Mon premier souvenir remonte à ma plus tendre enfance. Quand exactement, je ne saurais le dire. Est-ce que cela s'est vraiment passé ? Je ne le saurais sans doute jamais non plus. A cet âge, les souvenirs se confondent volontiers avec les rêves et les fantasmes divers issus d'une imagination débordante. Toujours est-il que je me souviens d'une nuit avec ma sœur. Il était tard, je ne sais trop pourquoi nous étions encore debout à cette heure là, sans doute attendions-nous que notre mère rentre. Nous étions sur un fauteuil de la bibliothèque, moi sur ses genoux, elle tenant un livre pour me raconter l'histoire de l’Égypte. J'étais fascinée par ces mythes, par l'histoire de ces dieux régnant sur les hommes. Et pendant que ma sœur racontait, les flammes des bougies tout autours de nous se transformaient, mimant les faucons, les chats, et autres créatures divines. Dans le monde des moldus, on penserait que j'avais imaginé ce moment. Mais avec la magie, il n'était pas impossible que tout ce soit réellement passé. En tout cas, c'est de là que m'est venu mon attachement envers mes origines. Je n'ai jamais mis les pieds près du Nil, néanmoins. Mais pendant toute ma jeunesse, j'ai rêvé d'incarner un de ces pharaons perdu et de régner sans partage. Cette thèse était soutenue par mon entourage, qui ne portait pas les Moldus dans leur cœur. Ma famille n'est pas de celles qui inculquent des valeurs politiques à leur progéniture, mais ma famille n'a pas été très présente pour moi. Avec un père porté disparu, une mère absente et une sœur plus grande, j'ai passé la plus grande partie de mon temps chez d'autres personnes. C'est ainsi que j'ai atterri dans le Manoir des Aymslowe, des « amis de ma mère ». Ces amis sont devenus comme une seconde famille. Oh, une famille bien plus exigeante que ne l'était la mienne. L'éducation y était sévère, et les coutumes de ces sorciers m'ont imprégnée, que je l'ai voulu ou non. Mais je ne peux m'empêcher de me rappeler de ces moments passés avec une certaine espièglerie. J'avais des enfants de mon âge, là-bas. Des amis, et un frère. C'est en effet là que j'ai rencontré Kilian, mon compagnon de jeu. Vingt ans plus tard, il est toujours là, fidèle au poste. Les jeux ont changé, et nous aussi, mais notre amitié est restée aussi étincelante qu'elle ne l'était alors que nous n'étions que des enfants. Sans doute sommes-nous encore un peu des enfants, au fond. Les années ont passé, j'ai développé mes pouvoirs en essayant de grimper à un arbre plus haut que ne l'avait fait ma sœur. J'ai fini par tomber, mais à sept ans, mon esprit de compétition avait déjà germé. Arrivée à Poudlard, je me suis mise à côtoyer de plus en plus de monde. Des plus petits, des plus grands, des sang-mêlés, des nés-moldus. Au final, je n'avais pas connu tant de personnes que cela durant mon enfance. Et être tout d'un coup mesurée à des centaines d'autres élèves me faisait tourner la tête. Être meilleure que Kilian, c'était une chose. Être meilleure que tout Poudlard, c'était un défi autrement plus complexe. Mais je me suis appliquée à relever ce défi, année après année. Depuis quelques temps, les choses commencent à s'assombrir. Les patronus sont apparu pour nous « aider » à combattre le Seigneur des Ténèbres. On a été envoyé dans un camp, où nous nous sommes fait attaquer par des mangemorts. Ceux-ci ont frappé peu de temps après, au sein même du château cette fois-ci. Est ensuite survenu l'accident du train. Une scène d'apocalypse, des blessés et du sang partout. Je ne peux pas me vanter d'avoir été très utile ce jour là. Puis la Peste a frappé, et je me suis trouvée immunisée, encore. Et pendant ce temps, des disparitions et des meurtres, un peu partout. N'est ce pas une preuve de ma supériorité que d'être sortie totalement indemne de toutes ces épreuves ? Je ne sais pas trop ce qu'il se passe, mais je sais qu'il se passe des choses dehors. Nous sommes désormais tous marqués, et je peux vous assurer que je n'ai jamais été aussi heureuse que mon sang soit complètement pur.