[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]things change and friends leave. and life doesn't stop for anybody. ⊹
« Johan. » « Hmm ? » « Johan, Johan, Johan, Johaaan. » « Oui, Joakim ? » « Raconte-moi encore l’histoire du Norvégien à Crêtes qui avait perdu sa maman. » « Mais je te l’ai déjà raconté cent fois. » « Allez, s’il te plait. S’il te plait ! » « Bon, d’accord. » Un sourire illumina le visage du petit Joakim, et il se précipita auprès de son frère. Celui-ci était confortablement assis dans un canapé de l’immense demeure des Ingherneils, juste en face d’une cheminée où le feu crépitait ; doucement, il passa un bras autour des épaules de son frère cadet. Dehors, la neige tombait à gros flocons. Joakim glissa son pouce dans sa bouche, attendant patiemment que le récit commence. Il était bien, là. C’était sa maison. C’était son chez lui. Pour rien au monde il n’échangerait sa place, et même du haut de ses cinq ans, il savait déjà qu’il avait énormément de chance d’être né dans
la bonne famille. Doucement, il sentit quelqu’un s’installer à côté de lui, et il adressa un doux regard aux jumelles, Heidi et Hanna, venues écouter Johan elles aussi. Puis Solveig se joignit à eux, sans doute venue prêter une oreille distraite. Enfin, son frère ouvrit la bouche. Et un silence complet s’installa dans le salon, tandis qu’il narrait une fois encore les aventures d’un bébé Norvégien à Crêtes décidé à retrouver sa mère. Au fil du récit, le rythme cardiaque de Joakim s’emballa à plusieurs reprises ; il avait beau connaître l’histoire par cœur, il avait sans cesse peur pour ce personnage fictif. Pour ce dragon. Les dragons ne faisaient-ils pas partis de sa famille, après tout ? Les Ingherneils représentaient-ils simplement les êtres humains ou englobaient-ils aussi ces créatures merveilleuses qu’ils élevaient ? Les enfants étaient calmes autour de l’aîné de la famille ; cependant, bien vite, les mêmes cris de stupeurs étouffés vinrent ponctué ses phrases enjouées, et les mêmes questions se firent entendre, encore et encore.
Mais, Jo, pourquoi le bébé dragon n’a-t-il pas craché de feu pour se défendre ? Hé, dis, est-ce que la maman aimait vraiment le bébé dragon ? C’était dans ces moments-là que Joakim savait qu’il avait sa place, ici. C’était dans ces moments-là qu’il venait à se dire que sa famille était sans doute la meilleure qui puisse exister sur cette Terre. Dans un coin, les adultes parlaient entre eux à voix basse, ne cherchant pas à troubler cet instant de quiétude chez leurs enfants.
« Et c’est comme ça que le Norvégien à Crête retrouva sa maman, et ils vécurent heureux jusqu’à la fin des temps. » Il eut eu des applaudissements et des cris allègres.
« Encore ! » « Vous pensez pas que vous en avez eu assez pour le moment ? » Joakim se joignit à ses cousines pour secouer la tête à la négative ; Johan se mit à rire, puis s’éclaircit de nouveau la gorge.
« Et l’histoire du Magyar à Pointes qui avait un rhume, vous la connaissez ? » « Raconte-nous Jo ! » Quelque part, dans le regard de Joakim, il y avait de l’admiration. De l’admiration pour ce frère ainé qui s’occupait de tous les membres de sa famille, qui accordait son temps libres pour les plus jeunes. Chacun avait sa place, quelque part. Joakim avait du mal à différencier ses cousins et ses cousines de ses frères ; pour lui, ils n’étaient qu’une seule et même entité. Pour lui, ils n’étaient qu’une bulle. Une bulle qui n’avait pas besoin des autres.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]you don't have to see the whole staircase, just take the first step.. ⊹
« J’ai peuuur. » « Et pourquoi tu as peur, mon chéri ? » Joakim observa sa mère, tandis qu’il tentait tant bien que mal d’enfiler sa chemise. Cette peur lui déchirait presque le ventre, quelque part. Il ne voulait pas partir. Il ne voulait pas quitter le cocon familial. Il ne voulait pas laisser ses cousins et ses cousines plus jeunes en partant. Il ne voulait pas quitter cette famille qu’il aimait tant.
« J’ai peur que vous me manquiez trop. » Sa mère eut un sourire, avant de doucement ébouriffer ses cheveux et l’aider à enfiler sa chemise par le col.
