Une gamine naît un soir d'automne en Irlande. Rien d'incroyable à ça. La fille d'une sorcière et d'un moldu, comme il en existe des milliers dans le monde magique. Cette enfant, c'était Sola O'Brien. Une enfant rêveuse, sans être lunatique, éduquée comme de nombreux autres enfants.
  Sa famille n'a rien d'incroyable: son frère, vieux de huit années de plus, n'a rien fait d'assez notable pour être noté quelque part, que ce soit à Poudlard ou ailleurs. Actuellement, en 1982, il est juste un garde forestier de la forêt familiale, bien que passant le plus clair de son temps dans la paperasse commerciale. Les parents sont un peu vieux mais travaillent encore, le père coupant le bois, la mère le plantant. Les cousins s'occupent d'une autre forêt non loin, rien de fort palpitant. Les O'Brien sont producteurs de bois haut de gamme, essentiellement vendu aux moldus pour des blocs à tailler et aux sorciers pour la fabrication de baguette. Ils produisent de très nombreuses sortes: acacia, orme, sycomore, sureau, cerisier, aulne, aubépine, saule, châtaigner, chêne rouge, chêne commun, hêtre, ébène: tous ces arbres finiront soit par faire office de tête de lit chez un riche moldu britannique soit par servir de baguette chez un sorcier britannique, parfois l'objet final étant parfois créé sur place suite à la flemmardise du client, moldu le plus souvent dans ce genre de requêtes. C'est sûr, c'est une occupation palpitante.
  Sola naquit ainsi à côté de ces gigantesques forêts parfaitement entretenues, y joua durant son enfance et s'y entraîna durant ses vacances, lors de ses premières années à Poudlard.
  Pourquoi pas les suivantes? Car elle n'y fut plus la bienvenue, tout simplement. Comme des milliers de petites filles, elle aimait les filles et quand ses parents finirent par le savoir, leur dégoût se montra immédiatement sur leur visage: des grimaces, une gêne, un dégoût. Aussi, elle décida de partir chez sa tante (soit la forêt d'à côté, mais vu qu'une forêt c'est grand, la maison de la tante se situe bien à une bonne douzaine de kilomètres), qui, bien qu'étant voisine, avait pour avantage (à part de ne pas faire des grimaces à la vue de Sola) d'habiter non loin d'un village de quelques centaines d'habitants où il y avait quelques autres adolescents, moldus ou pas, avec qui passer les après-midis d'ennui en été (parce que soyons clairs, c'est dur de s'amuser dans une forêt parfaitement bien entretenue, où les arbres sont plantés à intervalles parfaitement réguliers, durant deux mois d'affilée). Elle obtint également l'amour d'un vieux chat marron, gentil, câlin et perdant tous ses poils, mais il m'est inutile de vous faire un paragraphe sur une bête trop vieille pour quoi que ce soit.
  A Poudlard, sa scolarité est normale; elle n'est peut-être pas la meilleure pour lancer des sortilèges (surtout en Défense contre les forces du mal) mais est admirable en confection de potion, en lecture de runes et en métamorphoses.
  Ce fut aussi à Poudlard qu'apparut (comme à de très, très nombreux enfants sorciers) son patronus. Une saïga. Un animal à la fois mignon, drôle et repoussant. Mais, qu'importe sa forme, un patronus très doux et sage, intelligent et loyal, comme sa maîtresse. Bien que semblant être une chimère et ayant fait tourner quelques têtes à Poudlard, il convient parfaitement à sa propriétaire qui a finit par s'y habituer. Au moins, lui ne passe pas son temps (même si il le pourrait) à filer à toute allure à travers les salles comme certains le font.
  Hélas, son rêve n'est ni à Poudlard ni dans la plantation arboricole irlandaise de sa famille: elle rêve d'espace, de la conquête spatiale, de Gagarine, de Soyouz et du reste. Elle aimerait parfois rejoindre le monde moldu et assister avec lui aux décollages de vaisseaux spatiaux, à la déception des échecs et à l'euphorie des réussites dans les salles de contrôle américaines.   
  Mais il faut se rendre à l'évidence: comment une sorcière choppant toutes les maladies possibles et imaginables pourrait-elle se permettre d'avoir autant d'ambition, comme l'avaient fait remarquer ses camarades? Une sang-mêlée, jamais remarquée nulle part (à part en cours de lecture de runes, mais tout le monde s'en fout), jamais distinguée pour quoi que ce soit, issue d'un trou perdu en Irlande. Mais ce n'est pas grave, leur avait-elle répondu. Elle réussira quand même.