Il pleuvait le jour de ta naissance. Etonnant pour un mois de juillet, normal pour toutes personnes d’Angleterre. Ton père avait été très inquiet ce jour là, ta mère approchait de la quarantaine et le travail avait été long et éprouvant. Mais lorsque le médicomage était sorti de la salle en annonçant la nouvelle, en annonçant à ton père qu’un nouveau garçon était admis dans la famille il avait failli embrasser l’homme à pleine bouche tellement sa joie avait été grande. Il avait couru dans la chambre pour rejoindre ta mère et lorsqu’il t’avait vu dans ses bras il avait eu des larmes sur ses joues. Ce n’était pas anormal, tu n’étais pas une exception à la règle. Ton père était juste quelqu’un de très émotif et à chacune des naissances dans la famille il avait agit de la même façon. Pour ta sœur Colleen, il avait failli sortir dans la rue pour dire à tous les passants qu’il était père. Quatre ans plus tard pour la naissance de Roméo il avait voulu lancer des feux d’artifices dans le ciel. Mais il ne le faisait pas car alors ta mère le retenait calmement. Etrangement, ce calme et cette sérénité qui habitait Mme Potter n’avait pas beaucoup déteint sur vous autres, enfants. Au contraire, c’était la bonne humeur de monsieur qui avait conquis chacun d’entre vous mais ce n’était pas un problème.

Et on avait autorisé ta mère à rentrer chez elle en ta compagnie. Aussitôt tu avais passé le pas de la porte que ton frère et ta sœur avaient accouru pour découvrir ce nouvel être vivant qui allait entrer dans leurs vies. Colleen, la plus âgée n’avait pas bronché en te voyant, elle était déjà habituée à Roméo et du haut de ses huit années elle savait que tu deviendrais quelqu’un de bien. Roméo, quant a lui, alors qu’il n’avait que quatre ans et avait été le dernier de la famille pendant tout ce temps, il avait éprouvé une certaine jalousie à ta venue. Il avait peur que tu prennes sa place dans le cœur de tes parents et qu’ils ne s’occupent plus de lui comme avant. Mais ton père l’avait rassuré en lui déclarant qu’il n’avait pas à s’inquiéter, qu’il serait toujours, je cite, « mon petit phénix préféré » Car c’était ainsi qu’on avait appelé Roméo dans la famille. Roméo Phénix Potter. Ton père, lorsqu’il était enfant, avait adoré lire toutes ces légendes sur ces oiseaux dont la renaissance était assurée. Lorsque Roméo était né, il avait vu en lui cette créature, ce beau phénix qui n’allait jamais mourir. Mais ta mère avait préféré le nommer Roméo principalement afin qu’il n’ait pas de problème dans la société plus tard et il l’avait accepté.

Les années avaient passé et tu avais appris à marcher. Mais sans cesse Roméo te faisait tomber, il te mettait des bâtons dans les roues et ne faisait que de t’embêter. Tu laissais couler. Ton jeune cerveau de bébé ne comprenait pas ces méchancetés qu’il te faisait si bien que tu revenais toujours vers lui. Je ne sais pas pourquoi tu as toujours apprécié venir vers lui même lorsqu’il ne le voulait pas. Tu aurais pu aller vers Colleen et son charmant sourire, vers tes parents mais non, tu ne voulais t’approcher que de Roméo. Au final, lorsque vous grandissiez tous les deux, ses mesquineries étaient devenues des chamailleries. Vous jouiez à des jeux parfois dangereux tous les deux mais ça ne vous dérangiez pas. Tu étais âgé de sept ans lorsque Roméo reçu sa lettre d’admission à Poudlard. Vous aviez fêté ça et étiez parti au Chemin de Traverse afin d’acheter tous les équipements nécessaires pour l’année scolaire mais ton frère était bien plus attiré par tous ces magasins de farces et attrapes. A peine entrait-il à l’école qu’il désirait y mettre le souque. Le jour de son départ tu avais été un peu triste de te dire que tu n’allais pas le voir jusqu’à Noël mais il t’avait promis de revenir et t’avait assuré qu’il t’enverrait des hiboux chaque jour. Et il l’avait fait. Chaque jour tu recevais un hibou et chaque jour tu lui en renvoyais un. Tu lisais ses mésaventures et ses pitreries dans ses lettres et tout cela te remplissait de joie.