« Ne dis pas de bêtise, quand tu seras à Poudlard, tu vas presque oublier notre existence ! » Elle se mit à rire doucement, tandis que Joakim, lui, devint pâle. Les oublier ? Comment pouvait-il les oublier ? Il était presque sûr que même les dragons, ces créatures qu’il regardait avec méfiance depuis qu’on lui avait raconté tous les accidents qui avaient bien pu avoir lieu dans sa famille, allaient lui manquer. Il prit une profonde inspiration.
« Je suis sûr que vous allez me manquer quand même. » Sa mère leva les yeux au ciel avant de finalement l’entraîner hors de sa chambre, faisant doucement léviter sa valise pour qu’elle les suive dans le salon. La maison semblait encore plus vivante que d’ordinaire. Six des enfants avaient à se préparer pour le grand départ pour Poudlard, après tout ; des cris et des questions fusaient de toutes parts.
Qui a vu mes dragées surprises de Bertie Crochue ? Quelqu’un a une plume à me prêter ? Mais si maman, je te jure, j’ai perdu ma baguette ! Toute cette agitation ne fit qu’accentuer le malaise de Joakim. D’ordinaire, il trouvait cette atmosphère apaisante. Là, elle l’oppressait. Elle l’oppressait parce qu’il avait l’impression qu’il ne la retrouverait que dans neuf mois, lorsqu’il reviendrait de sa première année à Poudlard.
« Chéri, on va t’écrire toutes les semaines si tu veux. » Rosa Ingherneils se mit en face de son fils, et s’appliqua à lisser sa chemise distraitement.
« Et puis, regarde, Sirrush et Plato vont aussi à Poudlard pour la première fois, tu vas être avec eux. Johan, Solveig et Silas ont l’habitude d’y aller. L’année prochaine, les jumelles et Hella vont suivre. Vous allez bientôt être tous à Poudlard. Vous vous serrerez les coudes. » Sa voix était si apaisante. Doucement, le rythme cardiaque de Joakim se calma.
« M’écrire toutes les semaines, hein ? » « Si tu le souhaites, oui. » Joakim eut un sourire.
« D’accord. » Sa mère vint déposer un baiser en haut de son front, et tourna les talons pour se diriger vers son fils aîné, à des années lumières de s’inquiéter comme son cadet. Joakim demeura là, et, doucement, il attrapa le bras de sa cousine qui passait en face de lui.
« Dis, Solvy, elle est grande comment, la bibliothèque à Poudlard ? » Sa cousine eut un sourire.
« Elle est immense. » « Immense comment ? » « Immense comme quatre fois la taille de la bibliothèque familiale. » Ce fût au tour de Joakim de sourire et il relâcha son bras. C’était déjà ça. Parmi les livres, peut-être qu’il se sentirait chez lui.
« Ca va aller, Joa. » Il hocha doucement la tête. On n’arrêtait pas de lui dire que cela allait aller. Mais ne se rendait-il pas tous compte que s’il angoissait de cette manière était simplement parce qu’il les aimait trop ?
« Oh, je sais. » Oui, il savait. Il n’avait juste pas encore réussi à se convaincre.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]the lone wolf dies but the pack survives. ⊹
« Monsieur Ingherneils. » « Oui ? » Joakim leva les yeux vers le professeur de potion, un air innocent sur le visage. Oh, le ton que Professeur Lestrange venait d’employer ne lui faisait pas réellement peur. Il savait simplement qu’il avait dû faire quelque chose de travers.
Encore. « Est-ce que me détailler intégralement la sexualité de la chèvre était réellement nécessaire pour un devoir sur les Bézoards ? » Des rires discrets se firent entendre dans la salle de Potions, et Joakim ne répondit rien pendant quelques instants.
Typologie d’un élève qui a fait trop de recherches. Cela n’était pas de ma faute si j’avais trouvé que les Bézoards se trouvaient dans les estomacs des chèvres. Et que les chèvres se nourrissaient de nourriture diverse et variée. Et qu’il n’avait tout simplement pas pu s’arrêter en si bon chemin, continuant sur l’espèce de la chèvre, puis ensuite des mammifères, jusqu’à se retrouver le nez dans un livre moldu à propos de l’agriculture française. Le pire dans tout cela était qu’il ne me souvenait même plus comment il avait bien pu en arriver là.
