You're not a sad story.
001. La maison de Grand-Père regorgeait de trésors merveilleux et pour cause, il était antiquaire. Il occupait sa retraite en partant à la recherche d'objets rares et précieux, s'absentant pendant plusieurs semaines ou plusieurs mois selon les lieux où il dénichait ses trouvailles. Grand-Mère quant à elle avait une passion très différentes : les plantes. Dans leur jardin, il y avait une serre qui contenait une gamme impressionnante de plantes plus ou moins magiques, plus ou moins rares. J'aimais aller dans cet endroit humide à l'atmosphère lourde, légèrement étouffante. L'air sentait l'humus à plein nez si bien qu'en entrant en ces lieux, on pouvait se croire en pleine forêt, loin de toute civilisation. C'est très exactement ici que je me découvris également une passion pour les plantes. Certains spécimens m'intriguaient. Depuis tout à l'heure, j'étais en train d'observer une plante d'un aspect pour le moins curieux. C'était une plante au cœur d'un rouge éclatant. Elle était dotée de deux lobes verts, surmontés de piques. Elle était ouverte et semblait attendre quelque chose qui ne tarda pas à arriver. Attirée par les couleurs chatoyantes du végétal, une mouche s'était posée sur le cœur rosé. Les lobes – qui faisaient vaguement penser à une coquille de moule - se refermèrent sur l'insecte. Je me reculai vivement, sans doute par peur d'être mangée. Liliane – c'était le nom de ma grand-mère – s'approcha de moi, alertée par mon brusque mouvement de recul. «
Qu'est-ce que c'est ? » demandai-je en désignant la plante que je venais de voir en pleine action. «
C'est une dionée attrape-mouche. » expliqua-t-elle tandis que je glissais un nouveau regard suspect vers la plante. «
C'est une plante carnivore. » Elle avait tapé en plein dans le mille. J'avais voulu toucher cette plante mais savoir qu'elle mangeait de la viande m'avait considérablement refroidie. «
Et ça peut manger des êtres humains ? » demandai-je en fronçant un sourcil perplexe. J'imaginais déjà ce bébé-plante devenir immense, suffisamment grand pour gober des êtes humains exactement comme elle venait de gober cette mouche. Liliane pressa mon épaule affectueusement. «
Non, chérie, elles ne mangent que des insectes. » Beurk, des insectes, quel drôle d'idée. «
Et il existe d'autres plantes carnivores dans le monde, mamie ? » L'aïeule hocha la tête. «
Tu as par exemple la rafflésie qui se trouve en Malaisie. C'est une énorme fleur à cinq pétales qui peut avoir jusqu'à un mètre de diamètre et peser jusqu'à dix kilos, presque autant que toi tu imagines ? Elle chasse son prochain repas en dégageant une très mauvaise odeur. » J'étais restée légèrement songeuse face à ces données. Comment une plante pouvait-elle peser autant que moi, et être aussi grande qu'un enfant ? Je cessai alors de m'imaginer à quoi pouvait bien ressembler une telle fleur pour m'intéresser à d'autres spécimens. «
Si les plantes t'intéressent autant, j'ai quelques mandragores à rempoter, ça te dirait de m'aider ? » Je détournai alors mon attention de la dionée pour regarder ma grand-mère. «
J'adorerais. » Elle m'adressa un sourire bienveillant avant de se diriger vers le fond de la serre, où il y avait un établi. Sans que je comprenne pourquoi, elle me tendit une paire de cache-oreilles. «
Pourquoi on doit mettre ce casque, mamie ? » questionnai-je, tandis que Liliane préparait des pots, des petites pelles et du terreau. «
Le cri de la mandragore peut être mortel pour un être humain. Alors il faut une protection. » Je fronçai les sourcils. Comment une plante pouvait-elle pousser un cri ? Liliane me fit signe de mettre mes cache-oreilles. Je m'exécutai, avant de reproduire les mêmes gestes qu'elle. J'attrapai la mandragore par les feuilles pour l'enlever de son pot en plastique. De stupeur je faillis lâcher la
créature. Au bout des tiges il y avait une espèce de bébé qui hurlait à pleins poumons. Alors, cela fit sens dans ma tête. Heureusement qu'il n'y avait personne dans la serre pour entendre hurler cette créature tout droit sortie de l'enfer. Je le fourrai sans ménagement dans un pot en terre cuite, avant de recouvrir l'horrible fœtus de terreau. Je répétai l'opération autant de fois qu'il y avait de pots à remplacer. Puis, une fois l'ouvrage achevé, Liliane me fit signe de retirer les cache-oreilles. Elle inspecta rapidement ce que j'avais fait, puis elle esquissa un sourire en coin. «
On dirait que tu as la main verte. » Sur l'instant, je ne sus pas ce que ça pouvait bien signifier, mais plus les années passaient et plus j'aimais rester dans cette serre, en compagnie de mamie. Et effectivement il s'avéra que j'avais un certain
feeling avec les plantes, qui étaient fraîches et pimpantes à chaque fois que je m'en occupais. Ainsi se développa mon intérêt envers cet univers si particulier et évidemment, j'avais dans ma chambre une collection de dionées attrape-mouche, qui apparemment se délectait aussi des quelques araignées imprudentes qui s'aventuraient dans les environs.