Quatre nouvelles années étaient passées et c’était à toi de rentrer à l’école Poudlard. Ton frère, qui était déjà en cinquième année, t’avait kidnappé sur le Chemin de Traverse afin de te conduire directement au magasin de farces et attrapes. Avez le peu d’argent que vous aviez économisé, vous aviez acheté tout ce qui pourrait rendre la vie à l’école un peu plus mouvementée. Mais vos parents vous avaient retrouvés et n’avaient pas beaucoup apprécié cette idée. Ton frère avait pensé que vous étiez repartis les mains vides mais ça ne l’était pas. Dans tes poches tu avais gardé des tas d’objets petits mais efficaces que tu avais acheté dans le dos des parents au marchand. Roméo t’avait félicité et dès la rentrée, la folie des Potter avait conquis Poudlard. C’est amusant de constater à quel point tu étais proche de Roméo. Colleen était parfois complice de vos petites manigances tout comme votre cousin Galahad, mais vous deux étiez vraiment inséparables.

Roméo, Colleen, Galahad et toi. C’était une équipe que vous formiez depuis votre plus jeune âge. Vous étiez les quatre mousquetaires. Chaque fois que vous vous voyiez, il se passait quelque chose. De grave ou non, tel n’était pas la question tant que ça vous amusait. Tu avais été heureux avec eux et tu aurais voulu que cette équipe, cette famille qui était la tienne ne se détruise jamais et pourtant…



Il y a toujours un événement, quelque chose qui se déroule dans une vie et qui la marque au fer rouge pour toujours. C’est malheureux à dire mais la tienne ne fait pas exception, loin de là. Même si ta vie avait été une parfaite suite de moments joyeux et agréables elle allait bientôt s’assombrir d’un voile de deuil noir.

Nous étions en dix neuf cent soixante dix huit. Tu avais passé tes BUSES et ASPICS avec justesse et étais entré en cycle secondaire, te spécialisant dans l’offensive magique car c’était bien la seule catégorie qui regroupait le plus de matière dans lesquelles tu excellais ! Roméo quant à lui, il ne les avait pas eu du premier coup mais après une deuxième chance. Il avait fini les cours il y avait déjà un an mais revenait souvent afin de te voir ou de faire une petite nouvelle farce à Rusard. Pourtant, ce jour là, ce trois novembre, Roméo n’était pas venu spécialement pour s’amuser. Il était venu tout d’abord pour t’annoncer quelque chose qui t’avait ravis au début puis déçu. « Barth, faut que tu saches, j’ai rencontré quelqu’un. (tu l’avais taquiné sur cet amour qui venait de t’annoncer mais tu avais tout de suite arrêté lorsque tu avais vu l’expression sur son visage) Mais le problème c’est qu’elle ne vit pas en Angleterre. Elle est française et toute sa vie est là bas. » Il t’avait expliqué comment ils s’étaient rencontrés, qu’elle n’était pas ici pour longtemps et qu’elle avait toute sa famille là-bas et qu’elle ne pouvait pas les abandonner. Il t’avait rassuré en disant qu’il reviendrait pour les fêtes à chaque année et qu’il t’écrirait des hiboux tous les jours. Tu l’avais alors rassuré en lui expliquant tu étais heureux pour lui. Et c’était vrai. Tu voyais la joie qu’il éprouvait en parlant de cette fille et tu te sentais bien de le savoir aussi épanoui. « Mais je ne compte pas partir sans que Poudlard se souvienne de moi ! » Tu n’avais pas compris mais il t’avait commandé de le suivre. Tu l’avais fait. Vous étiez montés en haut de la tour d’astronomie et Roméo avait grimpé sur son balai pour se diriger vers le toit.  Tu lui avais demandé de descendre car le ciel n’avait pas une allure des plus clémente aujourd’hui. Il ne t’avait pas écouté et t’avait juste répondu qu’il n’allait pas rester longtemps. Il s’était mis debout sur le bout de bois, en équilibre et sans peur comme à son habitude et avait commencé à graver le nom de « Potter » sur les tuiles de l’école. Tu aurais du le rappeler, lui demander de rentrer mais tu ne l’as pas fait. Le temps avait commencé à devenir de plus en plus noir jusqu’à ce que la pluie tombe. Mais Roméo ne bougeait pas. Il voulait terminer ce qu’il avait commencé. Et alors qu’il avait terminé son dernier chef-d’œuvre, une bourrasque l’avait percuté. Tu avais crié son nom et il était réapparu sur son balai. Mais ce n’était pas fini. Le temps devenait de moins en moins calme. Le vent s’agitait de toutes part. Le balai n’obéissait plus à son maître. Le sorcier lâcha prise et tomba dans le vide. Roméo Phénix Potter était mort.



