SCENE UN. L’hôpital. Année 1963.KRISTOFFER ▬ Veronika, je suis désolé…
Il est agenouillé au pied du lit de sa bien-aimée, les traces de ses insomnies bien visible sur son visage et sa raideur corporelle.VERONIKA ▬ Arrête chéri. Ce n’est pas cette histoire qui va nous séparer. Tu as fait une erreur, je ne te le pardonne pas.
Kristoffer essaye de parler. Non, laisse-moi finir ! Ce n’est pas pour ça que cette enfant doit en faire les frais. J’ai une proposition à te faire.
KRISTOFFER,
voyant une seconde chance inespérée arriver ▬ Je ferais tout pour te faire plaisir !
VERONIKA ▬ Très bien. Parce qu’on va garder l’enfant.
KRISTOFFER ▬ Mais ! Comment ?!
VERONIKA ▬ Ta bonne-femme n’en veut pas. Alors, on va la faire passer pour notre propre fille. La sœur jumelle de ton fils Plato. Tu m’entends ?
Elle le voit hésiter, et son visage vire au cramoisi. TU ENTENDS ?!
KRISTOFFER,
visiblement surpris ▬ Oui ! On va faire ça.
VERONIKA ▬ Et nous ne dirons rien aux enfants. Vous tous. Promettez-moi de ne rien dire à personne, surtout pas à ces petits choux.
Elle pose le regard vers les deux enfants. Sa voix est douce et son regard, empli d’amour. LA FAMILLE,
en chœur ▬ C’est promis.
Le rideau se ferme, laissant Kristoffer seul dans la chambre avec sa femme. Il pleure.SCENE DEUX.Dans l’enclos des femelles dragons.JOHAN ▬ Plato, viens ici ! Viens voir.
PLATO ▬ Voir quoi ? Dis-moi !
Intrigué, le jeune garçon s’approche timidement de son aîné.JOHAN ▬ Un des œufs va éclore…
La joie se lit sur le visage de Plato qui ne peut s’empêcher d’approcher ses doigts. Johan lui donne une petite tape. Ne le touche pas, Plato. Tu vas le perturber.
PLATO ▬ Mais !
Il se renfrogne, mais obéit. Crack. La coquille se brise lentement. L’émerveillement nait sur le visage du petit garçon au fur et à mesure que se dévoile le museau du dragon. Encore un norvégien à crête.JOHAN ▬ Tu vois ! J’ai bien fait de t’appeler, non ?
PLATO ▬ Oh oui !
Il se relève promptement, prêt à toucher le bébé dragon. JOHAN ▬ NON ! Ne le touche pas !
PLATO,
triste ▬ Pourquoi tu ne me laisse pas faire ? T’es un méchant Johan !
Plato quitte la scène en courant, pleurant à chaudes larmes. SCENE TROIS. Plato et sa sœur sont en train de jouer avec Joakim.SOLVEIG ▬ Arrête de me pousser ! Joakim, aide-moi !
JOAKIM ▬ Plato, laisse la tranquille !
PLATO,
contrarié ▬ Mais c’est elle qui as commencé ! Pourquoi c’est toujours elle qui commence !
SOLVEIG ▬ Non c’est toi ! Tu veux pas me rendre ma poupée !
PLATO,
en colère à présent ▬ T’as cassé ma figurine !
SOLVEIG ▬ Mais j’ai pas fait exprès !
PLATO ▬ Je m’en fiche ! T’es méchante avec moi !
JOAKIM ▬ Plato, arrête ! C’est toi le méchant maintenant. Excuse-toi.
PLATO ▬ NON ! Arrête de te conduire comme papa !
Il pousse violemment Joakim qui tombe sur le sol. Il s’enfuit hors de la scène.SOLVEIG,
pleurant ▬ Pourquoi il est méchant avec nous maintenant ?
JOAKIM,
la prenant dans ses bras ▬ Je sais pas…
ENOK,
criant du pas de la maison ▬ Les enfants, à table !
Les enfants, dispersés d’un bout à l’autre du terrain, se mettent à courir pour aller manger.INTERLUDE NARRATIF.