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002. C'était la fringale qui m'avait réveillée aussi tard. C'était exactement le genre de fringale qu'on ne pouvait ignorer même avec la meilleure volonté du monde. C'était celle qui tiraillait l'estomac et qui nous empêchait de nous rendormir. C'était cette petite voix vicieuse qui nous suggérait d'aller chercher quelque chose à manger en catimini alors que tout le monde dormait, ou tout du moins, était supposé dormir. Tout le monde, sauf moi qui avais faim. Pendant longtemps j'ai essayé de me persuader qu'il ne s'agissait que d'une simple vue de l'esprit, que c'était purement psychologique. Je n'avais pas faim, je n'avais pas besoin de manger puisque nous avions dîné à peine trois heures plus tôt. Oui mais voilà, l'auto-persuasion ne fonctionnait pas aussi bien qu'elle aurait dû. En fait, à bien y réfléchir, peut-être même que cette méthode n'était pas vouée à fonctionner, il ne s'agissait que d'une astuce pour rassurer ceux qui prétendaient pouvoir avoir une emprise sur ce genre de besoins irrépressibles. Ni une, ni deux, j'avais repoussé la couette, légèrement agacée, et je m'étais aventurée dans le couloir. Le plancher grinça légèrement sous mon poids. Je grimaçai. Il ne faudrait pas que ma mission commando jusqu'aux cuisines tourne au vinaigre à cause d'un bête grincement de plancher. À pas de loup je descendis les escaliers. Jusque là, tout allait bien, je ne m'étais pas encore fait repérer. La cuisine n'était plus très loin, à seulement quelques pas à peine. Une ombre bougea dans mon champ de vision. Certes, je n'avais pas une vue à trois cent soixante degrés mais du coin de l'oeil, j'avais pu discerner quelque chose. Cela ne faisait aucun doute, je n'étais plus seule. Il me sembla que ça venait du salon, et je devais passer devant la porte du salon pour me faufiler jusqu'à la cuisine. En l'espace d'un instant, je fus tentée de remonter et tant pis pour mon estomac. Cependant, un nouveau gargouillement vint me rappeler à l'ordre. Je n'avais pas le choix. Je devais y aller. J'amorçai un pas en direction de mon eldorado personnel lorsque je fus coupée en plein élan par une vision qui me pétrifia sur place. «
Papa ? » couinai-je d'une toute petite voix en reconnaissant la personne qui était encore debout à cette heure-ci. Et en plus de ça, il n'était pas seul. Une femme brune – plutôt superbe – l'accompagnait, vêtue d'un tailleur. «
Quinn, qu'est-ce que tu fais encore debout ? » Le ton de sa voix était moralisateur, comme si au final c'était de ma faute si j'avais vu ce que je venais de voir. «
J'avais faim. » dis-je simplement, dardant mes prunelles sur mon père. «
Je suis descendue pour aller chercher quelque chose à manger dans la cuisine. » Papa soupira. «
On t'a pourtant déjà dit que ce n'était pas bien de grignoter en dehors des repas. » Je jetai un regard circonspect à la femme qui l'accompagnait et qui était en train de lisser son chemisier. Il essayait de me faire culpabiliser pour masquer sa propre culpabilité, c'est ça ? «
Hector, je vais y aller. » dit-elle enfin, ayant très certainement conscience qu'elle était de trop. «
On se voit demain au bureau. » Une collègue de travail ? Je jetai à mon père un regard empli d'incompréhension. Hector la raccompagna jusqu'à la porte. Lorsqu'il eut refermé le battant derrière elle, Hector se tourna vers moi, avec gravité. «
Je ne sais pas ce que tu as vu, ou ce que tu as cru voir, mais tu ne dois en parler à personne, compris ? » Je pris alors pleinement conscience de ce qu'était un secret, un vrai de vrai, pas du même genre que celui qu'on raconte à sa meilleure copine à propos de je ne sais quelle amourette d'enfance. «
et pourquoi je ne dois pas en parler à qui que ce soit ? » demandai-je avec défiance. «
Il pourrait y avoir des conséquences. » Je jetai à mon père un regard déçu. Puis, sans faire le moindre détour par la cuisine, je montai les escaliers quatre à quatre pour monter dans ma chambre, avant de m'enfermer à clé. Au diable la fringale qui m'avait réveillée, la scène à laquelle je venais d'assister venait de me couper l'appétit.