« J’ai fait des recherches en trop. » C’était le cas de le dire. Le professeur leva les yeux au ciel avant de rendre la copie de Joakim, et celui-ci observa un
E+ griffonné en haut, dans le coin droit. Il eut un sourire en coin. Il avait peut-être rendu un parchemin dépassant de trente centimètres la taille demandée, mais au moins, son devoir avait été correct. Si correct qu’il avait parlé de choses qui n’avaient même pas attendues. Des choses comme le système d’arrosage chez les moldus des années cinquante.
« Le cours est terminé, vous pouvez y aller. » Joakim se leva, rassembla ses affaires, et se précipita vers la sortie. Il émergea des cachots en montant les escaliers quatre à quatre, et se rua dans les étages en bousculant des élèves sur son passage. Oh, il devait partager. Dans la foule, il finit par apercevoir son cousin, et il se posta devant lui avec un immense sourire, tendant les bras devant lui pour que Sirrush soit confronté à son merveilleux devoir.
« J’ai réussi à faire lire à un Lestrange quelque chose à propos des molduuus ! » déclara-t-il, secouant son devoir si bien que son cousin ne pouvait absolument rien en lire. Il exécuta une petite danse de la victoire en plein milieu du couloir, se fichant bien des regards qu’on pouvait lui lancer. Il adressa un immense sourire à Sirrush, avant de tapoter son épaule.
« Le règne des Ingherneils est en marche, cousin. » Et il tourna simplement les talons, repartant gambader dans son coin, laissant son cousin sans qu’il n’ait pas le temps d’en dire quoi que ce soit. Parce qu’au fond, Joakim était comme cela. Encore attaché aux valeurs familiales, une tête qui passait sa vie à faire des recherches. Une tête qui passait sa vie à élaborer des plans. Continuant son avancée, il finit par s’arrêter à côté du bureau de son oncle, et il l’ouvrit sans prendre la peine de frapper.
« On m’a chargé de te dire que j’étais plus intelligent que tous mes cousins réunis. On devrait me faire sacrer roi et vouer un culte en mon nom. » Et Joakim referma la porte avant de continuer sa course, célébrant à qui voulait bien entendre sa petite réussite. Et, comme à chaque fois, cette course s’acheva dans la bibliothèque, où il finit par s’asseoir et continuer à faire des recherches pour un devoir qu’il avait déjà rendu et, pire encore, qui avait déjà été noté.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]burning on the inside. ⊹ Joakim se réveilla en pleine nuit, le nez dans son oreiller. Il fronça les sourcils. Il avait entendu du bruit, là, quelque part. Doucement, il releva la tête, avant de finalement entendre de nouveau le parquet craquer. Il déglutit, puis il finit par se décider à se lever. Il venait de célébrer ses seize ans. Il était en cinquième année. Il était à peine revenu chez lui pour les vacances de Noël. Dans les ombres chinoises dessinées par la nuit lunaire, il entraperçut la silhouette d’un garçon, occupée à descendre les escaliers quatre à quatre. Il la suivit sur la pointe des pieds, attrapant sa baguette en chemin, l’esprit encore légèrement embrumé par les songes desquels il avait été tiré. Puis il le reconnut.
Son frère. Son petit frère, Jonas, encore trop jeune pour se rendre à Poudlard. Il sortit dehors. Joakim le suivit. Et, malheureusement, il comprit ce que son frère avait prévu de faire une demi-seconde trop tard. Il s’élança à sa poursuite, courant. Mais Jonas était déjà bien trop près de l’endroit où les dragons étaient gardés. Jonas était déjà bien trop près du Norvégien à Crête qui couvait son œuf.
Quelle était l’histoire, déjà ? Celle du Norvégien à Crête qui avait perdu sa maman ? « Jonas, reviens ici tout de suite ! » La demande de Joakim s’était faite dans un murmure. Un murmure que son frère ignora avec superbe. Il poussa un soupir, continuant de dangereusement s’approcher de l’enclos. Il y avait eu trop d’accidents, avec des dragons. Bien trop d’accident. Joakim n’avait pas ce don pour ces créatures ; seuls son frère et Sirrush semblaient l’avoir, en plus de son père. Jonas ne l’avait pas non plus. Ce n’était pas quelque chose que tout le monde pouvait se voir offrir. Jonas était trop jeune. Trop jeune mais suffisamment téméraire pour se jeter dans les ennuis dès qu’il en avait l’occasion.
« Jonas je ne me répèterais pas ! » « Moi aussi je suis doué avec les dragons ! » Sa voix avait été trop forte. La mère Norvégien à Crête releva la tête, et les observa. Joakim s'arrêta dans ses gestes, espérant qu’elle ne les considère pas comme une menace.
