J’ai toujours été considérée comme une fille étrange. Pas méchante, mais un peu bizarre. Le genre de personne que l’on évite de fréquenter de peur que ça n’entache une popularité naissante ou simplement par intérêt. Une fille un peu en marge de la société, de par ma naissance et de ma façon d’être. Je suis née dans une petite ville du centre de l’Angleterre, dans une famille moldue plutôt aisée. J’ai toujours su que j’étais quelqu’un de spécial, mais jusqu’à mes onze ans je pensais que c’était une mauvaise chose. Mes parents m’ont toujours surprotégée. En raison d’une constitution fragile, je tombais facilement malade et je risquais plus de me blesser à cause de ma maladresse. Je ne pouvais pas donc aller jouer le soir avec les enfants de mon quartier, car ils craignaient qu’il ne m’arrive quelque chose. Il faut dire que mes parents ont essayé pendant plus de dix ans d’avoir un enfant et ils avaient déjà la trentaine largement passée quand j’ai enfin daigné pointer le bout de mon nez. Il est alors aisé d’imaginer les raisons qui les ont poussés à suivre mes moindres faits et gestes pendant des années. Malgré leur compte en banque bien fourni, mes parents sont des gens simples et m’ont élevé dans cette même optique. J’ai grandi dans une petite maison, où je préférais jouer des heures dans le grenier à fouiller dans les vieux jouets de ma mère plutôt que de jouer avec la dernière poupée dont raffolaient toutes les filles de mon âge. Elle avait un ours en peluche tout rapiécé, souvenir d’une époque plus douloureuse, dont je ne me séparais jamais. Aujourd’hui, il a sa place réservée à côté de mon lit à Poudlard.

Très jeune, j’ai commencé à faire des rêves un peu étranges. La nuit, je me réveillais en sueur avec des bribes de rêve. Des endroits inconnus. Des gens inconnus. Des voix inconnues. Toutes ces choses que je ne connaissais pas et que je retrouvais dans ma vraie vie quelques jours plus tard. Peu à peu, mes parents s’en aperçurent et ce fut une nouvelle raison de me garder un maximum auprès d’eux. Je ne pouvais sortir que pour aller à l’école ou à mes cours de chant, que j’avais maintes fois demandé avant qu’ils cèdent finalement. Je n’avais que peu d’amis. Un jour, j’ai fait un rêve un peu plus concret sur quelqu'un de ma classe. Une fille se cassait le doigt après qu’on lui ait fermé la porte dessus. Alors, pensant bien faire, je l’ai prévenue. Elle m’a regardé comme si je venais d’un autre monde et a continué son chemin. Moins de deux heures plus tard, une porte se refermait sur sa main et trois doigts furent cassés dans le choc. Après ça, mis au courant de ma tentative de prévention, les élèves de ma classe, puis progressivement toute l’école se mit à chuchoter sur mon passage et à m’éviter. J’étais déjà considérée comme « bizarre » et on avait déjà tendance à m’isoler à cause de mes vêtements, de mon caractère doux et influençable et de mes bonnes notes. Cet événement porta un coup fatal à ma vie scolaire. Mes parents décidèrent de me donner l’école à la maison. J’avais huit ans. Cet événement m’atteint très fortement au début, mais aujourd’hui je me rends compte que ce n’était pas grand-chose. Il me permet de renforcer mes opinons. Je suis qui je suis et qui j’ai envie d’être. Je me fiche de ce que les autres peuvent bien penser de moi. Si j’ai l’air d’une hippie ou d’une intello, ça ne regarde que moi. Les années qui suivirent furent rudes, c’est vrai, surtout pour une petite fille. Mais elles ont fait de moi la Calypso que je suis aujourd’hui.

Un jour, à onze ans, un homme se présenta à la porte avec une lettre d’une étrange provenance : Poudlard. Une école de magie, ici, en Angleterre. Au début, mes parents crurent à une mauvaise blague, comme j’en avais subies plusieurs depuis des années. Mais les minutes passant, avec les explications de cet homme, ils finirent par admettre que la lettre était réelle et véridique : j’étais une sorcière. Cela expliquait bien des choses. D'abord ces rêves prémonitoires, mais aussi des événements plus isolés. Une fenêtre qui éclate après un accès de colère. Une spatule qui s’envole toute seule l’espace d’une demi-seconde. J’ai appris à ce moment-là que mon arrière-grand-mère maternelle était une sorcière voyante qui avait décidé de quitter le monde magique en épousant mon grand-père moldu. J’avais donc hérité d’elle ce don de voyance et c’était en partie à cause de lui que j’étais de fragile constitution.

A onze ans, j’entrais donc à Poudlard, pleine d’attentes et de joie. J’avais passé mon été à lire tous les livres que j’avais pu trouver sur la magie. Je savais que je serais forcément en arrière par rapport à tous ces enfants qui avaient grandi entourés de cette aura magique, mais je voulais leur montrer que j’étais motivée à devenir leur semblable. Je me suis fait quelques amis, heureuse de ne pas être isolée systématiquement. Pourtant, après ça, les choses ont changé. Je n’avais pas totalement appris de mes erreurs passées. Voulant être honnête et franche, j’ai parfois prévenu les gens après mes rêves prémonitoires, pour essayer d’éviter le pire. Mais alors que je pensais que ma différence serait acceptée dans ce monde-ci, je me suis de nouveau heurtée à un mur. Moins haut, moins solide que le précédent, mais un mur quand même. Agir de cette manière m’avait fait paraître comme quelqu'un de sans-gêne, d’intrusif, alors que c’était loin d’être mon intention. Certains m’ont acceptée malgré tout pour celle que je suis.

Mes premières années à Poudlard furent donc tout sauf faciles. J’avais beau avoir tenté d’anticiper les cours en me documentant sur le monde magique dès que j’appris son existence, ce fut en très grande partie inutile. J’eus beaucoup de peine à suivre le rythme des classes, n’étant plus habituée à suivre des cours. Je ne comprenais pas la plupart du temps le sujet de la leçon. Pourtant, je ne me décourageais pas et je redoublais d’effort, demandant de l’aide dès que je le pouvais. Je voulais montrer que je faisais déjà partie des leurs, que je l’avais toujours été. Le temps passa et mes efforts furent peu à peu récompensés. Mes résultats étaient au tout début du premier dans les moins bons de ma volée, mais en dernière année, j’avais largement rattrapé tout le monde grâce à mon assiduité et je faisais même partie des meilleurs. J’ai pu alors choisir aisément dans quelle filière je souhaitais continuer mes études. Mon intérêt pour l’esprit sorcier eut raison de moi et je décidais alors d’entamer des études en médecine magique, en option psychomagie.

Aujourd’hui, je suis en huitième année et ma vie ne pourrait être meilleure. Avec mon patronus Morphée à mes côtés, des amis en or et des études qui me passionnent, je ne pourrais souhaiter mieux. Enfin, je crois.