[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]No mother is ever, completely, a child's idea of what a mother should be, and I suppose it works the other way around as well. Des cris retentirent à l’étage inférieur de la maison et Shiloh sursauta, laissant tomber au sol les voitures avec lesquelles elle était en train de jouer. Ses parents ne se disputaient jamais, à vrai dire, elle était beaucoup trop jeune pour savoir ce qu’une dispute signifiait vraiment, tout ce qu’elle savait c’était que la situation n’était pas habituelle, et que quelque chose n’allait pas. Shiloh put reconnaitre la voix de sa mère, elle était furieuse, pour une raison qui semblait échapper totalement à la petite fille qui glissa une de ses voitures dans la poche de sa salopette avant de se mettre à courir en direction de la chambre de son frère. Elle était effrayée, elle ne comprenait pas ce qui se passait et tout ce qu’elle désirait par-dessus tout c’était le calme, et que tout redevienne normal. Sa mère hurla le nom de son frère, puis le sien et, tremblotante, Shiloh s’agrippa à la main de Jared comme si soudainement l’idée de le lâcher était devenue la plus effrayante et inimaginable de toutes. Mrs Dawkins les appela à nouveau en hurlant, leur ordonnant de descendre le plus vite possible.
« Je … Je veux pas y aller, Red. » Elle tira son frère par la main pour l’empêcher de se diriger vers l’escalier, elle ne comprenait pas, elle était perdue, tout ce qu’elle voulait c’était retourner jouer avec ses petites voitures dans sa chambre. « J’ai peur Red, je veux pas y aller. »
Mais cette fois, ce fut son père qui les appela, avant d’entreprendre lui-même de monter à l’étage. Que se passait-il ? Qu’allait-il leur faire ? Avaient-ils fait une bêtise sans s’en rendre compte ? Instinctivement, elle se cacha derrière son grand frère – qui n’était pas bien plus grand qu’elle à l’époque – sa main toujours accrochée à la sienne. Le visage de son père apparut alors, et sans même qu’elle ne s’en rendît compte, il les attrapa tous les deux par un bras pour les tirer vers l’escalier. Ses gestes n’étaient pas violents, ni même brutaux, c’était la situation en soi qui avait réussi à effrayer Shiloh, bien plus que l’emprise de son père. Elle n’eut pas d’autres choix que de dévaler les escaliers à ses côtés, cherchant son frère du regard, et ce fut qu’une fois arrivée au rez-de-chaussée qu’elle se sentit traversée par un réel frisson de terreur. Elle parvint à se dégager de l’emprise de son père et ne perdit pas un instant pour courir jusqu’à sa mère, sans prêter attention à son père qui cria son prénom pour l’en empêcher.
« Maman… Pourquoi t’es triste ? » La petite fille tendit une main vers le visage de sa mère, elle pouvait voir qu’elle allait mal, elle ne comprenait juste pas pourquoi. Mais elle n’eut pas le temps d’atteindre la mèche de cheveux qu’elle souhaitait dégager des yeux de sa mère que cette dernière se mit à hurler, et au même instant, le père de Shiloh l’attrapa par la taille et la souleva du sol pour l’éloigner de sa mère. Monstres. Démons. Elle ne comprenait pas pourquoi sa mère hurlait ces mots, et elle se mit alors à pleurer. Pleurer de peur, pleurer de tristesse, la seule réponse qui lui paraissait être la plus naturelle à cet instant fut de pleurer. Comme si ses larmes suffiraient à changer quelque chose. Comme si la peine qui transperçait son âme suffirait à ce que sa mère cesse de hurler.
Mais ses pleurs n’avaient rien changé. Et ses pleurs ne changeraient jamais rien.

