Quand vient le temps de parler de soi, je le fais toujours de la même façon. Décousue, du coq à l'âne, on essaye de suivre comme un peu. Une anecdote m'en rappelle une autre et ainsi de suite. J'ai toujours l'impression que de toute façon, le nom Shacklebolt semble en dire beaucoup sur mon histoire. Le remède contre la peste, tout le monde s'en souvient. Je m'en souviens aussi, mon oncle l'a découvert et popularisé. J'étais davantage occupé à m'inquiéter de la santé de Niëlle que de me réjouir du succès de ma famille. Je ne sais pas pourquoi, mais depuis l'hiver où elle est apparu je me suis senti tellement en sécurité. L'idée qu'elle puisse devenir infectée et souffrir me terrifiait. Heureusement, étrangement, peu de Patronus autour de moi ont été infesté. Chaque nouvel élève que je voyais filer vers l'infirmerie me crevait le cœur. Sous la pluie d'applaudissements de la renommée de mon oncle, moi j'étais encore ébranlé de tout ce que ce chaos avait causé. J'ai toujours adoré être un peu dans l'ombre du frère de ma mère, car je pouvais veiller à mes petites occupations tranquilles. Me voilà en offensive magique, sous la spécialité de l'offensive; métamorphose et legilimencie. Un peu hors des sentiers connus de ma lignée, médecine ici, justice magique par là, j'ai toujours adoré faire le contraire des autres. Avec la disparition d'un membre de ma famille, je ne me suis jamais vu aussi rassuré d'être dans ce domaine. Il n'y a personne qui pourra toucher à un cheveux de ma mère ou de ma petite sœur.

Par contre, qui dit Shackebolt, dit ambition et orgueil. Je ne déroge pas de ces traits de caractères familiaux, vous aurez certainement entendu que personne n'a réussi encore à me désarmer en duel. Je passe énormément à maîtriser mes sortilèges, ce qui m'a permis de devenir très doués en sortilèges informulés. J'hésite encore par contre entre un apogée de la paresse, de l'assiduité ou de talent. J'estime que ma baguette m'apporte un petit plus, plume de phénix et bois de vigne. Évidemment, ce n'est pas le genre de baguette que mes parents comptaient m'offrir pour envoyer un Shacklebolt à Poudlard, mais semblerait-il que l'explosion qui résonna dans Ollivander était un signe. Je ne savais même pas commenter déverrouiller une serrure que ma baguette ressentait déjà le besoin de m'enseigner comment pulvériser. Mon père s'est toujours demandé pourquoi une baguette si peu commune s’intéressait à notre famille, mais le marchand de baguette m'a glissé à l'oreille que cette baguette saurait me laisser écouter mon cœur et suivre mes ambitions hors de la famille.

On ne peut pas parler de moi, sans parler de l'histoire la plus saugrenue que je garde en secret.  Amortentia, ça te dit quelque chose? Ça me dit quelque chose aussi, mais les croyances disent qu'il faut être un peu stupide pour ne pas déceler cette potion. À un calibre avancé, elle est sournoise, mais je ne pouvais me douter qu'ajouter à ma naïveté ça devenait puissant. Il y a maintenant quelques semaines que je voyais un élève d'une autre Maison et je trouvais que ça fonctionnait assez bien. J'ai toujours détesté les relations amoureuses parce que la plupart du temps c'est pour s'associer à la notoriété de ma famille et se faire voir à des congrès du Ministère. Je n'ai pas l'habitude d'être passionnel, mais ça me venait de façon soudaine et instantanée. Je l'ai rencontré au salon de thé de Madame Piedoddu et il m'avait offert sa recette secrète qui me rappelait des effluves de roses, de vanille et semblait bouillonner de flammes. J'étais pris ici et là et j'ai passé quelques jours sans le revoir et lorsqu'il voulu me servir du thé un soir, Niëlle pris sa deuxième forme, ce qu'elle ne fait jamais. Alors qu'elle m’éblouit dans sa forme brumeuse de paon, autant qu'elle peut me rendre anxieux en colibri. J'en échappa ma tasse de thé et je reconnu enfin les vapeurs sous forme de spirales. Ces derniers jours ont été très délirants à savoir si je criais aux règlements violés ou si inconsciemment je le savais que j'étais sous une certaine emprise, mais que je l'appréciais quand même. Et je n'ai en aucun cas envie de me prendre la tête avec ma famille sur l'idiote potion que je me suis laissé passer sous le nez avec insouciance.

Ajouté à ça, avec les disparitions qui s'accumulent, je crains que ma famille soit la cible des Mangemorts. Si seulement j'étais plus performant dans le cours de divination, je pourrais peut-être voir un once de ce qui m'attend, mais c'est le néant total. C'est pire d'être torturé par la peur que de pouvoir se préparer au pire. J'essaye de me convaincre que même si ma mère et mon père ont contribué aux recherches, nous étions trop dans l'ombre pour s'attirer des ennuis. Je garde toujours un œil fouineur sur ma soeur avec Niëlle de mon côté, mais je m’interroge à savoir comment ça se passe pour mes parents au Ministère.

Pour les autres histoires pourries de quand j'avais 7 ans et que je me suis fait pipi dessus devant un hippogriffe, il faudrait avoir assez de cran pour aborder un Shacklebolt. Insérer ici une fausse attitude hautaine qui ne me colle pas à la peau.


Et mon petit bout de parchemin se transforma en petit dragon que je regarda s'envoler de ma fenêtre.