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003. Pendant longtemps, j'avais tenu parole. Je n'avais rien dit à personne malgré ma grande bouche. Pourtant, ce secret que je gardais sans rien avoir demandé à personne continuait à me ronger.
Oublie Quinn, oublie. Après tout, tu t'appelles aussi Letha, oublier, tu devrais être douée pour ça. Je n'oubliais pas. Impossible. Mon esprit avait enregistré chaque seconde de ce sordide spectacle. Je ne pouvais pas oublier, malgré la meilleure volonté du monde. Je ne pouvais pas me retrouver dans la même pièce que mon père sans avoir la nausée, je ne pouvais plus soutenir son regard. Je m'étais même résolue à l'appeler par son nom.
Hector. Il n'y a que de cette façon qu'il existait à mes yeux. Il n'y avait pas plus impersonnel que d'appeler mon père par son prénom. Même l'appeler
père comme c'était le cas dans les milieux huppés reviendrait à reconnaître notre lien de parenté.
Géniteur serait un terme sans doute plus approprié. Pourtant, il continuait à faire comme si de rien n'était. Son attitude était détachée, presque je m'en foutiste. Le cœur au bord des lèvres, je le regardais embrasser ma mère lorsqu'il rentrait du travail. Et bien sûr, il y avait tous ces cadeaux qu'il m'offrait, comme s'il pouvait acheter mon silence de cette façon. Parmi tous ces présents, il y avait ce vélo flambant neuf qui m'attendait, prêt à être essayé. J'avais regardé l'engin avec circonspection, pas vraiment décidée à rentrer dans son jeu. On ne m'achetait pas avec des babioles, ce n'était pas ainsi que je fonctionnais. S'il avait seulement pris la peine de me connaître, il le saurait. «
Tu devrais l'essayer. » dit finalement Robbie, mon frère. «
Tu n'as qu'à l'essayer toi. » rétorquai-je avec humeur, non sans le fustiger du regard. «
Je suis un peu grand pour aller dessus. » fit-il remarquer. «
Je ne comprends pas ce que tu as contre ce vélo, il est très bien. » Bien sûr qu'il ne comprenait pas. Était-il seulement au courant de ce qui se tramait dans notre dos à tous ? Ça m'étonnerait fort, car une telle histoire pourrait faire tomber Hector du piédestal en haut duquel son fils unique et préféré l'avait hissé. «
Ce n'est pas un complot destiné à m'éliminer? » demandais-je avec sarcasme, bien décidée à faire ma mauvaise tête. Le vélo me faisait de l'oeil, mais plutôt mourir que de l'avouer. «
Quinn, il va falloir que tu te décides, on n'a pas toute la journée. Et papa serait déçu que tu ne l'essaies pas. » Je levai les yeux au ciel avant d'enfourcher l'engin. J'avais fini par céder, bon gré, mal gré, de toute façon je n'avais pas le choix, ils semblaient s'être ligués contre moi. Que faire d'autre à part obéir ? Je commençai alors à pédaler tant bien que mal. «
