« Bienvenue chez Barjow & Beurk ». Cette phrase, combien de fois l'a-t-il entendue, l'a-t-il prononcée ? Plus d'un siècle que les membres de la célèbre famille Beurk l'énonce à l'encontre des plus illustres sang-pur de la capitale, voir de l'Angleterre, pour lesquelles cette boutique spécialisée dans les artefacts magiques et les arts occultes fait office de référence. Une notoriété dont Hieronymus a à son tour fait sa fierté au même titre que la pureté de son sang, l'une ne saurait en effet exister sans l'autre dans un monde tel que le sien. Les démons qu'il côtoie dans le cadre de son travail ne sont que bien peu de chose comparés à ceux qui l'entourent lorsqu'il retrouve le silence de son appartement une fois sa journée terminée. Après tout, il lui avait toujours suffit d'un simple sourire et d'un bon mot quand à ces "misérables sang de bourbe" pour que les mangemorts qui forment l'essentiel de sa clientèle ne le considère comme l'un d'entre-eux ; les chimères qui peuplent son esprit ayant quand à elle le mérite de n'accepter aucune laisse, qu'elle vienne d'un simple vendeur de l'Allée des Embrumes comme d'un mage noir.

Longtemps Hironymus avait lutté, ne pouvant se résoudre à abandonner un jour l'idée de les terrasser, mais celles-ci étaient ainsi faites que leur présence n'avait jamais été sujette à une quelconque négociation, pour le plus grand désarroi de ses parents. Perdu dans un monde étrange que personne d'autre ne semblait voir du même œil que lui, Hieronymus avait appris à ne faire confiance à personne, lui compris. Si cette philosophie de vie s'était avérée payante dans une période aussi trouble que celle que traversait aujourd'hui le monde sorcier, son entourage s'était cependant clairsemé au fil des années, le laissant plus isolé et à l’affût que jamais.

Du temps, il lui en avait également fallu pour parvenir à convaincre de son utilité et de sa capacité à œuvrer à la boutique comme n'importe quel autre membre du clan ; mais cela non plus n'avait jamais été négociable aux yeux du sorcier. Cette boutique, où il avait fait ses premiers pas entre des ouvrages d'alchimie et des artefacts vieux de cent fois son âge, avait toujours été son ultime refuge et les odeurs d'encens et d'encaustique qui y étaient omniprésentes restaient pour lui synonyme de sûreté, ce qui valait pour lui plus que toute autre chose au monde.

Il avait donc rejoint les rangs des vendeurs de l'illustre boutique dès son premier cycle fini à Poudlard, n'ayant de toute façon jamais particulièrement apprécié les lieux. Si sa répartition à Serpentard avait à l'époque fait la fierté de ses parents, le château l'avait cependant toujours rendu nerveux, à commencer par la grande salle. Son flot continuel d'élèves allié aux nombre incalculable de bougies flottant au-dessus de leurs têtes lui avait toujours donné la nausée, son esprit luttant continuellement entre anxiété et vertige. De fait, ses crises de plus en plus violentes et fréquentes avaient achevé de mettre un terme aux espérances de ses parents quand à de possibles études longues, ne leur donnant d'autre choix que celui d'appuyer sa demande auprès du reste de la famille.

Depuis, le jeune homme semblait avoir enfin trouvé sa place, adoptant une attitude nettement plus chaleureuse et enjouée, faisant honneur à la boutique et la fierté de ses parents. Tout du moins en apparence. Si les hallucinations du sorcier et ses accès de colères semblaient avoir disparus de son quotidien, ceux-ci gagnaient en réalité petit à petit en intensité, Hieronymus devenant avec le temps de plus en plus instable. Celui multiplia de manière conséquente ses sorties nocturnes, accumulant les mauvaises fréquentations et autres alliances des plus douteuses. Quand aux remords qui venaient parfois lui rendre visite, en particulier lorsqu'il était confronté au regard inquiet de ses parents laissés démunis face à ses constantes absences, il devenait de plus en plus facile pour lui de simplement les ignorer. Hieronymus Boreas Beurk foulait désormais un chemin qu'il s'était choisi seul, et dont personne ne pourrait un jour le faire dévier. Nul besoin d'amis ou parents, s'était-il autrefois promis, son ombre le suivrait où qu'il aille et une part de ténèbres lui serait amplement suffisante jusqu'à sa dernière destination.