Il est seul au beau milieu de coquilles vides. La période des naissances vient de s’achever, et l’enclos des femelles est aussi vide que les coquilles. Aussi vide que le cœur de Plato. Le petit garçon à six ans. Il vient d’avoir sa première peine amoureuse. Du moins, c’est ce que l’on peut penser avec le recul. Lui, il voit ça comme la perte d’une amitié très importante.
Il s’est roulé en boule dans l’une des coquilles. Heureusement, le vent qui soufflait plus tôt ce matin as permit aux coquilles de sécher. Ses sanglots résonnent à travers la large plaine. Mais personne ne vient. Personne, parce qu’ils sont tous partis se coucher. Plato n’as pas sommeil. Plato est insomniaque. Des cauchemars hantent ses nuits. Le forcent à se lever. Le forcent à courir voir les dragons, pour s’assurer qu’ils sont tous là. Sauf que cette nuit… Non. Cette nuit est différente. En quoi ? La tristesse qui émane de l’enfant est assez évocatrice. Son cher petit dragon. Un petit suédois à museau court, le seul né cette fois-ci, a quitté le nid. Définitivement. Il l’avait appelé Lazuli. C’était son ami. Mais il s’est envolé. Loin, très loin. Et Plato n’as pas pu le retenir. Lazuli l’as abandonné, alors que Plato aurait voulu s’envoler avec lui. Au moins une fois.
SCENE QUATRE.
Sirrush, Silas et Plato sont devant le lac familial qui sert d’abreuvoir et de baignoire aux dragons. PLATO ▬ SIRRUSH ! Excuse-toi ! T’es un méchant !
SILAS,
peiné ▬ Laisse tomber Plato, j’ai l’habitude…
PLATO ▬ NON JE VEUX PAS !
SIRRUSH ▬ Je m’excuserais pas. Il fait pas partie de la famille. C’est tout.
PLATO ▬ SI !
Il donne un coup dans l’épaule de Sirrush. Et bien que faible, le coup fait grimacer Sirrush.SIRRUSH ▬ Tu me fais mal Plato !
SILAS,
s’approchant du petit garçon de six ans ▬ Laisse tomber bout de chou, c’est gentil.
Il lui ébouriffe les cheveux.PLATO ▬ J’suis pas un bout de chou ! C’est pas bon les choux !
SIRRUSH,
désireux de faire mal ▬ TOUCHE PAS A PLATO ! T’as pas le droit !
SILAS,
sourit tristement et recule d’un pas ▬ Hum… Très bien. Je vous laisse.
PLATO,
s’accrochant à son bras ▬ NON part pas ! Je veux pas !
Il se retourne vers Sirrush. T’es un méchant ! Pourquoi tu dis ça !
SIRRUSH,
dédaigneux ▬ Si tu le dis. En tout cas, c’est pas moi qui me suis fait abandonner.
SILAS,
rouge de fureur ▬ TAIT TOI ! NE REDIS JAMAIS CA !
Il serre les poings, creusant des demi-lunes sanglantes sur ses mains et s’en va en courant. Il sort de scène en pleurant. PLATO, essayant de le suivre ▬ Siilaaas !
SIRRUSH,
le rattrapant par le bras ▬ N’y va pas Plato. Reste avec moi. S’il te plaît.
Le petit garçon hésite, mais la pression sur son bras le fait rester à sa place. Il se frotte doucement les yeux pour ne pas que son cousin remarque qu’il est prêt à pleurer.SCENE CINQ.
Plato est seul avec son père. Assis sur un tronc d’arbre, il l’écoute les yeux baissés.KRISTOFFER ▬ Tu dois arrêter d’être méchant, Plato.
PLATO ▬ Mais je suis pas méchant !
KRISTOFFER ▬ Tu dois arrêter de frapper les autres.
PLATO,
en criant ▬ Mais ils sont méchants avec moi !
KRISTOFFER,
sa voix se faisant autoritaire ▬ Ne prend pas ce ton avec moi !
PLATO ▬ Papa… Pourquoi tu me crois pas ?!
KRISTOFFER ▬ Parce que je vois comment tu es avec les autres ! Pourquoi tu n’acceptes pas qu’ils jouent ensemble ?
Plato mord ses lèvres, ne voulant pas parler. Son père se met à le secouer. Répond moi !!
PLATO ▬ Pa… Papa ! Arrête !
