamais et d'aucun garçon. Il ne fallait pas qu'il le prenne personnellement, c'était ainsi et c'est tout. Quittant le placard ou ils s'étaient enfermée, elle tourna les talons sans une pensée pour lui. En vérité, elle se demandait surtout qu'elle nouvelle réputation on allait encore lui attribuer.