T'es sûr qu'il n'est pas piégé ? » haletai-je sous l'effort tandis que je zigzaguais, incapable de donner à ce foutu vélo une trajectoire rectiligne. «
Mais non ! Des gens en font tous les jours pour aller travailler et ils en sont pas morts ! Et puis, la gravité fait très bien les choses, ne t'inquiètes pas pour ça. » Blablabla. Tu parles d'un argument convaincant. En attendant, je zigzaguais toujours. «
J'emmerde la gravité ! » lançai-je alors, dépitée. «
Et apparemment c'est réciproque. » Je me mis à pédaler rageusement, avançant tant bien que mal et à peu près droit. Malheureusement, je ne maîtrisais pas encore totalement la chose puisque je heurtai de plein fouet un pot de fleurs qui était disposé le long de la terrasse. Le décor tangua sous mes yeux et je tombai au sol, sur le dos. Le souffle coupé, je regardais le ciel, attendant d'être moins sonnée pour pouvoir me relever. «
ça va ? » demanda Robbie, en me tendant une main pour m'aider à me mettre debout. «
Ouais, ouais, en fait je me dis que j'aurais dû écouter mon intuition première, c'est à dire ne pas monter sur cette chose tout droit sortie des enfers! » Et avec tout ça, je m'étais écorché le mollet, et je saignais. Et le pot n'avait pas fait longs feux puisqu'il s'était brisé en deux. « Et bien ! » dis-je d'un air épaté. «
On dirait que j'ai remporté le gros lot ! » Robbie avait d'ores et déjà détourné son attention de moi pour se focaliser sur le vélo dont la roue avant était complètement tordu. «
Bizarre. » marmonna-t-il. «
Ce n'est pas avec un choc d'une si faible intensité que la roue aurait pu se plier. » Mon regard tomba alors sur le pot de fleurs pour lequel personne ne s'inquiétait. Quelle ne fut pas ma surprise en réalisant que la terre cuite s'était reconstituée par elle-même. «
Robbie... » dis-je, espérant capter l'attention de mon frère. «
Le pot de fleurs...il s'est réparé tout seul. » Il s'interrompit, légèrement interloqué. «
Tu es sûre qu'il était cassé et que tu ne l'as pas seulement bousculé ? » Je hochai la tête de droite à gauche avec véhémence. «
Puisque je te dis qu'il était pété ! » Un sourire gonflé d'autosatisfaction vint se plaquer sur mes lèvres. «
Et que Dieu m'en soit témoin, aujourd'hui, je suis une sorcière. » Il était inutile de préciser que le reste de la famille était aussi concerné par la magie et que j'étais la dernière qui attendais avec impatience que mes pouvoirs se révèlent. Mes pouvoirs avaient mis tellement de temps à se manifester que pendant longtemps j'avais eu peur de n'être qu'une cracmol, ces enfants de sorciers sans la moindre magie dans leurs veines mais force est de constater que ce n'était pas le cas. J'étais officiellement une des leurs et ils ne pouvaient pas m'ignorer.