Kristoffer cesse immédiatement. Je… Ils me laissent tout seul…
KRISTOFFER ▬ Et tu sais pourquoi ?
Plato secoue la tête, et n’ose plus parler de peur que les sanglots s’échappent. C’est parce que tu veux toujours être le meilleur. Et pour ça, tu frappes, et tu es méchant avec eux. Alors ils ne veulent plus jouer avec toi.
PLATO ▬ C’est pas vrai ! Lazuli, j’étais gentil avec lui ! Et il est parti ! Il m’a laissé tomber !
KRISTOFFER,
haussant les sourcils ▬ Lazuli ? Tu parles d’un dragon ?
Plato hoche la tête. Je ne sais pas pourquoi il est parti. Mais si tu ne veux pas que tout le monde autour de toi l’imite, il est temps de changer de comportement !
Sur cette phrase, Kristoffer sort de scène, sans regarder son fils qui s’est mis à pleurer sans bruits.SCENE SIX.
Veronika borde son fils, qui, capricieux, l’oblige à rester avec lui. PLATO ▬ Maman, reste s’il te plaît.
VERONIKA ▬ Qu’y-a-t-il mon chéri ?
PLATO ▬ Maman, j’ai peur.
VERONIKA ▬ Peur de quoi mon chou ?
PLATO ▬ Maman…
VERONIKA ▬ Oui ?
PLATO,
baissant les yeux ▬ Ne t’en vas pas cette nuit.
VERONIKA ▬ Mais enfin, pourquoi ?
PLATO ▬ Parce que je vais pleurer, maman.
VERONIKA,
surprise ▬ Que s’est-il passé ? C’est à cause de ce que papa t’as dit tout à l’heure ?
Plato relève la tête, ses yeux sont embués de larmes. Tu sais, il a eu raison de te gronder.
PLATO,
hésitant ▬ Ce… Ce n’est pas ça.
VERONIKA ▬ Plato, dis-moi s’il te plaît.
PLATO,
murmurant ▬ Lazuli….
VERONIKA ▬ Lazuli ? Qui est-ce ?
PLATO,
se mettant à pleurer ▬ Il… Il est parti. Il m’a abandonné. Je veux pas qu’on m’abandonne. Je veux pas que tu m’abandonne. Reste maman. Reste.
Les sanglots lui arrachent quelques soubresauts tandis que sa mère s’allonge à ses côté. VERONIKA,
jouant avec les cheveux de son fils en un geste rassurant ▬ Peut-être que sa maman l’as appelé ? Tu ne crois pas mon chéri ?
PLATO,
reniflant ▬ Je... Je sais pas. Je veux pas savoir. Il ne devait pas me quitter ! C’est tout ! Lazuli il est méchant parce qu’il m’a laissé tout seul !
VERONIKA ▬ Allons ! Cesse de pleurer ! Tu n’es pas beau en pleurant. Lazuli devait partir. C’est tout.
PLATO ▬ JE VEUX PAS QU’ON ME LAISSE TOUT SEUL.
Crie-t-il tandis que les larmes cèdent la place à la colère d’un enfant. JE VEUX PAS. VOUS ÊTES TOUS MECHANT.
Il saute hors du lit et s’enfuit dehors, retourner dans sa coquille pleurer tout son soûl. Sa sœur tente de le suivre, mais elle est arrêtée par sa mère.VERONIKA ▬ Solveig, laisse-le. Il a besoin d’être seul.
SOLVEIG ▬ Et si il ne revient pas ?
VERONIKA ▬ Il reviendra.
Veronika attend que sa fille se soit endormie avant de s’en aller. Conformément à ses dires, elle ne va pas voir Plato. Mais elle reste éveillée toute la nuit, par crainte.INTERLUDE NARRATIF.
