Tu l'observais, lui, le Gryffondor de six ans ton aîné qui de par son charisme indéniable et sa bonne humeur naturelle parvenait à s'attirer autant de sympathie que d'ennuis au jour le jour. De mémoire d'élève à Poudlard depuis ton arrivée, pas un jour n'était passé sans que tu n'entendes parler de lui. Bartholomew par ci .... Bartholomew par là ... et pya pya pyi et pya pya pya ... Les filles gloussaient sur son chemin -ôtez de la liste les préfètes et préfètes en chef ainsi que les femmes faisant parti du corps enseignant- les sourires se dessinaient sur les lèvres et surtout, les professeurs le connaissaient par cœur non pas pour les bonnes raisons mais au moins ils se souvenaient de lui pour ce qu'il était. Toi tu avais le droit à des "Comment on prononce votre nom ... ah mais oui, les éleveurs de dragons ... La Norvège, c'est ça ? Il neige souvent là-bas ? Comment va votre père ? Il paraîtrait qu'il serait reparti en Norvège n'est-il point ?" alors que tu préférerais entendre "Aksel Ingherneils ! Toujours le premier arrivé, d'ailleurs votre dernière rédaction sur les propriétés et effets secondaires du bézoard était parfaite !" mais il n'en est rien ...

Des héros comme Bartholomew, tu en as eu dans ta vie, à commencer par ton père. Lui, c'est un peu les fondations de ta petite famille. De ses bras musclés et son intelligence à toute épreuve, il parvient à équilibrer parfaitement sur ses épaules sa vie de père et son petit monde de dragons et de responsabilités professionnelles. De tout temps, tu te l'es figuré comme un père aimant, attentif, présent pour ses enfants et ses filleuls et filleules, ses frères et sa sœur et leurs partenaires. Tant et si bien qu'il t'arrivait, lorsque vous étiez petits Hella -autre modèle cher à ton cœur- et toi, de l'observer expliquer à Hella comment fonctionnaient les lettres et les chiffres, ne cherchant surtout pas à la presser et répétant avec elle autant de fois que nécessaire le moindre mot sur lequel elle accrochait. Parce qu'en plus de vous avoir aidé avec l'anglais, il prenait aussi la responsabilité des devoirs et de votre éducation qui, aussi sérieuse qu'heureuse, n'aura laissé que peu d'ombres sur ton enfance. La seule ombre au tableau étant causée par la mort de tante Veronika mais nous y reviendrons plus tard. Ton père, ce héro, lui a toujours cru en toi et t'a toujours soutenu quoi qu’aient pu dire tes petits camarades de classe qui te persécutaient plus que nécessaire faisant de toi un reclus, un petit garçon honteux de ses faiblesses qui n'osait pas trop en dire de peur d'être critiqué ou rabaissé au rang d'intello de service lorsqu'il connaissait la plupart des réponses aux questions posées par le professeur mais que ceux que l'on appelait intellos, eux, se faisaient sévèrement prendre pour cibles une fois la récré venue. Malgré le comportement des autres, tu parvins à te focaliser sur cette figure et ses frères aussi impressionnant que lui.

Ta famille, tu lui vouerais un culte. Ces moments passés en Norvège et ce quel que soit le moment évoqué t'apparaissent comme une bénédiction. Vivre et grandir auprès d'un élevage de dragon, rien de mieux pour s'assurer un feu de cheminée chaque soir de grand froid ainsi, de mémoire d'homme, tu ne t'es jamais souvenu avoir un jour eu froid, hormis le premier automne passé à Poudlard … Les terres d'Ecosse, en plus d'être humides, t'ont réservées de très mauvaises surprises ! Toi qui était habituée à la bouse de dragon pour accueillir tes bottes doublées en poils de mouton faisais à présent face à des étendues semblables à des flaques d'eau. Peu importe où tu mettais le pied, ce dernier était hâpé, attiré vers les bas fonds de cette terre nourricière qui t'accueillait en son sein. Mais toi, son sein, tu n'en avais rien à faire et faisais tout pour ne pas avoir à mettre les pieds dedans. Seulement, lorsqu'il te fallait à toi et à tes petits camarades traverser le parc pour aller en cours de botanique ou de soins aux créatures magiques ou encore assister aux matches de Quidditch sur le terrain officiel, bien perché sur les gradins, tu n'avais pas réellement le choix. La décoration rassurante et la chaleur bienveillante de ta chambre commune ne pouvait représenter le seul environnement au cœur duquel tu pouvais vivre ! Que Nenni !