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004. En cette saison, les températures extérieures étaient plutôt fraîches, pour ne pas dire légèrement frisquettes. Comme si cela ne suffisait pas, il tombait un fin crachin depuis tout à l'heure. C'était exactement le genre de pluie désagréable qui se faufilait partout et qui griffait la peau. Comble du comble, le crachin se transforma bientôt en une averse digne de ce nom. En quelques instants mes longues mèches rousses furent trempées et mes vêtements me collaient au corps. Bien sûr, il n'y avait aucun endroit susceptible de faire office d'abri de fortune. J'étais condamnée à subir cette douche à ciel ouvert en attendant que ça se calme. Ma journée d'école s'était achevée il y a un petit moment déjà. Mes parents voulaient me mettre dans une école primaire moldue car ils voulaient que je sois parfaitement capable de naviguer entre les deux mondes. Au moins, ils avaient le mérite d'être ouverts sur la question, ils n'étaient pas du genre à rejeter les moldus parce qu'ils n'avaient pas de pouvoirs. Ma famille se fondait parfaitement dans la masse, si bien que nos voisins ne se doutaient même pas que l'on puisse être des sorciers. Nous étions en apparence sans histoires, enfin, ce n'était qu'une apparence puisque la réalité était toute autre. Une fois de plus, j'attendais sous la pluie battante à la sortie de l'école parce qu'on avait oublié de venir me chercher. Mes parents s'étaient très certainement laissés accaparer par leurs boulots respectifs si bien qu'il ne leur était même pas venu à l'esprit de venir me chercher. Ce jour là, ce fut Robbie qui me récupéra. Il ne s'excusa même pas d'être en retard. Je m'assis à l'arrière du véhicule et posai mon cartable sur la banquette arrière. Quelques minutes passèrent, avant que je ne vienne rompre le silence. «
Dis, je peux te parler de quelque chose ? » Robbie acquiesça légèrement, tout en restant concentré sur la route. «
Je crois que papa a une liaison. » dis-je de but en blanc, sans prendre de gants. À l'avant, je vis que Robbie s'était crispé. «
Tu crois ou tu en es sûre ? » questionna-t-il, plutôt âprement. «
J'en suis sûre, je les ai vus ! » Robbie tiqua. «
Qui ça ? » je me mordillai la lèvre inférieure. «
Une femme qu'il voit au bureau...elle est brune. » Je baissai alors les yeux, venant tout juste de prendre conscience de la bombe que j'avais lâchée. «
Veronica ? » en déduisit-il, les mains crispées sur le volant. «
Je ne sais pas, il a pas dit son nom. Et elle ne s'est pas présentée. » Je me fichais bien qu'elle s'appelait Veronica, Tatiana ou Tartempion, tout ce que je savais, c'était que cette femme n'était pas maman. «
Tu mens » accusa Robbie, la mâchoire serrée. «
C'est encore des histoires que tu racontes pour faire ton intéressante ! » J'accusai le coup sans sourciller, même si j'avais envie de hurler, de m'insurger de tout mon corps, de toute mon âme. «
Je les ai vus, l'autre soir. Et ils s'embrassaient sur la bouche. » J'avais envie de me ratatiner sur mon siège, effrayée par les ondes de fureur que Robbie dégageait. Il donna un violent coup de volant sur la gauche. La voiture zigzagua légèrement. Je me crispai. De là à ce qu'on ait un accident il n'y avait pas loin. «
Tu ne te rends pas compte. » lâcha-t-il, durement. «
C'est pas le moment de raconter n'importe quoi ! Ce n'est pas un jeu! C'est exactement le genre d'histoires qui pourraient ruiner notre famille tu le comprends ça ? Apparemment non, puisque tu viens porter ce genre d'accusations la bouche en cœur, comme si c'était une broutille ! » Les larmes me montèrent aux yeux. Il ne me croyait pas ! Pire, il refusait d'entendre quoi que ce soit.
Déni, déni. ça faisait des années que je vivais avec ça sur la conscience, et j'étais fatiguée de mentir, ce fardeau était trop lourd à porter pour mes frêles épaules. Je pensais que Robbie était tout à fait apte à m'aider mais force est de constater que ce n'était pas le cas, que c'était loin d'être le cas. «
Je te jure Quinn, il faut vraiment que tu arrêtes de raconter des histoires. Parce que si jamais ça arrive aux oreilles de maman et qu'il y a des histoires, tu en seras responsable. C'est toi qui te diras que tu aurais dû tenir ta langue. Ça sera de ta faute ! » Je n'attendis pas que la voiture s'arrête totalement devant la maison pour en sortir. Je jaillis du véhicule comme une fusée. Maman venait d'ouvrir la porte de la maison mais je ne pris même pas la peine de la saluer que déjà je montais les marches de l'escalier quatre à quatre pour regagner ma chambre. Je m'y bouclai à double tour avant de m'effondrer dans mon lit, le visage enfoui dans mes oreiller pour y pleurer tout mon saoul.