Il ne revint pas. Non. Plato pleurait. Encore. Il avait l’impression de ne faire que ça. Pleurer. Il se sentait misérable, mal aimé. Il ne voulait pas qu’on l’abandonne. Mais les autres, ses cousins, sa sœur… Ils préféraient jouer entre eux. Caché dans une coquille, tout au fond du domaine, il était enroulé sur lui-même. Il se sentait plus rassuré comme ça. Seul, encore. Mais rassuré. Si Lazuli avait été là, il aurait eu chaud. Il se serait blotti contre son dragon, et il se serait endormi. Il n’aurait pas fait de cauchemars. Mais Lazuli était parti. Loin. Peut-être à l’autre bout du monde. Plato ne pouvait pas imaginer qu’il soit bien ailleurs. Il voulait que Lazuli soit bien AVEC lui. Chez lui. Pas « ailleurs ». Plato s’endormi avec difficultés. Toute la nuit il fit des cauchemars. Il voyait Lazuli partir. Il voyait Lazuli lui parler. Lui dire qu’il le haïssait. Qu’ils n’auraient jamais pu être amis. Qu’il s’était servi de lui, pauvre petit garçon. Et Plato pleurait, en rêve, et aussi éveillé. Il pleurait toutes les larmes de son frêle corps d’enfant.
Il ne voulait plus pleurer. Il voulait être fort. Comme les adultes. Il voulait montrer qu’il n’était pas un « saule pleureur » comme il entendait parfois quand on parlait de lui. Quand il entendait ça, il avait envie de frapper. Il ne voulait pas qu’on parle de lui comme ça.
Alors il ne revint pas. Pas cette nuit-là. Pas la suivante non plus. Il errait dans les bois, espérant s’endurcir. Il avait faim ? Il mangeait quelques rares baies. Il avait soif ? Il allait ailleurs, dans son petit lac, qu’il avait trouvé la première journée. Ce qu’il ne savait pas, c’était que sa fuite avait provoqué la peur de sa mère. Elle était restée éveillée toute la nuit, guettant le retour de son petit garçon. Le matin, se rendant compte qu’il n’était nulle part, appela Kristoffer. A eux deux, ils ratissèrent le domaine. Mais Plato était intelligent. S’il ne voulait pas être vu, il ne l’était pas. C’était lui le meilleur à cache-cache.
Mais Plato n’en savait rien. Seulement, la nuit dans les bois, avec des dragons parfois hostiles tout autour ne lui disait plus rien la troisième nuit. C’est cette nuit-là, après avoir été réveillé par le grondement du seul magyar à pointes du domaine qu’il paniqua. Qu’il se rendit compte de sa fuite. Qu’il fallait rentrer. Et qu’il serait salement grondé.
Résigné, il courut à travers bois pour échapper au magyar qu’il appelait Apex. Il adorait nommer les dragons qu’il voyait. C’était un moyen pour lui de se rapprocher de ces énormes animaux. Il sentait Apex se rapprocher. Il avait peur maintenant. Heureusement pour lui, ses parents vinrent à sa rencontre. Tellement bouleversée, Veronika ne le gronda même pas. Elle le sera fort contre lui, en lui faisant promettre de ne plus jamais lui faire aussi peur. Son père repoussa le dragon grâce à un sortilège, avant d’aller embrasser son fils. Tout le monde avait remarqué son absence. Tout le monde l’attendait sur le pas de la porte. Certains avaient des larmes qui coulaient encore. Ils voyaient leur petit Plato couvert de boue, habillé de son simple petit pyjama à moitié déchiré. Un peu plus maigre qu’avant ces trois jours. Ils voyaient dans ses yeux la peur d’être seul. Les autres lui en voulaient d’être partis. Lui en voulaient de les avoir laissé tomber. Pour une fois, Plato s’excusa. Mais ces trois jours dehors l’avaient changé. Il était plus calme. Il frappait moins.
SCENE SEPT. Les jumelles, accompagnées de Plato sont dans l’enclos des tout-petits.HANNA ▬ On ne devrait pas être ici.
PLATO,
souriant ▬ Pourquoi ? Tu as peur, Hanna ?
HEIDI ▬ Arrête Plato !
PLATO ▬ Je plaisantais, c’est bon.
HANNA ▬ Ce n’est pas drôle du tout. Tu sais que leurs mères ne vont pas être contentes de nous voir !
PLATO,
perdant son sourire ▬ Oui. Je sais. Vas-y si tu veux. Moi je reste. Heidi aussi.
Heidi s’apprête à répliquer, et croise le regard noir de Plato. Elle se résigne, alors qu’Hanna s’en va. Et puis, elle veut voir les nouvelles naissances, elle aussi.HEIDI ▬ Tu sais, tu n’étais pas obligé de lui dire ça Plato. Elle n’aime pas les dragons, c’est tout.
