[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]nothing burn like the cold ○ Un rayon de soleil dans l’obscurité. Voilà ce qu’était Michaela Cheshire-Brown en voyant le jour. Mais la lumière a-t-elle réellement sa place dans des personnes vouées aux ténèbres ? Non, bien sûr que non. Cependant, personne ne choisit d’où il vient. Mais on peut toujours choisir où nous allons. Et ce, même si les personnes sont nombreuses à essayer d’éteindre cette flamme qui nous anime.
***
« Dis, comment tu t’appelles ? »Des joues rondes, une bouille douce, des fossettes sur les joues. Michaela offrait à cet enfant inconnu, qui devait à peu près avoir son âge, le plus beau des sourires. Elle était jeune, insouciante. Elle subissait sa famille sans se rendre compte que leurs règles étaient inhumaines, sans se rendre compte que leurs opinions étaient beaucoup trop dures envers certaines personnes. Non. Michaela était une petite fille joyeuse. Michaela était une petite fille qui courait après les papillons et qui revenait dans la demeure familiale les genoux égratignés et plein de boue. Elle vivait la vie comme chacun devrait la vivre ; cependant, fille de parents trop protecteurs et conservateurs, elle ne voyait que trop peu de monde. Trop peu d’enfants de son âge.
« Elias. Et toi ? » lui répondit-il.
Michaela jeta un regard à sa mère, occupée à regarder les étalages de livres chez Fleury et Bott, avant de finalement se retourner.
« Michaela. » dit-elle à son tour.
« Michaela Cheshire. »Elle était jeune. Elle avait sept ans. Elle ne savait pas que son nom était connu dans tout le monde des sorciers, elle ne savait pas que son père était un homme froid et dur envers les personnes qu’ils dirigeaient au Ministère. Insouciance. Mais n’est-ce pas la définition même de l’enfance ? A cet âge-là, nous sommes naïfs. Naïfs au point de tout pardonner.
« Est-ce que tu… » poursuivit-elle.
Mais elle ne termina jamais sa phrase. Elle s’interrompit même au moment où elle aperçut sa mère se diriger vers eux, furibonde.
« Michaela ! » s’exclama-t-elle avant de prendre sa fille par la main.
« Arrête. » La petite fille haussa tout simplement les épaules ; elle discutait avec un enfant de son âge. C’était tout. Mais, trop impressionnée, elle ne répondit rien, et se contenta d’observer sa maternelle avec des yeux ronds, alors que celle-ci la trainait déjà par le bras, loin de Fleury et Bott, loin d’Elias, le premier contact avec un enfant de son âge qu’elle avait pu avoir.
« Je te l’ai déjà dit cent fois ! Il ne faut pas parler aux inconnus. Et surtout pas à ce garçon. » sermonna sa mère.
« Sa mère est une moldue. Ne recommence plus jamais ça, compris ? »Michaela hocha imperceptiblement la tête.
« Oui, maman. »Mais était-elle vraiment d'accord, sur le fond ? Trop jeune, elle était trop jeune.
***
Valentina. Valentina. Valentina. Plus les deux sœurs grandissaient, plus Michaela disparaissait lentement dans l’ombre de sa sœur. Cela empira avec l’arrivée des deux jumeaux, alors que la demoiselle allait fêter ses neuf ans. Elle fût l’enfant oubliée. La gamine qu’on n’avait jamais voulue. La petite fille perdue dans son monde, dans sa joie et sa bonne humeur, dans cette énergie débordante que personne ne réussissait à canaliser. On laissait Michaela dans son coin. On la laissait avec ses rêves imaginaires et ses rires incessants. On la laissait et on s’occupait de sa grande sœur répartie à Serpentard ; on la laissait et on s’occupait de ses deux petits frères, encore nourrissons.
Mais à cette époque, Michaela était encore joyeuse. A cette époque, Michaela pardonnait encore facilement et n’avait pas l’impression que tout cela était une injustice. Elle vivait la vie. Elle vivait la vie parce qu’elle se rendait compte que cela était le plus important, au fond.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]fear cuts deeper than swords ○ Ce fût au moment où elle alla à Poudlard que Michaela se rendit compte de l’ampleur des idéaux de ses parents. Qu’elle se rendit compte de tout ce qui aurait dû lui sauter aux yeux. De la cruauté que pouvait bien avoir sa famille. En arrivant, elle avait déjà une réputation, un chemin tout tracé par sa sœur de deux ans son aînée. En arrivant, elle avait déjà une image qui lui collait à la peau alors que cela était son exact opposé. Elle était arrivée là, mais elle ne connaissait rien à la vie. Elle était arrivée là, mais elle n’avait eu aucune idée de la réalité.