Ton sourire, ta joie, ton bonheur avait été enlevé ce jour-là. Cette mort que tu avais à déplorer, cette perte que tu n’arrivais pas à accepter, tout cela t’avait détruit. Il n’était plus le garçon joyeux et plein de vie que tout le monde connaissait. Il ne parlait plus, mangeait à peine, criait tout le temps, pleurait et ne sortait plus vraiment non plus. Chaque jour il revoyait le corps de son frère allongé sur les pavés, une marre rouge entourait sa tête et salissait le sol de l’école. Une foule d’élèves avait commençait à l’entourer presque aussitôt, tous affolés par l’événement. Toi, tu avais mis plus de temps à arriver. Tu avais eu beau courir dans les escaliers et manqué de te casser la figure à plusieurs reprises mais tu t’en moquais. Tu espérais, tu priais, tu souhaitais, tu voulais que Roméo ait trouvé une issue à cette chute, qu’il ne soit pas mort. Tu ne pouvais pas le concevoir. Mais lorsque tu étais arrivé en bas, que tu avais vu la masse de monde dans la cour, tu avais crié son nom et tout le monde s’était retourné. Tu avais découvert les visages tristes des gens, les larmes qui coulaient sur leurs joues que tu avais décidé de prendre pour des gouttes de pluies. On t’avait arrêté juste avant que tu ne t’avances, on t’avait demandé de ne pas rester là et d’aller autre part mais tu te débattais, tu criais et tu n’acceptais pas qu’on te mette ainsi à l’écart. Et  tu avais croisé le regard de ta sœur. Colleen venait d’arriver, alertée par le brouhaha. Elle avait jeté un coup d’œil vers Roméo et presque aussitôt ses larmes avaient coulé. Tu avais cessé tes gestes en l’observant, cherchant dans son expression un sourire, un signe pour te promettre que tout ceci n’était qu’une affreuse blague, un cauchemar mais lorsque tu avais vu la tristesse s’emparer de son visage, tu avais perdu toute force, toute envie de te battre. Tes jambes étaient faibles, si faibles que tu étais tombé sur le sol. On avait voulu t’aider à te relever mais tu leur avais crié de partir, de te laisser, de ne pas s’approcher de toi. Tu n’avais accepté que la seule présence de ta sœur qui t’avait alors prise dans ses bras.

Chaque fois que tu repensais à ce passage de ton histoire, tu te trouvais stupide. C’était à toi de protéger Colleen et de la consoler du mieux que tu l’aurais pu. Elle avait beau être ton aînée, elle restait ta sœur. Mais ce qui avait été fait était fait. Les jours qui avaient suivi, un enterrement avait été organisé. Il y avait eu du monde, la jeune fille avec laquelle Roméo avait voulu s’enfuir mais tu n’avais pas prêté attention à la moindre personne. Dans ta tête, c’était le vide. On essayait de te demander comment tu allais, ce que tu éprouvais et si tu voulais en parler mais tu ne répondais jamais. Tu étais devenu froid et tu avais fermé toutes les portes d’accès vers toi. Même à Colleen et Galahad qui avaient été tes meilleurs amis pendant toute ta vie, tu ne voulais plus les voir. Tu ne restais que dans la solitude de ta chambre obscure et froide. Tu partais en cours et ne mangeais que lorsque tu te sentais trop affamé. On te saluait et on essayait de te réconfortait mais chaque fois que le prénom de Roméo avait été prononcé tu avais piqué une crise. Tu avais même été une fois jusqu’à lancer un sort à un élève de la maison Serpentard qui avait eu le culot de dire que les Potter étaient des gens dénués de toute intelligence et qu’il était évident qu’un accident comme celui-ci allait se produire un jour.

Pendant tout le mois de novembre et de décembre, tu avais été un fantôme pour tout le monde. Et le jour de Noël, tu avais fermé ta porte. Tu l’avais celée à la manière des moldus c’est à dire avec un bureau bloquant l’ouverture. Tu savais que Colleen chercherait sûrement à t’inviter aux festivités mais tu ne voyais pas l’intérêt de célébrer une fête sans Roméo. Et c’est alors que tu étais encore en train de broyer du noir qu’une boule bleutée était apparue en face de toi. Un animal en était sorti et tu avais reconnu sans hésitation un suricate. Il avait commencé à te parler comme si tout cela avait été normal. Et une chaleur avait grandit en toi à chaque mot qu’il prononçait. Il te rappelait ton défunt frère. Tu en avais donc déduit qu’il en était sa réincarnation et tu avais aussitôt couru voir ta famille pour leur présenter ce patronus. Personne ne t’avait contredit, tout le monde avait vu la joie qui t’avait habité lors de cette découverte et il ne fallait surtout pas que tu retombes dans les ténèbres. Tu l’avais donc nommé Roméo. Depuis son apparition, tu avais retrouvé ta joie d’antan. Tu t’étais rapproché de ta sœur, t’excusant d’avoir été si distant et désagréable envers elle. Tu avais repris ta vie comme tu l’avais laissé car rien n’avait changé, Roméo était bien avec toi, il te suivait même partout et ce n’était pas cette stupide épidémie qui allait te l’enlever.