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]So I cried, and cried, and cried till I couldn’t anymore. The tears became absent but the pain was still there. Deux ans, sept mois et vingt-huit jours s’étaient écoulés depuis que Shiloh avait été arraché de sa mère, du moins, c’était de cette façon qu’elle interprétait les choses. Deux ans, sept mois et vingt-huit jours. Elle n’avait cessé de compter, et quelque part, elle ne cesserait jamais de compter. Elle refusait de croire que sa mère l’avait rejetée, de la même façon qu’elle refusait de se fier à ses souvenirs de cette journée. Elle préférait penser que sa mémoire avait tort. Qu’ils avaient déménagé. Que sa mère lui avait embrassé le front avant qu’ils ne la quittent, et que ce n’était qu’une question de temps avant qu’elle ne revienne. Elle en était certaine, c’était de cette façon que ça devait se passer. Pas autrement. Toute autre possibilité lui paraissait tout simplement inenvisageable. Sa mère allait revenir. Elle ne savait juste pas quand.
« Shae, le sel s’il te plait ? » Ses jambes, trop courtes pour toucher le sol du haut de la chaise sur laquelle elle était assise se balançaient dans le vide, et de temps en temps, elle filait en douce un peu du contenu de son assiette au chat qui lui tournait autour. Un sourire sur le visage, elle semblait savourer le repas sans prêter attention à son environnement. Elle percevait un bruit de fond, qui semblait provenir de la conversation qui avait lieu à table mais la petite fille semblait comme déconnectée. Elle ne parlait pas, ou parlait simplement pour dire des choses qui n’avaient aucun rapport avec ce qui se disait, et elle écoutait encore moins les paroles de son entourage. Elle planta une nouvelle fois sa fourchette dans son assiette, la faisant tourner pour attraper des spaghettis avant de la fourrer aussitôt dans sa bouche.
« Shae ? » Elle mâchait, c’était vraiment délicieux, les spaghettis étaient définitivement son plat préféré. Son prénom résonna pour la troisième fois, et ce ne fut qu’à ce moment là qu’elle leva enfin la tête vers son père qui semblait complètement dépassé par le comportement de sa petite fille. Mais ce n’était pas lui qui l’avait appelée, aussi, le regard de Shiloh balaya aussitôt la table pour aller se poser sur celui de cette femme. Elle ne comprenait pas qui c’était, ni même ce qu’elle faisait ici depuis aussi longtemps mais cela n’empêchait pas Shiloh de savoir se montrer polie. Elle est peut-être pauvre, pensa-t-elle. Elle n’a peut-être pas de toit et c’est pour cela que Papa l’a gentiment accueillie.
« Hm ? » Finit-elle enfin par répondre, avalant petit à petit le contenu de sa bouche alors qu’un silence avait pris place dans la pièce. Pourquoi tout le monde la regardait ? Qu’est-ce qu’elle avait fait ?
« Tu peux me passer le sel s’il te plait ? » Sa voix était douce et patiente, c’était peut-être pour cela que Shiloh ne s’était jamais réellement sentie méfiante vis-à-vis d’elle. Lentement, elle souleva son bras et referma sa main sur la salière qui se trouvait à côté d’elle, et d’un geste toujours aussi lent, elle la tendit vers la dame. Ils sont bizarres, pensa-t-elle. Pourquoi ils me regardent comme ça ? La dame attrapa la salière, puis la remercia gentiment. Le regard de Shiloh se posa ensuite sur son grand frère à qui elle fit une grimace, et sans que personne ne s’en rende compte, la petite fille prit la parole.
« Elle revient quand maman ? »
La dame laissa tomber sa fourchette, et son père prit son visage entre ses mains. Elle ne pouvait pas comprendre que c’était parce qu’il était désespéré, désespéré par une petite fille qui ne tournerait peut-être jamais la page. Il l’aimait, il l’aimait plus que tout, mais parfois, il aurait tout donné pour pouvoir lui jeter un oubliettes.
« Shae… » Jared prit la parole, mais Shiloh regardait toujours son père avec insistance. Elle ne le faisait pas exprès, elle ne savait pas que le simple fait d’évoquer sa mère constamment empêchait le seul parent qui lui restait d’espérer voir un jour ses blessures se refermer.
« Papa ? » Insista-t-elle. Mais il ne la regardait pas, il avait abandonné. Il avait abandonné depuis longtemps l’idée de lui faire comprendre la différence entre réalité et fantaisie.
« Shae, elle ne reviendra pas. » Reprit Jared. Sa voix était douce, pleine de compassion, mais même ça ne suffirait pas à aider Shiloh.
Un silence s’installa à nouveau, et le sourire de Shae disparut petit à petit. Ils ne comprenaient pas. Personne ne comprenait qu’elle avait raison. Que sa maman reviendrait, et qu’ils allaient devoir l’accueillir. Ils n’avaient jamais voulu la croire, et sans doute ne la croiraient-ils jamais. Elle poussa alors sa chaise pour l’éloigner de la table et sauter sur ses pieds, sentant un élan de colère la submerger. Ils mentaient, ils mentaient tous, et elle ne supportait plus l’idée de les voir vivre leur vie quand leur mère avait besoin d’eux.
« C’est pas vrai ! » S’écria-t-elle en tapant du pied sur le sol. Des larmes remplirent ses yeux emplis de tristesse et plusieurs sanglots éclatèrent l’un après l’autre avant qu’elle ne parte en courant s’enfermer dans sa chambre.
Deux ans, sept mois et vingt-huit jours. Et ses larmes ne changeaient toujours rien.