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005. Mon entrée à Salem se déroula sans encombres. Tranquillement, je suivais mon petit bonhomme de chemin, me contentant simplement de décrocher les meilleures notes possibles. Cela passait obligatoirement par des heures de travail acharné à la bibliothèque. Je ne faisais pas partie de ces personnes qui vivaient recluses, je ne faisais pas partie des plus populaires, j'avais simplement mon groupe d'amis que je fréquentais depuis le tout début, et je n'avais rien besoin d'autre. Pendant longtemps, j'ai vécu ainsi, sans en exiger davantage. Et il y a eu ce garçon. Ce garçon que j'avais dans ma ligne de mire depuis de nombreux mois. Ce
crush était resté inavoué, j'étais bel et bien déterminée à emporter ce secret avec moi jusque dans la tombe. C'était sans doute un poil exagéré car à notre âge, les amours vont et viennent, volages et éphémères mais je me connaissais, je savais très bien que la honte me consumerait si jamais tout ceci venait à être déballé au grand jour. Je me contentais donc de l'observer de loin, planquée derrière un livre ou dissimulée à moitié derrière une statue. Je feignais de ne pas le voir lorsqu'il passait à proximité. Je le regardais discuter avec d'autres filles avec envie, désirant ardemment qu'il me trouve cool moi aussi. Pourtant, je n'étais pas franchement cool. Pas cool comme ça, en tout cas. Et ce fameux jour arriva. Les circonstances finirent par nous rapprocher d'une façon pour le moins inattendue. J'étais en train de lire un livre, assise en tailleur sur le ponton qui s'avançait loin dans le lac qui jouxtait notre école. Le vent avait commencé à se lever, soufflant quelques bourrasques de temps à autres. Ce qui devait arriver arriva. Le chapeau que je portais pour me protéger des rayons du soleil s'envola. Mon seul réflexe fut de tenter de l'attraper. Ma tentative s'avéra infructueuse, à tel point que le chapeau se posa quelques mètres plus loin...sur l'eau. Je tentai plusieurs moyens pour le récupérer. Je m'étais tout d'abord allongée de tout mon long sur le ponton, mon bras n'était pas assez long, et bien évidemment je n'avais pas pris ma baguette magique, jugeant que je n'en aurais probablement pas besoin. Un accio, et tout aurait été réglé. Je m'approchai de plus en plus du bord pour gagner quelques malheureux centimètres. Puis soudainement, je basculai la tête la première et fis un plongeon involontaire dans l'eau froide du lac. Tout se passa très vite. Ma panique fut tellement intense que je ne parvins pas à me raccrocher au ponton alors que je n'en étais vraiment pas loin. Je ne savais pas nager, aussi je battais des bras pour tenter de rester à la surface mais c'était inutile car ce faisant, je me fatiguais très rapidement. En plus, j'avalais de l'eau. Tout allait de travers. Je perdis bientôt connaissance alors que je coulais, inexorablement. Lorsque je repris enfin conscience du monde qui m'entourait, j'étais en train de recracher de l'eau, prise d'une soudaine quinte de toux. Tandis que je grelottais, quelqu'un passa une cape autour de mes épaules. La tête me tourna quelques instants. «
Merci. » parvins-je à souffler entre deux quintes de toux, à l'attention de mon mystérieux sauveur. «
De rien. » répondit une voix masculine. Je tournai alors la tête. Je le reconnus. Mon cœur fit une embardée dans ma poitrine.
Lui. il avait cet air inquiet dans le regard, mais progressivement, le soulagement prenait le pas sur tout le reste. Prise d'un élan venu de je ne sais où, confus mélange entre ma reconnaissance et les sentiments que j'éprouvais déjà pour lui, je vins presser mes lèvres contre les siennes. Tout d'abord surpris – un baiser en guise de remerciement, en voilà une idée ! - il se laissa faire. C'est ainsi que pour la première fois, j'embrassais un garçon. Lorsque ce fut terminé, je plantai mes prunelles dans les siennes «
Tu m'as sauvé la vie. » Je ne mesurais encore pas bien ce que ça signifiait, surtout que dans le monde magique, sauver la vie de quelqu'un prenait une toute autre signification. «
Je passais par là par hasard, voilà tout. » déclina-t-il, faussement modeste. Je lui souris maladroitement, sourire auquel il répondit par un sourire tout autant maladroit. Nous restâmes ainsi quelques instants, lui avec ses bras autour de moi, me frictionnant doucement pour que je puisse me réchauffer.