***
« Cheshire-Brown, dehors ! » vociféra la voix du professeur de métamorphose.
Michaela ne fût guère impressionnée par ce haussement de ton, mais ne bougea pas d’un seul millimètre pour autant. Calme, posée. Elle essayait - en vain - de ranger le petit sourire d'amusement qui pointait sur le bout de ses lèvres.
« Monsieur, je vous jure, c’est la souris qui… » commença-t-elle à expliquer calmement.
Mais, même dans une situation comme celle-ci, Michaela peinait à perdre son ton plein d’entrain. Agacé, mais prenant également sa manière de parler comme de la provocation pure, le professeur de métamorphose pointa du doigt la porte de la classe.
« Dehors ! « répéta-t-il sur le même ton.
« Et vous aurez une heure de retenue. Je ne veux plus vous voir pour le restant de l’heure. »Jackpot pensa Michaela en rassemblant ses affaires et se faufilant parmi les rangées d’élèves, occupés à la fixer avec amusement. Elle se retrouva à l’extérieur, et se dirigea vers sa salle commune. Non, visiblement, essayer de lancer un
immobilus sur la souris qui lui servait de cobaye n’avait pas été une bonne idée ; la pauvre bête s’était alarmée, et avait commencé à courir dans toute la pièce sans que personne ne puisse réussir à l’attraper, provoquant un bazar pas possible.
Tout cela à cause de quoi ? Un stupide sort. Un stupide sort qu'elle avait voulu jeter rien que pour voir ce que cela ferait. Elle était servie.
Michaela et ses idées. Ses parents allaient encore finir par recevoir un courrier narrant toutes ses prouesses durant les cours ; mais qu’en avaient-ils réellement à faire, au fond ? Rien, rien du tout. Comme à chaque fois. Au moins, ici, on lui portait de l’attention. Les professeurs ne faisaient pas comme si elle n'existait pas ; elle préférait se faire crier dessus plutôt qu'ignorée.
Bon, certes. Valentina se faisait toujours un plaisir à la rabaisser. Mais Valentina restait Valentina. La fille parfaite. La fille qui n'a rien d'autre à faire hormis critiquer ce commun des mortels auquel elle n'appartient pas.
« Michaela ? » fit une voix derrière elle.
La jeune femme fit volteface et fronça les sourcils. Elle ne connaissait pas l’individu qui venait de l’interpeler, mais elle s’approcha tout de même, regardant autour d’elle si elle était bel et bien la personne concernée.
« Elle-même. » répondit-elle avec un sourire.
« On se connait ? »Le garçon se mit à rire doucement. Oh, oui, bien entendu qu'elle l’avait déjà croisé à plusieurs reprises dans la salle commune. Elle pouvait presque affirmer avec exactitude qu’il avait un an de plus. Qu’il était en cinquième année. Et que, mon Dieu, il avait un sourire renversant. Cependant, ils ne s'étaient jamais adressé la parole. Jamais. Elle n'avait jamais imaginé, non plus, qu'il cherche à lui parler un jour.
« Je m’appelle Elias. »***
Elias. Elias. Elias. Une explication, des excuses vis-à-vis l’idéologie de sa mère. Des retrouvailles de gamins trop tardives, de gamins qui, en quelques phrases, s’étaient promis une amitié. Un meilleur ami, un confident, un partenaire de bêtise.
Un garçon qui a une mère moldue. Mais qu’importe ? Ce fût à cette époque, alors qu’elle était âgée de quatorze ans, que Michaela finit par complètement se détacher de sa famille… Et arrêter d’espérer. Espérer qu’il puisse changer. Espérer qu’ils finissent par l’aimer.
Ce fût également à ce moment-là qu’elle se considéra Brown, et non plus Cheshire.