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]It just didn’t make any sense at all because the more I tried to forget you, the more everything reminds me of you. Elle courait, elle aurait été incapable de dire depuis combien de temps elle courait, tout ce qu’elle savait c’était que ses jambes n’avaient pas encore flanché, alors qu’elle avait l’impression d’avoir perdu le contrôle de ses actions depuis longtemps maintenant. Elle ne savait pas où elle était, elle ne reconnaissait pas cet endroit, et le noir de la nuit ne l’aidait pas à se repérer. Comment faisait-elle pour respirer encore ? Ses poumons auraient dû lui faire mal, elle aurait dû sentir cette douleur qui s’élève quand l’organisme demande plus d’oxygène qu’une personne peut en fournir, et pourtant, elle ne sentait rien. Elle courait, mais elle ne sentait ni ses muscles tirailler sous l’effort, ni sa respiration devenir haletante. Tout ce qu’elle sentait, c’était ce vide. Un vide qu’elle ne parvenait pas à combler, malgré tous les efforts qu’elle fournissait. Etait-elle en train de fuir ? Si oui, que fuyait-elle ? Elle ne se souvenait plus, elle ne parvenait plus à se souvenir. Pourquoi courait-elle ? Pourquoi ne sentait-elle rien du tout ? D’où provenait ce vide ?

Shae.

Une voix s’éleva, comme un écho qui lui transperça les tympans. Si fort, qu’elle dut s’arrêter. Elle n’était pas fatiguée, c’était comme si elle n’avait jamais couru. Ses yeux balayèrent l’endroit, cherchant du regard la personne qui avait prononcé son prénom. Mais il n’y avait personne, elle était seule. Elle était perdue. Mais elle était surtout seule.

Shae, cours.

Une nouvelle voix s’éleva, mais cette fois, elle était différente de la première. Maman. Elle ne réfléchit pas, et se remit à courir sans réfléchir, sans perdre une seule seconde. Où était-elle ? Avait-elle besoin de son aide ? Le vide qu’elle avait ressenti un peu plus tôt s’était transformé en panique, mais elle n’était toujours pas fatiguée, elle sentait seulement des gouttes de transpiration perler le long de son visage, et rien ne réussirait à arrêter sa course.

Shae.