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006. «
Non. » dis-je en éloignant ses mains de moi. «
Quinn... » grogna-t-il, tandis que je me disais que je venais sans doute de remporter la palme d'or de la fille la plus ennuyeuse de tout l'univers. «
Je ne suis pas prête pour ça. » Et voilà que je venais de mettre les pieds dans le plat. Décidément, il y a des fois où je ferais mieux de me taire, à défaut de pouvoir présenter les choses un peu plus délicatement, dirons-nous. «
Tu ne me désires pas ? » Quelque part, heureusement qu'il faisait noir car il ne me vit pas baisser le regard, ni mon expression perplexe. À dire vrai je ne m'étais jamais posé la question, enfin, pas sous cet angle-là. «
Je... » Mince alors, il avait réussi à me couper le sifflet, je ne savais vraiment pas quoi répondre, moi qui d'ordinaire avais toujours réponse à tout. «
Je ne l'ai pas encore envisagé. » répondis-je finalement, décidant d'opter pour la stricte vérité – de toute façon, je n'étais pas une bonne menteuse, il aurait vite fait de se rendre compte que quelque chose clochait. «
Allez ! » dit-il, incrédule. «
Ne me dis-pas que tu n'as jamais eu envie de faire l'amour ? » Ah, la délicatesse. Je levai les yeux au ciel. «
Non. » réitérai-je, avec fermeté. «
Ou alors, je n'en ai pas souvenir. » J'entendis Terrence soupirer, un poil agacé. «
écoute Quinn. » J'avais comme qui dirait l'impression que des choses désagréables allaient s'ensuivre. «
ça ne pourra jamais marcher si tu n'es pas entièrement avec moi. C'est tout ou rien, Quinn, ça ne peut pas être la moitié, un quart, ou un tiers. » Je croyais rêver. C'était tout simplement...ridicule. Bien sûr que oui je l'aimais, il avait déjà mon cœur alors que ce n'était pas gagné d'avance, ce n'est déjà pas mal, non ? À croire que ça ne lui suffisait pas. «
Tu ne peux pas réclamer sans donner en retour, Terrence. » dis-je aussitôt, la voix légèrement tremblante. «
Tu ne peux pas exiger de moi d'être entièrement à toi alors que toi... » Ma voix vacilla. «
Tu n'es même pas capable de t'impliquer à cent pour cent dans notre relation. » «
Que veux-tu dire ? » dit-il, assez sèchement. «
Je sais qu'il y en a une autre. Il y en a toujours eu une autre. » «
Qui ? » «
Lois. » Le prénom de son amie anglaise flotta pendant longtemps entre nous. Je n'étais pas dupe, j'avais bien compris qu'il ressentait quelque chose de fort pour elle, quelque chose qui faisait obstacle à l'épanouissement de notre couple. «
Tu dis n'importe quoi. » grogna-t-il, tandis que j'étais persuadé d'avoir touché en plein dans le mille. Il niait pour la forme. «
Je sais que j'ai raison. » Je sentis Terrence remuer non loin de moi. La porte du placard grinça sur ses gonds tandis qu'un rai de lumière envahit l'espace exigu. «
où tu vas ? » demandai-je alors, soudainement paniquée à l'idée qu'il m'abandonne. «
J'ai envie de rester seul. » asséna-t-il en s'extirpant du placard à balai. Pourquoi je n'étais pas capable de le retenir, hein, on se le demandais. À croire que je l'avais fait exprès, de saborder ma relation toute seule. Le cœur meurtri, je me laissai glisser le long de la paroi du placard jusqu'à m'asseoir sur le sol poussiéreux, tétanisée, sans réellement comprendre ce qui venait de se passer tant j'avais perdu le contrôle des événements.
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007. (Quinn pleure sur l'épaule de sa vieille amie Presley)
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008. (Quand Quinn comprend que sa mère est au courant pour tout )
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009. (Quand Quinn confronte son père sur ce qu'elle a vu des années plus tôt. )
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010. (séparation des parents de Quinn)
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011. (Quand Quinn s'énerve sur son frère parce qu'il savait et qu'il l'a laissée culpabiliser pendant des années)
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012. (Quand Quinn, encore mineure, décide d'aller vivre avec sa mère qui en obtient la garde )
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013. (Quand la mère de Quinn annonce à sa fille qu'elles partent en Angleterre. )
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014. (Quand Quinn fait ses adieux à ses anciens amis. l)