« Petit-frère, sache que je n'approuve pas du tout ton amitié naissante avec cet idiot de Potter. »

Arquant un sourcil, sentant la commissure de tes lèvres s'étirer à mesure qu'elle progressait dans sa phrase, les joues rougies par l'adrénaline, tu essayais d'accueillir sa réaction avec autant de sérieux que possible mais ta dernière « mission commando » auprès de ton héro du moment avait eu raison de tout et surtout de ton corps qui n'en pouvait plus de rester en place alors que tu venais d'escalader des façades et surfaces glissantes, de courir à travers des couloirs déserts et obscurs, de rouler à terre parce que soit disant c'était « cool et trop discret » et te camoufler dans des recoins des couloirs. Pour une fois dans ta vie, tu avais pris ton pied à outrepasser le règlement et je dis bien « outrepasser » puisque le mot « enfreindre » semble trop radical et sonne trop sèchement à tes oreilles. Alors, face à elle, tu essaies d'adopter un comportement cool, comme Bartholomew l'aurait fait dans une telle situation. Adossé au mur, les jambes légèrement croisées, le sourire béat essayant d'emprunter un semblant de confiance en soi, tu toisais ta sœur comme jamais auparavant et te sentais soudainement con. Disons-le franchement. Toi qui ne t'était jamais rebellé ni n'avait un jour répondu à ta sœur commençais à dépasser les limites. Ton visage perdait de sa superbe à mesure que tu réalisais que tu te perdais. Honteux, tu quittais le mur qui te servait de repose-dos et croisais tes mains contre ton torse en lorgnant le sol du regard. Tu ne voulais croiser le sien de peur d'y lire toute la déception du monde réunie en deux seuls globes oculaires.

« Pardon Hella … »

Furent les seuls mots que tu parvins à prononcer alors qu'elle te faisait la morale sur le comportement de ce rebelle de la forêt interdite qui passait son temps à jouer avec ses nerfs et ceux de ses camarades. Apparemment, être cool était toute une attitude mais toi, tu n'avais pas encore la carrure pour assumer tes bêtises. Finalement, elle te ramena à ta salle commune en te traînant par l'oreille alors que tu t'épandais en excuse lui promettant de ne jamais recommencer … ce que tu ne précisas pas fut que tu ne recommencerais pas tant que Bartholomew ne vienne te chercher pour une nouvelle escapade aventuro-fantastique à travers poudlard.

Mais tout ça, c'était avant le renouveau autrement appelée « la boulette du ministère » qui fit passer de l'état fantomatique ou inexistant les patronus de tous les sorciers de moins de vingt-cinq ans. Et puisque tu n'en avais que quinze, tu ne fus pas une exception à la règle et te retrouvas aveuglé par une présence prenant la forme d'un nuage qui ne quittait pas ton visage.

« Sirrush, arrête c'est pas drôle ! »