PLATO ▬ Elle n’avait qu’à pas venir alors. Tu sais que je l’aime bien, mais parfois elle est vraiment trop peureuse…
Dit-il, un peu exaspéré. Soudain, ils aperçoivent enfin l’objet de leur visite. Un petit dragon étrangement albinos. HEIDI ▬ Qu’il est mignon !
PLATO,
souriant à nouveau ▬ J’avoue ! Bibi, viens ici Bibi !
HEIDI,
surprise et amusée ▬ Bibi ? Tu l’appelle Bibi ?
Elle rit.PLATO,
se renfrognant ▬ Oui, tu as un problème ?
HEIDI ▬ Non, pas le moindre ! Ne sois pas autant sur la défensive !
PLATO,
moyennement convaincu ▬ Bon, je vais m’occuper des autres. Tu viens ?
HEIDI,
secouant la tête ▬ Non, je vais rester encore un peu jouer avec lui.
PLATO ▬ Très bien, à tout à l’heure !
Il quitte la scène en faisant un dernier signe à sa cousine. HEIDI,
s’asseyant près du petit dragon ▬ Comme tu es mignon !
D’autres observent la scène de loin.SCENE HUIT. Plato est sur le toit de l’hôpital depuis qu’ils y sont. Il a vu son cousin, Joakim. Son bras réduit en charpie l’as fait fuir. Il mange une pomme, perdu dans ses pensées. La porte qui claque le fait se retourner en sursaut.PLATO ▬ Heidi ? Qu’est-ce que tu fais là ?
Il marche vers sa cousine, mais rapidement augmente le rythme. Heidi !
Elle se penche par-delà la rambarde. Plato s’accroche aux épaules de la jeune fille, l’empêchant de tomber.PLATO ▬ Ça va pas non ?! T’es complétement tarée, qu’est-ce qui te prends ?!
HEIDI ▬ Mais lâche moi !
Contre toute attente, Plato se met à rire, sous l’incrédulité de sa cousine.PLATO ▬ Tu l’as rêvée, celle-là ?
HEIDI ▬ Putain mais laisse-moi… ‘Te plait.
PLATO,
changeant légèrement de ton ▬ Hors de question.
Il fait une pause, un temps. Enjambe la rambarde. On va parler de tout ça.
Elle s’accroche à lui, passant son bras valide autour des épaules du garçon en réaction à son câlin improvisé.HEIDI ▬ Qu’est-ce… Qu’est-ce que je voulais faire ?
PLATO ▬ Rien du tout. Une connerie, oublie.
HEIDI ▬ Personne comprend ce qui m’arrive… Je…
PLATO ▬ Ça va s’arrêter. T’en fais pas. On trouve toujours des solutions. T’es pas toute seule. T’es petite. Je suis petit et je raconte peut-être que des conneries. Mais tu va t’en sortir, ok ? Alors, refais jamais ça. Jamais.
Le câlin s’éternise, alors que les sanglots s’estompent. SCENE NEUF.en attente....INTERLUDE NARRATIF
Près du lac, Plato est triste. Encore. Il ne sait pas comment aborder le sujet avec Silas, son aîné. Il en est amoureux. Il ne comprend pas. Il est perdu. Et alors que tous les autres jouent, lui, il reste assis à contempler son reflet dans l’eau. Il n’a aucune idée de pourquoi il est attiré par Silas. Il trouve ça étrange. Malsain. Il ne devrait pas l’aimer. Il devrait juste l’aimer comme un frère, comme un cousin. Pas l’aimer tout court. Décontenancé, et furieux de voir son reflet montrer les larmes qui coulent doucement, il donne un coup dans le lac. L’image est floue.
