Daniel est né à Londres en 1957.

Il n’a jamais été un enfant désiré. Il fut simplement le fruit d’un coup d’un soir un peu trop alcoolisé entre une jeune moldue, une junkie qui jouait à merveille la guitare acoustique, et un sorcier bien plus âgé, propriétaire d’un pub clandestin. Il payait la jeune femme une misère afin qu’elle se produise avec son groupe au sein de l’espèce de cabaret corrompu qu’il possédait. Il la payait également pour d’autres services, bien que celle-ci, éperdument éprise de l’homme de plus de 20 ans son âge, n’eut pas besoin de quelques sterlings pour s’offrir à lui. Elle savait qu’il était un sorcier ; de toute façon le pub entier était dirigé et fréquenté exclusivement par des sorciers. L’unique raison pour laquelle elle pouvait y entrer et être acceptée était son physique exceptionnel – peu d’hommes lui résistaient – couplé à ses talents de guitariste. Et bien entendu, la relation « particulière » qu’elle entretenait avec George, le fameux père de Daniel.

George n’était pas amoureux d’elle. Le sentiment qu’il éprouvait à son égard se rapprochait plutôt d’une certaine possessivité malsaine. Quiconque l’approchait d’un peu trop près en payait le prix fort. Elle était dépendante de lui car elle n’avait ni toit ni famille, était évidemment très pauvre et voyait en ce salaud sans scrupules son sauveur. De plus, il la laissait tranquillement faire ses petites affaires, n’objectait jamais, quand bien même il savait que l’argent qu’il lui donnait finissait en très grande partie dans la drogue. Seul ce qu’il obtenait d’elle lui importait.

Un beau jour, l’inévitable survint : le ventre de la belle se fit plus rond de mois en mois, et c’est avec horreur qu’elle comprenait ce qui était en train de se passer. Elle était consciente d’avoir déjà extrêmement de mal à se maintenir elle-même convenablement en vie, qu’en serait-il d’un bébé ? Cette petite chose fragile, bruyante, entrainant un nombre de responsabilités qui lui semblait illimité…  La notion d’« instinct maternel » lui était inconnue. Lorsqu’elle l’avait annoncé à George, le père, sa réaction fut sans appel : à peine aurait-elle accouché qu’elle devrait s’en aller, bien entendu avec l’enfant. Il refusait toute implication dans cette « affaire » et considérait sans aucune logique que c’était tout bonnement la faute de la jeune femme s’il se retrouvait dans cette situation. L’avortement était hors de portée à cette époque, mais elle répétait sans cesse à George que de toute façon l’embryon ne survivrait pas à son train de vie, que dès qu’elle s’en serait débarrassé, ils pourraient tout deux continuer comme si rien de toute cette histoire ne s’était produit.

Mais c’était sans compter sur bébé Daniel. Malgré le nombre de pilules avalées, les cigarettes, l’alcool à répétition et plus que de raison durant des mois, le fœtus n’a connu aucun dommage, d’aucune sorte que ce soit. Quelque chose en ce petit être résistait. Etait-ce dû à son sang mêlé ? Etait-ce un rare et (mal)heureux hasard ? La mère ne le saurait jamais, pour la simple raison que sa vie prit fin moins d’une minute après l’accouchement. George était furibond. On ne saurait dire s’il l’était plus du fait d’avoir perdu à jamais son jouet favori ou s’il était tout bonnement furieux de se retrouver seul avec le bébé. Il lui attribua un prénom au hasard, Daniel, qui se trouvait également être son meilleur client, un poivrot quinquagénaire. Il décida au bout de quelques jours qu’il le confierait à sa sœur, sans lui laisser le choix. Il n’avait pas énormément de contact avec cette femme autre qu’une malheureuse lettre pour Noël et quelques échanges à l’enterrement de leurs parents. Mais si elle refusait de prendre Daniel à sa charge, il n’hésiterait pas à la menacer. Il saurait être persuasif.

C’est ainsi que Daniel grandit comme fils unique, auprès d’une vieille tante veuve l’ayant pris en pitié à sa naissance. Il ne manqua jamais de rien car, contrairement à son père, sa tante était pourvue de cette chose que l’on appelle « conscience ». Jamais elle n’aurait laissé un enfant à l’abandon, et aurait culpabilisé jusqu’à sa mort d’avoir refusé de prendre Daniel sous son aile. Cependant, elle ne lui montra jamais l’affection d’une mère. Elle maintenait toujours une certaine distance entre elle et lui. Daniel ne connut durant son enfance ni câlins affectueux, ni repas de famille, ni vacances où que ce soit.
Il n’a également jamais revu son père. Sa tante lui a raconté très honnêtement son histoire dès lors qu’il fut en âge de comprendre. Fidèle à lui-même, il n’eut pas une bien grande réaction. Il ne vit en rien l’utilité de se lancer à la recherche de l’homme, ni même d’essayer de reprendre contact. A quoi bon perdre son temps avec un homme apparemment pourri jusqu’à la moelle, qui s’est volontairement débarrassé de son propre fils ?

Contre toute attente, il n’avait pas l’air d’un enfant malheureux. Tout comme le Daniel actuel, il blaguait énormément, toujours un sourire aux lèvres. Il se mit à l’écriture très tôt, puis vint le chant lorsqu’il écoutait en cachette la musique de sa tante. Il appris à une vitesse phénoménale comment se faire apprécier de tous et devint très vite le Daniel je-m’en-foutiste, sympathique et tête-dans-les-nuages dont vous avez lu la description ci-dessus. Plus tard, lors de la réception de sa lettre pour Poudlard, qui coïncidait surtout avec les prémices de l’adolescence, il est également devenu le fameux joueur que vous connaissez à présent. Puis vint l’âge des amourettes, et le « joueur » est aussi devenu maître dans ce domaine.
Peut-être le manque d’intérêt qu’il porte aux sentiments d’autrui est-il lié au fait qu’on ne lui en a jamais porté : il a grandi de la sorte, s’est forgé de la sorte, pourquoi donc aurait-il changé quoique ce soit?  

Enfin, il eut toujours su qu’il était un sorcier et a grandi dans un environnement magique. Il était très excité de partir pour la célèbre école de magie, école à laquelle il s’attachera énormément d’années en années. Ce lieu était devenu bien plus qu’un foyer : croyez-le ou non, le château était également devenu son seul véritable ami. Puis, bien sûr, vint le Chat. Et la suite, eh bien, c’est à vous de voir si vous souhaitez la connaître.