« Regard, Joa ! Je suis sûr que je peux encore m’approcher d’elle, elle ne me fera rien ! » Et il s’approcha. Le dragon gronda. Et Joakim s’élança à la suite de son frère, savant pertinemment que cela était le seul moyen de l’empêcher de faire la plus grosse bêtise de sa vie.
« Je suis sûr que je peux la caresser aussi ! » Et il fit un pas en plus. Le pas de trop. Il l'attrapa par le bras, le tirant en arrière pour qu’il recule tandis que le dragon se mettait à rugir. Et ils se mirent à courir. A courir très vite. Lui devant, Joakim derrière. Et le dragon continua de gronder. Et l’atmosphère se fit plus chaude. Beaucoup trop chaude.
« Cours, Jonas ! » Mais c’était trop tard. Il le savait. Il avait suffisamment fait de recherches sur les dragons pour savoir que leurs flammes pouvaient porter sur des centaines de mètres. Il avait suffisamment fait de recherches pour savoir qu’aucun sort ne pouvait les neutraliser, surtout lorsque l’on n’avait que seize ans. Alors, il poussa son frère à terre et il s’affala sur lui pour le recouvrir. Il tendit sa baguette en direction du dragon qui ouvrait de nouveau la gueule pour cracher des flammes.
Peut-être qu’il pouvait simplement faire filtre, comme il avait bien pu le lire quelque part, un jour. Peut-être que ça le sauverait. Peut-être que ça les sauverait tous les deux. « PROTEGO TOTALUM ! » Les flammes les englobèrent. Puis le charme céda. Il céda simplement parce que rien ne pouvait faire face aux dragons, pas même les Ingherneils.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]love is putting someone else’s needs before yours. ⊹
« Vous avez de la chance, jeune homme, vous le savez ? » Joakim tourna la tête vers la Médicomage qui se trouvait à quelques mètres de lui. Il acquiesça avec un sourire au coin de ses lèvres, ignorant la douleur qui continuait de le lancer dans toute son épaule droite.
« J’ai entendu dire, oui. » On lui avait répété une bonne centaine de fois. Suffisamment pour que cette phrase revienne le hanter durant la nuit. Il avait hâte de partir d’ici. De s’en aller loin, de rentrer chez lui. La femme poussa un soupir, avant de tourner les talons et sortir de sa chambre. Doucement, Joakim se leva de son lit d’hôpital.
D’hôpital, oui. Cela faisait deux mois qu’il se trouvait à Ste Mangouste. Deux mois qu’il était piégé ici entre potions contre la douleur et pansements réparateurs. Deux mois qu’on s’appliquait à lui faire comprendre qu’il ne pourrait plus utiliser son bras droit. Que les brûlures qui l’avaient rongé au troisième degré ne pourraient jamais être totalement guéries. Aussitôt, sa mère accourut à son chevet pour l’aider à se redresser, et Joakim ne put s’empêcher de lever les yeux au ciel. Combien de fois faudrait-il qu’il le dise ? Qu’il allait bien ?
« Maman, je n’ai pas besoin d’aide. Ce n’est pas ma jambe qui est blessée, que je sache. » Rosa Ingherneils eut les larmes aux yeux, mais recula tout de même pour laisser son fils se débrouiller. L’incident avec Jonas avait eu l’effet d’une bombe, dans la famille. Chaque membre avait eu peur pour sa vie, d’après ce qu’il avait entendu dire. Le sortilège qu’il avait lancé pour se défendre avait eu suffisamment d’effet pour ralentir les flammes ; ainsi, Joakim avait été seulement brûlé au bras où il avait tendu sa baguette, et légèrement à l’épaule. Son frère n’avait rien eu. Il s’en était sorti indemne.
On l’avait traité de héro. Mais n’avait-il simplement pas fait ce que tout le monde dans cette famille aurait été capable de faire pour lui s’il avait été dans cette situation ? Cela n’était pas du courage. Cela était un don de soi.
« Au fait, Joa… » Joakim tourna la tête vers son grand frère, venu simplement pour la journée. C’était le jour des visites, après tout.
« Je ne sais pas si on te l’a dit mais… Ta baguette a brûlé, elle aussi. » Joakim acquiesça simplement. Il l’avait deviné tout seul. Les adultes s’étaient appliqué à ne rien lui dire, mais il avait été suffisamment lucide pour se rendre compte que sa baguette était faite
en bois et que le bois
brûlait. Cependant, il eut tout de même un pincement au cœur. Et il se ressaisit.
