« Bon anniversaire p’tit gars ! » Le fantôme au couvre-chef élégant fini alors sa course à travers l’épais mur de pierres froides. Einrí fête alors ses dix ans, dans l’immense château en ruine de ses parents. Son frère, en vacances chez sa tante n’était pas là pour l’enquiquiner ou prendre la vedette, tout devait se passer à merveille. Il courut à travers les couloirs de sa demeure pour rejoindre ses parents, saluant au passage les quelques revenants habitant avec eux. « Te voilà mon grand ! Alors ? Ca fait quoi d’avoir onze ans ? Prêt à rejoindre les rangs de Poudlard ? » Timidement, le garçonnet acquiesce d’un signe de tête. Il a peur, mais son petit cœur bat la chamade rien qu’à l’idée de partir étudier la magie en Angleterre. Il se rend alors compte d’une présence inconnue dans la pièce. Un magnifique hibou grand duc l’observe de ses yeux jaunes. Doucement, la main se tend, se rapproche et la tête plumée vient se poser dans le creux de la paume. « Voilà Geal, il te plait ? »

La tension est trop forte, la tête lui tourne, il ne peut s’empêcher de tenir sa tête à deux mains. « Bah alors O’Farrel, on tient pas le coup ? Ils vont te faire la peau les détraqueurs si t’es pas fichu de faire un patronus ! » Un souvenir heureux, il fallait qu’il pense à un truc vraiment bien,  un truc qui lui permettrait de garder ce fichu loup argenté avec lui sans sentir ses jambes s’affaisser sous lui. Penser à son frère ne servait à rien, il n’avait aucun souvenir heureux avec lui? qui n’avait jamais cessé de lui voler la vedette. Ils n'avaient jamais cessé de se disputer et il se demandait même s'ils se réconcilieraient un jour. Dans tous les cas, penser à l’Irlande n’était pas assez fort et il en était de même pour ses parents. Pourtant il était persuadé que ses moments passés en leur compagnie, dans leur château, sur les genoux de son père, sang-mêlé tout comme sa mère qui lui passait tendrement la main dans les cheveux, étaient les plus heureux qu’il avait en mémoire, mais peut-être avait-il tort… Il devait chercher ailleurs. Plus récemment il y avait Poudlard et ses années passées dans la maison des rouge et or.

« Heu… Je viendrais te voir à ton match demain, promis ! » Un baiser délicat se pose sur la joue cramoisie du garçon. Il n’a pas rêvé, la plus jolie fille de Gryffondor – à ses yeux – vient de lui promettre de venir le voir jouer. Il allait devoir défendre les buts comme jamais. En tant que batteur, il savait que le jeu de ses camarades dépendait de comment il empêcherai l’équipe adverse de jouer. Ils allaient gagner ce match et cette victoire lui permettrait de passer pro, il en était certain !

Mais une fois de plus, pas même le sourire radieux de la jolie fille ni leur victoire ne permit à Einrí de rester concentrer assez longtemps. Il avait été heureux, mais pas assez, pas assez pour soutenir la puissance de ce sortilège. Il allait devenir auror bon sang ! Il allait bien devoir réussir ce sort à un moment ou un autre ! Mais il ne s’attendait pas à ce que ce soit cela qui lui permette de voir s’avancer son loup blanc devant lui.

« Courageux, tête brulée et rebelle ? Aucun doute là-dessus : Gryffondor ! » La slave d’applaudissement et les cris appréciateurs de ses nouveaux comparses lui donnèrent des ailes, il avait une nouvelle famille, qui ne l’évincerait pas au profit d’un autre, tous étaient égaux ici. Voilà ce qui le rendait heureux, Poudlard, ses camarades, leur salle commune, leurs escapades nocturnes, leurs heures de colle même. Il n’avait jamais été aussi heureux qu’au moment de sa répartition. Et la nappe brumeuse qui s’avançait devant lui, jaillissant de sa baguette n’aurait pas dit le contraire.

« Bah voilà, tu vois quand tu veux ! » Suite à la maîtrise de son patronus, Einrí poursuivit sa formation d’auror et fini par rentrer dans les rangs du ministère de la magie. Il adorait ce mode de vie, sans réelle attache et sans certitude pour les jours à venir. Sa mère déplorait le fait qu’il ne lui ferait jamais de petits enfants, mais il y avait bien heureusement son frère aîné pour l’aider à surmonter cette lourde épreuve. Toujours là quand on avait besoin de lui ce cher Aghaistin ! Einrí sourit en coin, avachi dans le canapé d’une auberge qui avait bien voulu lui offrir protection pour la nuit. La chasse aux mangemorts n’était pas de tout repos. Puis il ne tarda pas à recevoir une lettre, du directeur de Poudlard lui-même. Ce dernier désirait le voir. L’entretien d’embauche fut bref. Il avait été conseillé à l’école britannique par son supérieur et il avait été embauché pour assurer la sécurité des élèves. Le monde magique rentrait en guerre, cela était indéniable et il était de son devoir de les protéger. Revenir dans son école, celle où il avait passé une bonne partie de sa vie, après cinq ans ne pouvait que lui faire du bien, raison pour laquelle il accepta. Mais les choses avaient changé et lui aussi. Il était plus mature, moins plaisantin et l’heure plus grave. Pourtant il est toujours là et cherche à rassurer les élèves qui, il le sent bien vivent mal les événements passés. Sa condition d’auror lui laisse beaucoup de temps libre, qu’il utilise à flâner dans le château pour écouter les bruits de couloir. Mais n’allez pas croire, il est devenu Auror et son sérieux le rattrape assez souvent désormais.