C’est à ce moment-là que Silas apparait. Il n’a pas remarqué que Plato pleurait. Mais il n’aime pas le voir seul. Pas en sachant sa tendance à s’enfermer dans le mutisme. Il lui demande ce qui ne va pas. Ce qui le chagrine, le turlupine, l’ennuie. Plato ne répond pas. Non, au lieu de ça il se lève. Il est plus petit que Silas, c’est certain. Mais ça ne l’empêche pas de le regarder bien dans les yeux. Plato lui dit, je t’aime. Les mots sortent de sa bouche sans que celui-ci n’aie le temps de les ravaler. Trop tard. Il se mort la lèvre, conscient que rien ne ferait oublier ces mots. Ces mots qu’il regrette aussitôt. Il n’aurait pas dû. Et maintenant, il est tout aussi perdu. Si Silas ne l’aime pas, que fera-t-il ? Serait-ce le début d’un abandon encore plus triste et impitoyable que celui de Lazuli, quelques années plus tôt ? Plato ne sait pas. Plato détourne le regard. Il s’en veut. Et Silas, lui, reste interdit. Il aime bien son cousin, c’est vrai. Mais il ne « l’aime » pas. Il n’aime pas les garçons, lui dit-il. Il n’imagine pas Plato comme ça, ajoute-t-il sans voir que le petit cœur du garçon se serre. L’enfant se rend compte qu’il avait misé beaucoup sur cette révélation, sans penser à un… Refus. Un « non » qui le blesse encore plus profondément, encore plus efficacement qu’un coup de poignard dans le dos. Pourtant, il s’y attendait, à cette révélation. Si lui pensait ça malsain, pourquoi en aurait-il été autrement pour son aîné ?
SCENE DIX.
Gina rentre de voyage. Elle entre en déposant ses valises… Plus ou moins correctement.GINA ▬ Oh, Gabriel tu m’as manqué !
GABRIEL ▬ Toi aussi tu m’as manqué mon amour !
Ils s’embrassent tendrement. Gina s’écarte légèrement, les joues rouges.GABRIEL ▬ Que se passe-t-il ?
GINA ▬ Oh… Euh… J’ai rencontré des gens. Des moldus.
GABRIEL ▬ Et donc ?
GINA ▬ Eh bien, ils ont un fils. Il a six ans. Il s’appelle Ludvik. Mais… Il veut se faire appeler Silas.
GABRIEL ▬ Et qu’est-ce que j’ai à voir avec lui ?
GINA,
penaude ▬ En fait. Il est revenu avec moi. Tu comprends, à six ans… Il ne peut plus le supporter !
GABRIEL,
s’emportant quelque peu ▬ Mais enfin ! Nous avons déjà un garçon, et deux petites en préparation ! On ne peut pas s’occuper d’un autre enfant !
GINA,
s’emportant aussi ▬ MAIS TU NE COMPRENDS PAS !
GABRIEL,
n’ayant pas l’habitude de ce ton, se calme ▬ Comprendre quoi voyons ?
GINA ▬ Il… Il a été maltraité. Ses parents n’en veulent plus. Il est malheureux Gabriel ! Tu comprends ça, non ?
GABRIEL,
tout à fait calmé ▬ Oui. Oui, je comprends.
Il murmure. C’est d’accord.
GINA,
souriante ▬ C’est vrai ? Merci mon chéri !
Des larmes de joies s’échappent de ses yeux alors qu’elle l’embrasse à nouveau.La scène se termine avec l’arrivée de Silas, timide et peu causant.SCENE ONZE.
Sur les bancs de Poudlard, les deux gryffondor s’échangent des petits mots.ORION ▬ Je crois que je t’aime, Anita.
ANITA,
les joues roses ▬ Moi aussi, Ingherneils.
ORION ▬ Appelle moi Orion, voyons… Je t’appelle bien Anita moi !
ANITA ▬ J’essaye de m’habituer à ce nom.
ORION ▬ Ah oui ? Pourquoi, il est bizarre ?
ANITA ▬ Non non, ce n’est pas ça. J’essaye de m’imaginer plus tard.
ORION,
intrigué ▬ Ah oui ?
ANITA,
continuant sur sa lancée ▬ Anita Ingherneils.
ORION,
aux anges ▬ … C’est vrai.
ANITA ▬ De quoi ?
ORION ▬ Ça sonne bien.
Orion dessine une bague, qu’il passe au doigt de la jeune femme. Anita, elle, devient encore plus rouge. Le professeur les remarque et leur somme d’arrêter. Ils se mettent tous les deux à rire discrètement, avant de remettre à s’écrire. SCENE DOUZE.