Persuadé que ton cousin te jouait encore un tour, tu grognais et essayais de t'orienter, de te repérer alors que vous étiez tous réunis dans cette immense cabane norvégienne à l'ambiance aussi festive qu'inattendue. Vos éclats de rire et discussions étaient entrecoupés par les grognements des dragons à l'extérieur qui soit jouaient, soient dormaient bruyamment ou encore réclamaient l'attention d'un des vôtres. Les bras tendus dans le vide, la démarche peu assurée et maladroite, tu manquas d'écraser de tes bottes devenues étanches et résistances au feu grâce à la magie un des nombreux cadeaux qui trônait sur le sol et qui s'offrait à ton talon qui le manqua de peu. Les adultes commençaient à s'agiter, voyant le moindre des jeunes présents dans la pièce vivre le même événement de nature jusqu'à présent inconnu. Tante Gina avait allumé la radio branchée sur les ondes magiques anglaises juste au cas ou et alors que j'essayais de repousser cette épaisse brume nuageuse, tu te rendais compte qu'il n'y avait rien à faire … Tout le monde s'agitait maintenant. Certains criaient au secours, d'autres restaient parfaitement calme expliquant à haute voix et à qui voulait l'entendre que c'était tout à fait normal et que ça allait s'arrêter dans peu de temps et d'autres, comme toi qui se taisaient et se contentaient de se manger des meubles et éléments du décor. Tu finis par t'agenouiller au sol en guise de protestation peu efficace te disant qu'expérimenter l'aveuglement n'était pas réellement ce à quoi tu t'attendais pour le soir de Noël mais que s'il fallait passer par là pour avoir ses cadeaux, alors tu le ferais sans te rendre ridicule et sans paniquer.

« Excuse-moi , pardon , je ne voulais pas … c'est ça qu'on appelle un nez ? C'est drôlement … solide comme truc … et pas très élastique ... »

Cette voix te semblait familière et pourtant, elle ne provenait d'aucun des corps évoluant au sein de la modeste demeure norvégienne. Au fond de toi, une chaleur bienveillante s'éveillait et tu l'accueillais à bras ouverts … Quoique … Lorsque tu te rendis compte en rouvrant les yeux que l'espèce de nuage était parti et avait laissé place à … une loutre ? Tu l'avais chassée de ton visage ou plutôt avais essayé de la chasser alors qu'elle s'accrochait à ton nez et qu'une petite voix te donnant l'impression d'être sous hélium manifestait son mécontentement dans ton crâne.

« Quelle sorcellerie … »
« Arrête de bouger triple buses ! Tu risques de blesser quelqu'un ou quelque chose à commencer par moi ! Alors cesse de t'agiter … d'essayer de me frapper ou j'appelle 3615 Patronus battu ! »

Ahuri, tu finis par te calmer et laissait cette créature vivre en paix. te toisant méchamment du regard en te faisant part malgré elle de ses pensées plus que révoltantes à l'égard de ton comportement, tu ne pouvais y croire. Pourquoi avait-elle mentionné le mot patronus ? Pourquoi y avait-il une belette et … -LOUTRE DES MERS te reprit-elle ou plutôt IL ne manqua-t-il pas de te corriger- un chien, un écureuil, un loup sur les épaules ou aux côtés de tes cousins et cousines … Ça y est, c'était la fin du monde et elle se manifestait sous la forme d'animaux inoffensifs …

« AÏE, ça t'étais franchement pas obligé ! »
« Tu vas voir si je suis si inoffensif que ça … »

Décidément, entre cette apparition maléfique agressive et toi, rien n'allait pour le moment ! Mais finalement, après plusieurs jours passés à vous côtoyer, vous toiser du regard, vous apprivoiser, vous avez fini par vous apprécier et à communier pour finalement accepter la présence de l'autre puisqu'il n'était là que pour te protéger et toi, tu voulais finalement la même chose pour lui. Tu ne tardas d'ailleurs pas à lui attribuer le nom d'Óláfr en célébrant un baptême bidon auprès d'une flaque d'eau que tu imaginais pure et que tu lui versas sur la tête en récitant des paroles sans aucun sens finissant par clamer haut et fort son nom. Quelle ne fut cependant pas ta surprise en apprenant que ces matérialisations étaient en réalité le fruit d'un dérapage du gouvernement sorcier britannique qui, dans son espoir de mettre un terme aux agissements de celui dont on ne doit pas prononcer le nom, ils avaient doté presque toute la population des moins de vingt-cinq ans magicalement active de patronus-animaux de compagnie. En lisant ces faits dans les journaux et en écoutant la radio retransmettre les nouvelles tous les jours à la même fréquence en espérant peut-être en apprendre plus, tu imaginais quelle aurait été la réaction de Veronika si elle avait encore été des vôtres … Malheureusement, l'élevage de dragons pouvait parfois s'avérer être redoutable et impartiale et alors que tu te souvenais d'elle, cette vision d'horreur de son corps déchiqueté et chahuté dans tous les sens par votre dragon le plus calme te revint à l'esprit … Cette femme si douce, si belle et si sage n'aurait pas eu le bonheur de mettre au monde son troisième enfant ni même de voir ses enfants connaître cette nouvelle bénédiction qui venait de tous vous toucher … Ce fut alors solennellement et pour la première fois que tu te confias sur ce drame auprès d'Óláfr qui, en plus d'être capable de changer de forme pour s'envoler mais pas trop loin, était également une oreille attentive et un très bon confident.

