Thaddeus,

Il semblerait que rien n'échappe à tes griffes acérées. Ta plume est assassine. Précise et si subtile, comme à ton habitude. Des années de pratique. Des années de haine et de noirs stratagèmes. Des années de supériorité.

Nous sommes nés parfaits aux yeux de notre famille. Le temps a fait que tu as continué de l'être. A tes dires je ne semble pas être touchée par la même grâce. Soit. Sache cependant que la personne que je suis devenue fut forgée au sein de ces mêmes murs qui t'ont vu grandir. Eduquée selon ces mêmes principes que tu enfilais comme un gant mais qui ne m'ont jamais siés. Tout deux façonnés pour servir notre belle, grande, noble et ancestrale famille.

Je ne nierai ni les choix que tu me reproches ni mon absence d'envie d'y remédier. A te lire tu t'en doutais déjà. A moins que je ne me trompe et que, dans ta perfection, tu l'ai déjà deviné ? Qu'ils te semblent répréhensibles ne change rien au fait primordial qu'ils sont miens et de ce fait, n'engagent que moi. Dans ton dégoût de ma personne rappelle toi que nous ne partageons pas le même patronyme et n'en profite pas pour un peu plus dénigrer ta soeur, elle est aussi libre de ses choix et aussi tributaire du destin que chacun peut l'être. A la vue de nos profils différents et d'un résultat similaire pourquoi n'acceptes-tu pas le fait que rien n'est de sa faute ? Elle, issue d'un égarement de ton père. Elle qui n'a pas demandé à naître. Peut-être est-ce simplement un vice dans ces illustres gênes que nous partageons tous ? Une terrible hérédité. Merlin t'en garde, il semblerai qu'Eren et toi soiyez immunisés de cet infâme moquerie de la vie. Je ne doute pas un instant que vous continuerez de porter haut et fort toute la grandeur de notre patrimoine.

Thaddeus, tes menaces déguisées ne m'atteignent pas. Je doute que tu te sois retenu de lui apprendre, en ces beaux mots que tu affectionnes tant, parfait prêcheur de la vérité, l'étendue de l'immense déception qu'elle a elle-même mis au monde ? Evidemment. Quel délice cela a du être de la parfumer de honte, savamment distillé entre un soupçon d'effroi et une larme de fausse incompréhension. Nous savons tous les deux que tu excelles à ce jeu. J'espère simplement qu'elle n'a pas réveillé jusqu'aux fantômes de nos ancêtres lorsque tu t'es présenté à elle pour lui faire ton rapport de bon petit soldat. Lorsque tu lui as brisé le coeur, bien que la faute m'incombe entièrement je te l'accorde avec grâce.

Mais Thaddeus, qu'importe vos machinations sordides et vos esprits étriqués, qu'importe cette terreur que vous évoque l'égalité des sorciers, qu'importe ces vils jeux que vous affectionnez tant, qu'importe mes tares et votre perfection ; vous êtes mon sang. A ce titre nous serons toujours une famille, quoique vous puissiez tous en penser, de ce où jour où tu m'as définitivement bannie jusqu'à bien longtemps après que nos os aient disparus. Je ne m'excuserai pas d'être celle que je suis comme je t'excuse d'être celui que tu es. Ce sont eux les responsables de ce que nous sommes.

Je remercie ta déférence de m'avoir envoyé cette missive.

Sache mon cher cousin que ni votre dégoût ni votre rejet ne viendra obscurcir l'amour que je vous porte.
Puisse la haine ne jamais réussir à entièrement dévorer ton coeur.


O. J. Peverell