Enok et Rosa sont les premiers arrivés sur le terrain qui redeviendra la « Terre » des Ingherneils.ENOK,
émerveillé ▬ C’est beau.
ROSA,
à son bras ▬ Tu as raison. Le domaine aussi.
ENOK,
riant de la plaisanterie ▬ Il lui faut une bonne remise à neuf c’est vrai…
ROSA ▬ On le fera.
ENOK ▬ Et aussi des dragons…
ROSA ▬ Bien sûr !
ENOK ▬ Je sais qu’il y a un norvégien à crête non loin…
ROSA ▬ Tu m’en as parlé. Il est un peu comme le gardien des lieux.
ENOK,
se tournant vers elle ▬ Ah oui ? Je ne me souviens pas te l’avoir dit…
ROSA,
lui donnant une petite tape sur le nez ▬ Mais non, patate. Je l’ai deviné.
ENOK,
riant de nouveau ▬ Il faudrait que tu arrêtes de m’appeler patate !
ROSA ▬ Ah oui, et pourquoi ça ?
ENOK ▬ Parce que…. C’est pas sérieux.
ROSA ▬ Ah mais ça je le sais ! C’est pour te punir de ne m’avoir pas prise au sérieux, moi.
ENOK,
se sachant vaincu ▬ Tu… Tu marques un point.
ROSA ▬ Sache que j’ai toujours raison, ma patate.
La scène se termine sur les deux adultes qui se chamaillent comme des enfants. INTERLUDE NARRATIF
Prêts à retourner chez eux, les enfants Ingherneils se précipitent, accompagnés d’Orion, vers leur portoloin attitré de cette année, une casserole. Presque tous les adultes sont là aussi pour les aider avec leurs bagages. Seule Veronika est restée en Norvège afin d’être au calme pour sa grossesse. Les enfants se jettent sur la casserole après les habituelles embrassades avec la famille. Une casserole, qui, vu la taille de la famille, est aussi grande qu’une marmite de troll.
Mais ce qui les attend sur place est moins réjouissant que la joie première de retrouver leur chère demeure. Non. Au lieu de toute cette joie se trouve une mare de sang. Une gigantesque mare de sang. Du moins c’est l’impression qu’on tous les enfants qui l’ont entraperçu. Les adultes se précipitent pour cacher les yeux des plus jeunes. Les plus âgés des enfants les emmènent loin, à l’intérieur de la maison. Plato, lui, reste là. Il est paralysé. Il ne bouge pas. Seules ses lèvres tremblent d’horreur. Le corps, déchiqueté devant lui n’est autre que celui de sa mère. Elle est la seule qui manque à l’appel. La seule qui ne reviendra jamais. Celle qui ne sourira plus devant la mine boudeuse de son petit garçon. La seule moldue de la famille. Celle qui n’aurait jamais su se défendre. Celle qui attendait un nouvel enfant. Celle qui pourtant, adorait les dragons.
SCENE TREIZE.Plato remarque Johan, qui as l’air étrangement perdu au bord de la forêt, face à la maison.PLATO ▬ Tu tiens le coup, Jo ?
JOHAN,
lui tournant le dos ▬ Hum hum.
Il marmonne.PLATO ▬ Quoi ?
JOHAN ▬ Non rien.
PLATO ▬ Si, il y a quelque chose. Tu ne dis rien depuis deux jours !
JOHAN ▬ C’est…
PLATO ▬ Oui ?
JOHAN ▬ Rien. Laisse-moi tranquille.
Il s’enfuit. Il a peur que son cousin sache. Donc il court. Vite. SCENE QUATORZE.A Poudlard, Plato est entouré d’autres élèves de maisons diverses.PLATO ▬ Doucement les gars, une question à la fois.
ETUDIANTE ▬ Tu es célibataire ?
Elle se met à glousser.PLATO,
faisant mine de réfléchir ▬ Je crois que je le suis.
L’étudiante rougit et recule en gloussant encore.ETUDIANT ▬ C’est trop dommage que je sois un mec, pas vrai ?
PLATO,
souriant tristement ▬ Effectivement. Si tu avais été une fille… Un peu plus jolie tu aurais eu ta chance.
L’étudiant, vexé, fonce dans la direction opposée. JEUNE ETUDIANTE ▬ Tu…. Tu pourras m’apprendre à chevaucher… Un dragon ?
