L'histoire d'Alois, mon frère d'âme ? Une bien triste histoire, vous pouvez le croire...Pourquoi n'est-il pas là pour la raconter ? Il...Il n'aime pas beaucoup parler de lui...Alors, moi, Aoi, je me dévoue afin de vous livrer ce qui fut son existence. Avant que je n'arrive, Alois était seul. Très seul. Né dans une riche famille sorcière, d'un père britannique de Sang-Pur et d'une mère japonaise de Sang-Mêlé, dont la lignée s'était implantée en Grande-Bretagne voilà des années, on ne peut pas vraiment dire qu'il ait grandi dans l'amour. Le luxe, oui, à profusion. S'il désirait quelque chose, on lui donnait...Tant que cela demeurait dans les convenances. Mais Alois ne parvenait jamais à obtenir ce qu'il voulait vraiment : des câlins, des petites attentions, des moments agréables à passer avec ses géniteurs...Ces derniers pensaient que leur fiston risquait de s'affaiblir s'ils se permettaient de lui offrir un tel traitement, ce pourquoi ils l'endurcirent afin que celui-ci puisse fièrement porter le nom des Mayers. Du moins, ils essayèrent...
Alois n'a jamais été un garçon comme les autres et cela s'est vu dès sa petite enfance. Tout petit, il préférait lire de la poésie ou s'étendre sous les arbres plutôt que de jouer au Quidditch ou de s'amuser avec les garçons de son âge. Il aimait aussi lorsque les filles de son entourage prenaient soin de lui, le pouponnaient, disaient à quel point il était mignon...Tout ce que ses parents ne lui offraient jamais. Avec eux, il se contentait de travailler, d'apprendre à vivre convenablement dans la haute-société, à être "digne". C'était ennuyeux, de toujours devoir être digne...Il n'avait pas le droit de jouer dans la boue et de se salir, pas le droit de s'habiller comme il en avait envie...S'il le faisait...Oh là, s'il le faisait...Le pauvre Alois subissait ce que lui-même appelait le "supplice de la cage". Il pouvait passer des jours enfermés dans une petite cage dorée, placée dans le grenier du manoir. C'était sa mère qui avait eu cette idée, constatant que l'enfant ne semblait pas apprécier les espaces clos et étouffants. Mrs Mayers...Rien que de penser à elle, j'en ai des frissons...
Autant Mr Mayers est sévère, mais capable de récompenser, à sa manière, son fils lorsqu'il fait des efforts, autant cette femme est...abominable. Son plaisir semble être d'en faire baver au pauvre garçon, qui a fait et continue à tout faire pour obtenir son amour. Je n'ai jamais su ce qui la poussait à agir ainsi, mais...c'est une vraie diablesse. Par ailleurs, c'est elle qui a crevé l'oeil droit de son fils. C'était arrivé durant la douzième année du petit garçon, alors que celui-ci avait ramené un camarade à la maison, brillant élève, issu lui aussi d'une riche famille. Tous les deux étaient de très bons amis et même plus. Malgré les règles qu'on lui imposait, Alois n'avait jamais voulu s'interdire quoi que ce soit, quelque expérience que cela puisse être. Et...il avait eu très envie de donner un baiser à son camarade...Un baiser chaste, digne d'un enfant qui se découvre, sans sérieux aucun...Mais sa mère l'avait surprise et là...
Il n'eut aucun soutien de la part de son camarade, dégoûté par cette initiative ô combien réprouvée à notre triste époque, et dut subir la colère effroyable de la matriarche, ses coups, ses sorts...Jusqu'à en perdre brutalement son oeil, dans une souffrance incommensurable...
Les géniteurs d'Alois prétendirent que ce dernier s'était blessé lui-même, lors d'un de ses jeux. Personne ne chercha à les contredire, l'argent faisant foi. Quels abrutis de service...Malgré quelques problèmes de coordination de mouvements et de précision, se retrouvant souvent à placer sa main à quelques centimètres de l'objet qu'il tente d'attraper, Alois s'est accommodé de cette blessure, comme s'il l'avait mérité, comme si c'était la chose la plus naturelle du monde...Je me demande ce qu'il serait devenu si je n'étais pas apparu à ses côtés, ce soir de Noël. Depuis, je l'ai toujours soutenu comme je le pouvais, encourageant son amour de la musique, loisir "toléré" par ses parents en raison de la noblesse de l'instrument qu'Alois avait choisi, le violon, dans ses études, puisqu'il était brillant mais distrait, ayant tendance à répondre à côté de la plaque, et dans la vie de tous les jours...Il a bien besoin de moi, le pauvre...A part moi, qui a-t-il donc pour le soutenir, l'écouter, l'épauler ? Personne...