C’était la première voix, celle qui lui avait transpercé les tympans quelques instants plus tôt. Non, pas elle. Elle allait la stopper, elle le savait, mais elle devait continuer sa course, elle ne pouvait pas s’arrêter, elle ne devait pas s’arrêter. La voix résonna à nouveau, et le sol se mit à trembler violemment. Un cri s’éleva, celui de Shae. C’était la fin, ça se finissait toujours comme ça. Elle cria une nouvelle fois, et l’instant d’après, ses yeux se rouvrirent enfin.

Elle était dans son dortoir à Poudlard et la lumière des quelques chandelles qui avaient été rallumées la força à cligner des yeux plusieurs fois. Elle était essoufflée, elle mourait de chaud, et des sanglots accompagnés de tremblements incontrôlables l’empêchaient de comprendre ce qui se passait réellement. Une crinière rousse passa dans son champ de vision et sa camarade de dortoirs la prit dans ses bras, comme pour tenter de la réconforter. Elle lui disait que tout allait bien se passer, qu’elle avait juste fait un cauchemar. Mais elle se trompait. Elle n’avait pas fait un cauchemar, elle avait perdu sa mère.

Et demain, elle la perdrait à nouveau.

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]And if you can't go back to your mother's womb, you'd better learn to be a good fighter. Cela faisait presque seiza ans que Shiloh avait perdu sa mère. Ou du moins, que sa mère l’avait rejetée. Elle avait eu le temps depuis, de se rendre à l’évidence et elle avait fini par admettre que non, sa mère ne reviendrait jamais. Avec le temps, elle avait fini par comprendre les réelles raisons de son absence, mais elle restait pourtant incapable de savoir ce qu’elle ressentait réellement par rapport à tout ça. De la peine ? Sans doute, qui n’aurait pas tout donné pour pouvoir grandir aux côtés d’une mère aimante ? Shiloh l’aurait fait, c’était certain. De l’incompréhension ? Aussi. A vrai dire, c’était surement le sentiment qui l’avait guidée depuis ce fameux jour, un sentiment d’incompréhension totale. Mais malgré tout, Shae parvenait toujours à sourire, et même l’absence de sa mère qu’elle ressentait toujours après toutes ces années ne suffisait pas à ce qu’elle se sente entièrement misérable. Elle aurait pu, elle aurait peut-être même dû, mais ça n’avait pas été le cas. La plupart du temps, elle faisait tout pour ne pas y penser, et ça marchait plutôt bien, mis à part quand ses vieux démons se décidaient à venir la hanter la nuit.
Elle posa une nouvelle carte sur la pile qui se trouvait déjà sur la table devant elle. Un sourire éclaira son visage, un sourire satisfait, et plutôt fier.
« J’ai gagné, encore. » Déclara-t-elle sans cacher sa joie, et sans chercher à ménager son adversaire. La paille plongée dans son verre de jus de citrouilles rejoignit ses lèvres et elle but une nouvelle gorgée, savourant pleinement sa boisson histoire de faire patienter un peu Jared. Elle reposa ensuite son verre et plaça sa main devant sa bouche afin de cacher le rot qu’elle s’apprêtait à laisser sortir, avant de finalement reporter son attention sur son grand frère.
« Tu vois la pouffy pouffy là bas ? » Elle montra du doigt une élève un peu plus jeune qu’elle qui était assise à une table à quelques mètres de la leur. « Je te parie que t’oseras pas aller plonger ton doigt dans son dessert. » Elle savait qu’il oserait le faire, Jared au fond était comme elle, il n’avait aucune limite. Et comme en écho à ses propres pensées, le gryffondor lui lança un clin d’œil avant de se lever et de se diriger vers la table en question sous le regard amusé de sa petite sœur.
C’était peut-être pour ça qu’elle avait fini par réussir à enfouir ce manque au plus profond de son être. Car même si sa mère n’était plus là, la seule personne qui comptait réellement à ses yeux était présente chaque jour pour elle.
Et au fond, c’était tout ce qui comptait.