PLATO,
riant ▬ Ça, ça sera bien compliqué !
ETUDIANT,
sceptique ▬ Pourquoi ? Elle est pas assez populaire à ton goût ?
PLATO,
lui jetant un regard noir ▬ Ouais. On va dire ça.
Les deux étudiants – de la même famille – s’en vont, la plus jeune en pleurant.D’autres questions succèdent, mais Plato répond toujours superficiellement. Il ment la moitié du temps, et s’éloigne en prétextant une grande fatigue tandis qu’un jeune garçon porte ses livres.SCENE QUINZE.A la maison, Kristoffer et Plato se disputent.KRISTOFFER ▬ JE BOIS SI JE VEUX ! Tu n’as rien à me dire, Plato ! Je fais ce que je veux, je suis ton père ! Tu me dois le respect !
PLATO ▬ Je ne respecte pas un alcoolique incapable de la moindre empathie !
KRISTOFFER ▬ PARDON ?! Répète-moi ça !
PLATO ▬ Tu m’as très bien compris ! Tu ne penses qu’à toi ! Et en plus tu te noie dans l’alcool ! Quelle image !
KRISTOFFER ▬ Tu n’as pas le droit de me parler sur ce ton !
PLATO ▬ Je suis ton putain d’exemple ! Je fais ce que JE veux !
KRISTOFFER,
l’alcool aidant, il commence à pleurer ▬ Tu ne veux… Même pas essayer de comprendre ce que je ressens !
PLATO,
toujours en colère ▬ Et moi ! Qu’est-ce que je ressens d’après toi ! Et Solveig ! Et le reste de la famille ! Tu es un égoïste !
KRISTOFFER,
cachant son visage de ses mains ▬ J’aimais tant Veronika !
PLATO,
crachant son venin ▬ Tu lui fais honte !
Kristoffer s’enfuit en pleurant, comme un enfant. Plato tremble de rage, alors que sa sœur entre dans la pièce.SOLVEIG ▬ Plato ?
PLATO,
sur la défensive ▬ Quoi ?
SOLVEIG ▬ Tu… Ne devrais pas être comme ça avec lui.
PLATO ▬ Mais regarde ce qu’il fait ! Il est devenu fou !
SOLVEIG ▬ Je… Je crois qu’il essaye de surmonter son chagrin…
PLATO ▬ Il a y a de meilleures façons de le faire !
SOLVEIG,
sarcastique ▬ La tienne, par exemple ?
PLATO,
énervé ▬ Laisse tomber tu veux. Je n’ai pas envie de me disputer avec toi.
SOLVEIG,
s’approchant de lui pour l’étreindre ▬ Moi non plus… Calme-toi.
PLATO,
se laissant faire ▬ Ne parles pas de lui ou de maman à l’école.
SOLVEIG,
comprenant ▬ Très bien. Je n’en parlerais pas.
Plato reste dans son étreinte, se mettant à sangloter sans un mot. Ils restent là, seuls.INTERLUDE NARRATIF
C’est le soir de Noël. Le premier Noël sans Veronika. Plato rumine sur ses pensées. A l’école, il se cache. Il ne veut pas qu’on sache pour sa mère. Il ne veut pas de la pitié des autres. Mais il se cache en se montrant superficiel, et parfois méchant. Il veut être populaire, ça le change de ses idées noires.
Soudain une brume apparaît. Une brume qui rapidement prend la forme d’un lion blanc. Plato ne le remarque que lorsqu’il rugit et parle dans sa tête. Surpris il se lève d’un bond. Des pas rapides se font entendre dans l’escalier. Rubis, une amie de la famille, viens le chercher. Il se passe des choses étranges en bas, lance-t-elle avant de s’arrêter devant le lion qui lui fait face. Elle pousse un cri avant de redescendre sans demander son reste. Plato, n’ayant rien compris de la scène, est perdu. Jusqu’à ce que Lazuli lui explique. Déjà, Lazuli. C’est le premier nom auquel il a pensé, malgré les années passées. Son patronus, non mécontent de ce nom l’adopte rapidement. Ils descendent, car d’autres cris de surprises se font entendre. Finalement, ce Noël sortirait de l’ordinaire, grâce à l’apparition de ces patronus.