« Vaut mieux ça qu’autre chose, je me trompe ? » Il adressa un immense sourire à son aîné, mais celui-ci ne fit que lui renvoyer un pâle reflet de son amusement. Ils avaient tous l’air si grave. Si touché par ce qu’il s’était passé. Ne se rendait-il pas compte qu’il était chanceux ? Que la vie continuait ? Il ne pouvait plus utiliser son bras droit, certes, mais était-ce une raison suffisante pour déclarer qu’il ne serait plus jamais indépendant ? Non. Bien sûr que non. Doucement, il s’avança vers Orion. Vers son oncle. Et il ouvrit la bouche.
« Au fait, je ne t’ai jamais remercié, mais je te dois une fière chandelle de m’avoir un jour dit que le sortilège bouclier pouvait neutraliser pendant quelques secondes les flammes d’un dragon… Un peu plus et j’y laissais plus que la peau douce de bébé qui recouvrait mon bras. » Il y eut un silence. Puis mon oncle sourit et hocha la tête.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]the songs of the dead are the lamentations of the living. ⊹
« Solveig ? » Joakim n’eut aucune réponse. Il poussa un petit soupir avant de doucement pousser la porte de la chambre de sa cousine et pénétrer à l’intérieur. Il était encore vêtu en noir.
L’enterrement venait d’avoir lieu. Il ne réussissait pas encore à s’y faire. Il ne réussissait pas encore à se dire que sa tante était partie. Qu’elle était partie. Qu’elle était morte. Qu’elle allait bientôt ne faire plus qu’un avec la terre. Il y avait d’abord eut l’accident d’Orion. Puis de Joakim. Puis celui de Veronika. Combien en faudrait-il encore pour que les dragons finissent par comprendre que les Ingherneils étaient de leur famille? Il déglutit difficilement, avant de s’asseoir à même le sol. Elle était allongée sur son lit. Il l’observa sans un mot, avant de finalement s’appuyer avec son bras gauche contre le rebord.
« Solveig ? » Elle daigna finalement à le regarder, et il lui adressa un petit sourire. Qu’était-il dans ces moments-là ? Le clown de service ? Il ne réussissait pas à être aussi triste que les autres. Bien entendu, cela le blessait de savoir qu’elle était partie. De savoir qu’elle ne reviendrait pas. Mais il ne réussissait pas à se dire qu’il fallait s’en faire pour les morts. Pour lui, ce qui était plus préoccupait était les vivants. Ils avaient besoin d’aide, après tout. Ils avaient besoin de lui.
« Si tu as besoin de quelqu’un pour parler, je suis là. » Il s’arrêta, avant de sourire.
« Tout comme si tu as besoin de quelqu’un pour ne pas parler, justement. Tu sais, j’ai lu quelque part qu’apparemment on avait simplement besoin d’une présence. Pour ne pas se sentir seul. » Il s’arrêta une nouvelle fois, caressant du bout des doigts le bras de sa cousine dans un geste réconfortant.
« Donc je vais rester là. Je vais lire tranquillement, et si jamais tu as besoin de quoi que ce soit, je serais sur ton tapis. » Joakim attrapa un livre de cours qui trainait, et se plongea à l’intérieur, même s’il avait plusieurs années de retard sur le programme qu’elle étudiait. Il poussa un profond soupir de bienêtre. Il avait redoublé. Même s’il avait certainement eu le niveau pour passer dans l’année supérieure, ses parents l’avaient convaincu qu’il valait mieux recommencer sa cinquième année, après son accident. Ses parents l’avaient convaincu de ne pas retourner à Poudlard lorsqu’il avait finalement réussi à sortir de Ste Mangouste. Il était resté chez lui. Il avait appris à vivre avec son handicap. Il s’était renseigné là-dessus, également – il avait fait plein de trouvailles. Il s’était contenté de relire une nouvelle fois la bibliothèque entière des Ingherneils. Et il s’était ennuyé, simplement parce qu’il n’était plus avec ses cousins. Simplement parce qu’il avait été coincé avec les adultes durant de longues semaines. Simplement parce qu’on l’avait surveillé du coin de l’œil, et faire ses expériences les plus délirantes s’était révélé être exclus. Les yeux de Joakim allèrent et vinrent sur les lignes du manuscrits qu’il dévorait, et doucement, une voix le sortit de sa lecture.
« Joakim ? » Il y eut un silence, et il redressa la tête vers Solveig, penchée dans sa direction.
« Oui ? » Nouveau silence.
« Merci. » Il lui adressa un sourire rayonnant. C’était tout ce qu’il demandait après tout.