Cette sensation qui te donnait l'impression que lui et toi étiez fait l'un pour l'autre ne cessa de grandir au fil des mois. Ta cinquième année, tu l'avais toujours prise au sérieux mais trop effrayé par tes capacités et le comportement des autres à l'égard des « je sais tout », tu n'osais jamais participer ou prouver au monde entier que tu étais aussi capable qu'un autre de réussir. Jusqu'à présent, tes notes oscillaient entre le « acceptable » et « effort exceptionnel » lorsque tu osais finalement ajouter un peu plus de détail à tes devoirs ou arrivait à formuler correctement un sort qui ne t'aurait pas posé autant de problème si ton rival de toujours ne s'était pas trouvé à côté au même moment. Cependant, avec l'arrivée d'O', comme tu l'appelais maintenant familièrement, tu osais un peu plus. Cette créature mystérieuse finie par te convaincre que tu pouvais réussir à emporter toutes tes BUSES haut la main si tu y mettais du tiens. Après tout, les épreuves de BUSES n'étaient-elles pas moins redoutables que les devoirs en classe où tout le monde n'en faisait qu'à sa tête et pouvait l'ouvrir sans craindre grand chose ? N'était-il pas temps pour toi de t'affirmer d'une façon ou d'une autre ? De rendre fier ton père ? Voici les paroles de patornus qui finirent par te convaincre. T'accompagnant dans tes révisions, te soutenant dans tes entreprises et acceptant d'un commun accord de repousser les limites de la distance séparant un sorcer de son patronus en cas de réussite totale pendant l'été, Óláfr et toi étiez prêts à faire face à toutes les épreuves des BUSES.

« Alors Aksel, tu as passé un bon été ? »
« Comme tous les étés, celui-ci était magique, il faudrait que tu viennes un jour voir les dragons ! »
« Ouais, de toute façon d'ici la fin de l'année on saura tous transplaner alors ça ne sera pas aussi compliqué que d'obtenir un portoloin ! En parlant de réussite … félicitations pour tes Optimal … jamais je n'aurais cru te voir autant réussir et loin de moi l'idée de vouloir t'insulter mais c'est pas comme si tu avais toujours été le premier de la classe …»

Souriant en coin, tu accompagnais ta meilleure amie en glissant ton bras le long de ses épaules, lui intimant de se taire et enchaînant sur un autre sujet. Ta fierté, tu la gardais pour toi et Óláfr qui vous observait en voletant au dessus de vous à ces mètres plus haut dans le ciel t'envoyait des piques et de temps à autres, te félicitait lui aussi à grands renforts de « bien joué joli cœur, cette année tu ne laisses rien passer, promis ? » m'estimant heureux de ne pas connaître les mots dont certains de mes camarades souffraient déjà ou allaient souffrir. Vous aviez déjà tous soufferts de l'accident du Poudlard Express un an auparavant sans pour autant avoir besoin de voir un nouveau fléau s'abattre sur le monde que vous aimiez tant ... Les doigts croisés dans le dos, tu espérais que les tiens allaient être épargnés car tu n'étais pas prêt à subir de nouvelles pertes, gardant celle, terrible, de Veronika toujours ancrée à ton esprit.