« Tu ne peux pas me laisser là ! Tu ne peux pas m’abandonner maintenant ! » Si, il part. Il l’abandonne comme ça, sans un seul regard en arrière. Il ne reviendra pas, ils ne reviennent jamais. Elle choisit la mauvaise personne et doit en assumer les conséquences. Il part alors qu’elle a besoin de lui, il part parce qu’il ne peut pas. Il ne peut pas abandonner ses rêves, ses convictions et tous ses projets pour elle. Elle n’était qu’un coup d’un soir, rien de plus, rien de moins. Il ne l’aime pas, en réalité il connaît à peine son nom. Elle au contraire le connaît parfaitement, elle l’observe depuis qu’ils sont en première année, elle l’aime d’un amour un peu trop fort. Un amour qui finira par la tuer, elle le sait. Mais pour le moment, elle ne peut rien faire d’autres que de subir, subir les coups du destin. Heureusement pour elle, sa mère ne la laisse pas tomber, elle la soutient dans cette épreuve. Elle lui donne tout le courage qu’il lui faut. Mais ce n’est encore pas assez. Lorsque sa fille vient au monde, elle pleure en la prenant dans ses bras. Elle pleure fort parce qu’elle lui ressemble. Elle lui ressemble beaucoup trop. Alors les seuls mots qui arrivent à sortir de sa bouche, les seuls mots qu’on arrive à déceler entre deux sanglots sont horribles. « Prenez la. Emmenez-la. Je ne veux pas l’avoir, je ne veux plus la voir… jamais » Et on exauce sa volonté. On lui prend le bébé et on l’emmène dans un endroit, un endroit où elle essaiera d’avoir une vie.

On lui avait donné le prénom de Artémis, parce que ça avait été la seule indication que sa mère avait donnée. Pour son nom, elle n’en avait pas eu jusqu’à ce qu’on lui attribue une première famille à l’âge de quatre ans. Ils étaient les Chesterfield, un homme et une femme qui cherchaient à avoir un enfant depuis tellement longtemps qu’ils avaient abandonné l’idée d’y arriver. Ils avaient été charmés par son regard innocent, ils avaient été envoutés par sa crinière de feu alors ils l’avaient adoptée. Elle s’était tout de suite bien sentie dans cette famille. Ils lui avaient donné de l’amour, ils l’avaient totalement accepté. Alors jusqu’à ses onze ans elle avait vécu une véritable vie. Elle avait vécu dans l’amour et la joie d’une vraie famille. Mais tout s’était arrêté. Un jour, on avait frappé à la porte. Il était là, sur le pas de la porte. Au premier regard elle l’avait reconnu même si elle ne l’avait jamais vu. Leurs yeux … leurs yeux étaient identiques, la même couleur, la même intensité, la même force. Mais elle ne voulait pas, elle ne pouvait pas aller avec lui, il n’était pas sa famille, simplement son géniteur. Cependant, il ne lui avait pas laissé le choix. « Tu es ma fille Artémis et tu dois venir avec moi. » Elle avait beau refuser, ils avaient beau crier qu’elle ne lui appartenait pas, qu’il l’avait salement abandonnée mais il n’écoutait pas. Il est vrai qu’il n’était pas revenu chercher sa fille parce qu’elle lui manquait, non il avait besoin d’elle. Depuis tout ce temps, il n’avait pas eu plus d’enfant, juste elle. Juste cet enfant bâtard qu’il avait abandonné. Aujourd’hui, il venait la retrouver pour perpétuer sa lignée, perpétuer la lignée Crabbe. Certes elle était femme mais ça n’avait pas d’importance,  il ne pouvait pas laisser leur sang s’effacer comme ça. Alors oui, elle était une bâtarde mais elle restait sa fille.

Ainsi, qu’elle refuse ou pas, ça n’avait pas servi à grand chose. Il avait manipulé, il avait torturé, et il avait réussi à l’emmener avec lui. Elle avait pleuré, elle avait crié et son monde s’était enfermé. Chez son père, elle avait une chambre et quelques affaires mais ça ne lui plaisait pas : ce n’était pas chez elle. Il ne lui parlait jamais, il n’essayait même pas de la mettre à l’aise. Il se préoccupait simplement de « refaire son éducation ». Au contraire des Chesterfield qui étaient des « sangs impurs » et pro-Ordre, les Crabbe étaient des Mangemorts. Elle s’était sentie si seule alors dans cette grande demeure jusqu’à l’arrivée de Patronus, ce petit chimpanzé qui avait enfin réussi à lui redonner le sourire. Il était sa lumière, il était son frère. Il la faisait rire lorsque son père lui criait dessus, il séchait ses larmes lorsqu’elle se rappelait des Chesterfield. Mais au fur et à mesure que le temps passait, elle allait mieux, beaucoup mieux. Elle s’ouvrait petit à petit au monde, elle devenait souriante et heureuse. Et pourtant elle restait silencieuse sur sa famille, son passé et tout le reste. Elle avait même commencé à aimer. Aimer ce garçon, ce jeune homme qui l’avait envouté. Il était beau, il était fort et gentil. Il était parfait.

Et pendant l’été, malgré les interdictions de son père, malgré toutes les règles elle le voyait. Elle le voyait en secret et l’aimait en secret. Elle n’avait pas le droit, elle savait qu’elle avait été promise à un autre mais ça n’était pas pour elle. Non, ce n’était pas elle qui devrait se marier, c’était une autre. Puis, l’histoire se répétant elle était tombée enceinte pendant ces vacances. Elle ne lui avait pas dis, attendant de le revoir dans le Poudlard Express à la rentré. Et c’était ce qu’elle avait fait. Là, dans ce compartiment, elle lui avait annoncé la nouvelle. Elle avait pleuré mais il avait été là, il lui avait pris les mains, il l’avait embrassée et l’avait rassurée. Puis, le reste était devenu flou, rapide et bizarre. Le train avait été attaqué, elle avait été blessée, elle avait perdu connaissance et à son réveil son monde s’était à nouveau écroulé. Elle avait ouvert les yeux et l’avait demandé lui, mais il n’était pas venu. On lui avait alors dis qu’il n’avait pas survécu, qu’il avait été … tué. Elle avait pleuré, elle avait crié, elle avait souffert. Le bébé, quant à lui, elle l’avait effacé de sa vie, ne cherchant pas à mettre au monde cet enfant. S’il n’était pas là, il n’y avait aucune raison d’être mère.

Aujourd’hui, elle essaie de se montrer forte, elle essaie de faire croire au monde qu’elle va bien. Elle ment en disant qu’elle se moque de ses fiançailles, elle ment en déclarant qu’elle a oublié ses maux et pourtant chaque soir elle y repense. Mais elle ne laisse rien paraître, elle reste silencieuse et parfois froide pour qu’on ne lui pose aucune question.