Elle ne voulait plus rien avoir avec les Cheshire.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]nothing burn like the cold ○ Michaela abandonna complètement le nom
Cheshire au fil du temps. Elle arrêta d’essayer d’attirer l’attention sur elle auprès de ses parents : elle passait la plupart de ses étés à veiller sur ses petits frères et à s’allonger dans l’herbe pour observer le ciel et rêver. Elle se disputa à nombreuses reprises avec ses parents vis-à-vis d’Elias ; puis, au bout d’un moment, cela finit par se tasser. Michaela était une ratée, après tout. Michaela était une honte, une erreur, une personne qui n’aurait pas dû exister. Un enfant qui aurait mieux fait d’être mort-né. Cependant, ils ne luttèrent pas contre cela. Ils ne luttèrent pas contre ce qu’elle était.
Et rien que pour cela, elle leur était reconnaissante. Vivre avec leurs idées étaient déjà dur ; cependant, savoir qu’ils la laissaient penser ce qu’elle voulait la rassurait. La réconfortait. Lui rendait la tâche d’être une Cheshire malgré tout beaucoup plus facile.
***
« Où étais-tu, Michaela ? »Michaela entendit la voix de sa mère s’élever, alors qu’elle tentait en vain de rentrer le plus discrètement possible. C’était raté. Pourtant, elle avait tout mis en œuvre pour ne pas se faire entendre.
« Ah, tu me vois maintenant ? » demanda-t-elle avec surprise.
C’était de la provocation, mais son sentiment d’injustice se faisait beaucoup trop grand. A croire qu’elle était un véritable fantôme dans sa maison, elle avait cru que disparaître le temps d’une après-midi n’allait pas se faire voir. Elle avait cru que disparaître n’aurait rien changé au quotidien de sa mère, de son père, de sa sœur. Mais elle avait été idiote. Sa mère s’en était rendu compte : il n’y avait eu personne pour canaliser les petits derniers, les jumeaux hyperactifs. Parce que, après tout, Michaela n’était bonne qu’à ça : veiller sur ses petits frères qui prenaient exactement la même voie qu’elle.
Sa mère s’approcha d’elle et la gifla. Son regard était froid. Son air déterminé. Il n’y avait aucune trace de peine ou de pitié, non.
« Je t’interdis de me parler sur ce ton. » répliqua-t-elle.
« Et je ne me répèterais pas : où étais-tu ? »Michaela ne broncha pas. Elle se fichait des baffes, elle se fichait que sa mère puisse être en colère. Pourquoi s’inquiéter de ce que peut bien penser une personne qui nous rejette ? Sa mère n’en valait pas la peine. Désormais, Michaela le savait.
« J’étais avec Elias. T’es contente? »Madame Cheshire eut un air pincé.
« Le petit Eastwood ? »Michaela leva les yeux au ciel. Cela ne l’étonnait même pas. Elles s’étaient disputé des centaines de fois à son sujet, mais sa mère était bien incapable de retenir son prénom ; cela était la preuve même de toute l’importance inexistante qu’elle donnait à sa fille.
« Lui-même. » répondit-elle, avant de pousser un petit soupir.
« Je peux y aller maintenant ? »Elle n’attendit pas de réponse pour esquisser un pas en avant. Mais sa mère n’était pas de cet avis-là. Elle la rattrapa par le bras, menaçante, sur le point de dire quelque chose.
Michaela vit brûler dans ses yeux de la haine. Une profonde et inébranlable haine pour ce que sa fille était, pour les fréquentations qu’elle avait.
Elle était une Brown. Elle avait le cœur pur des Brown. Elle était tout ce qu’elle-même aurait dû être. Elle était tout ce qu’elle détestait. Mais Michaela se fichait bien, désormais, de tout ce que sa mère pouvait bien penser. Alors, avant que celle-ci ne puisse dire quoi que ce soit, Michaela s’approcha de son visage.
« Tu ne me fais pas peur. » articula-t-elle avant de se dégager le bras.
Le lendemain matin, elle était partie.
***
Michaela. Michaela. Michaela. Cheshire, Cheshire-Brown, Brown. Elle ne revit plus ses parents depuis ce jour de ses dix-sept ans, depuis ce jour où elle était partie sans se retourner. Sa famille ne chercha pas à reprendre contact avec elle, sa soeur l'ignora complètement une fois à Poudlard. Michaela, elle, avait trouvé domicile chez ses cousins. Chez les Brown. Chez des personnes comme elle, chez des personnes avec les mêmes idées qu’elle. Chez des personnes qui l’aimaient pour ce qu’elle était.
Michaela. Michaela. Michaela. La joie de vivre. Téméraire. Tête-brûlée. Elle est un numéro à elle toute seule, cependant, elle a la fierté de pouvoir affirmer une chose : elle vit.
Elle vit.