Angy patientait avec Lizzie sur ses genoux, droite et silencieuse sous sa forme de chatte comme à son habitude depuis sa récente « résurrection ». Son pelage d’un blanc immaculé se mariait parfaitement avec la nouvelle couleur de cheveux de la sorcière : Une petite excentricité pour elle qui avait toujours arboré un blond vénitien. Ses parents en avaient été choqués lorsqu’ils l’avaient découverte ainsi après son premier sortilège de coloration et s’étaient immédiatement inquiétés de ce signe avant-coureur du changement d’état d’esprit de leur fille. Un détail qui s’ajoutait aux séquelles psychologiques qu’Angy avait manifesté peu après sa sortie de l’hôpital car non contente de souffrir d’une amnésie complète de l’année écoulée, plusieurs troubles de comportements avaient été observés et vite diagnostiqués. Impact mineur disait les rapports, mais bien réel sur la vie de la jeune fille.

C’est pourquoi Izzie se trouvait ici, dans le vestibule attenant à la salle du psychomage détachée à Poudlard.

La rentrée à l’école de Sorcellerie avait débuté depuis peu, aussi cet entretien avec le docteur marquait le premier d’une longue série qu’elle devrait probablement subir durant toute son année.

« On va devoir patienter encore longtemps ? C’est bizarre ici »

Angy fronça les sourcils tout en baissant le regard sur l’origine de cette pensée. Depuis la fin de la peste qui avait été marquée par la réapparition des patronus « décédés », la sorcière trouvait par moment Lizzie étrange ; Et pas seulement à cause de sa nouvelle apparence. Plus méfiante, distante voir suspicieuse à outrance. Angy connaissait le sentiment qui animait ces réactions : la peur. La peur depuis l’attaque du train de n’avoir pas pût empêcher à sa sorcière un aller-retour à la case hôpital. La peur de se perdre, de perdre cette complicité et cette relation fusionnelle qu’elles entretenaient. Angyalka le comprenait si bien car elle éprouvait la même chose à l’encontre de Lizzie. Elle aussi n’avait rien pût faire lorsque cette dernière avait littéralement agonisé à ses pieds. Un évènement encore plus traumatisant que perdre une année de sa vie. Vraiment.
Angy serra le poing, enfonçant ses ongles dans sa paume. Tout ceci était lié, elle en était intimement convaincue. Le train, la peste, toutes ces rumeurs sur des mages noirs… La sorcière ne croyait pas aux coïncidences. Pas du tout ; Et ça ne faisait que renforcer sa détermination à plus tard servir la justice et enfermer tout ces criminels.

« Angyalka ? C’est à toi »

La concernée sauta de sa chaise pour pénétrer dans l’antre du psychomage d’un pas prudent. L’intérieur lui paraissait plutôt simple mais chaleureux: un bureau, quelques poufs, un divan  et des étagères agrémentaient cette salle lumineuse.

« Mise en confiance… Classique », fit Lizzie en remuant sa truffe autour d’elle.

Elle n’y prêta pas plus attention, désormais habituée aux remarques de ce style du patronus, pour s’installer là où lui désignait le docteur : une banquette telle que l’on pouvait en voir dans certains films moldus que sa mère regardait régulièrement. L’avantage d’avoir un parent né-moldu adepte de télévision ! Le sorcier en face de la jeune fille s’installa à son tour, un parchemin sur les genoux, une plume dans une main.

« Je suis le docteur McHector. Comment vas-tu Angyalka? »

« Bien », répondit la concernée en haussant les épaules.

Du moins ce qui s’y rapprochait le plus lorsqu’une année de votre vie venait de partir en fumée ; Que votre patronus était mort puis ressuscité il y a peu ; Qu’on était sujette à des troubles du comportement récurrents et que, pour une raison inconnue, sa meilleure amie lui paraissait distante. Non, sinon tout allait bien effectivement.

« J’en suis heureux », fit le sorcier. « Je pense que tu te doutes que nous allons être amenés à nous voir régulièrement. Ça ne te pose pas de problème ? Tu es d’accord pour que l’on travaille ensemble ? ».

« Oui. C’est pour que… J’aille mieux. C’est utile »

En réalité l’étudiante était bien moins enthousiaste que ça. Devoir déballer sa vie, ses pensées, ses doutes et ses peurs à un parfait inconnu était pour le moins déroutant. Mais ses parents y tenaient, et en un sens elle aussi.

« Parfait. Alors… Si j’en crois ton dossier, tu es nées en Ukraine, c’est bien ça ? »

« Oui Monsieur. Mes parents ont décidé de quitter le pays parce qu’une personne de la famille leur a légué une échoppe au Chemin de Traverse »

« Tu était toute jeune lorsque ça s’est passé, n’est-ce pas ? »

« Neuf ans je crois. Mais en quoi est-ce important ? »

« Ouais, vous êtes du service de l’immigration, ou quoi ? »

Angy tira discrètement une touffe de poil de Lizzie pour lui intimer de se taire. Même si elle aimait l’humeur, ce n’était pas vraiment le moment.

« Fais-moi confiance. J’ai besoin de te connaître un peu mieux. Pas en lisant un bout de parchemin. L’échange direct entre nous est bien plus intéressant. Vois cela comme faisant parti de la thérapie. »

« Si vous le dites… », dit-elle peu convaincue.

« Reprenons, et à neuf ans, comment la petite fille qu’était Angyalka a vécu cet épisode ? »

Le regard de la concernée se voila un instant, se remémorant brièvement ce moment.  


*Flash-back, Angy, neuf ans*

« Non, non, non et non !! Je ne veux pas ! » S’époumona la fillette face à son père.

« Ecoute chérie… » tenta celui-ci face à sa progéniture rouge pivoine.

« Non ! » Hurla encore une fois cette dernière.

*Fin de flash-back*


« Plutôt bien », finit par déclarer Angy avec un sourire trop grand pour être sincère. « J’ai toujours été très mature pour mon âge vous savez »

L’air perplexe du psychomage ne lui échappa pas. Au moins ne comptait-il pas en venir à la confrontation.

« Hum… Et vos parents ? »

« Mes parents ? » répéta la sorcière en haussant un sourcil.

« Ils sont d’origines sorcières ? »

« Mon père oui. Les Zaïtsev sont une famille plutôt modeste au pays et ma mère a des parents moldus. Ils se sont connus à l’Université de Moscou parce que euh… Enfin dans l’Est l’idée de la pureté du sang est assez forte. Vous saviez que Durmstrang n’accepte pas les né-moldus ? Je trouve ça aberrant ! Imaginez, c’est comme si Poudlard ne contenait que des sang-purs ou des mêlés triés sur le volet ! Je pense que c’est aussi une des raisons qui ont poussé mes parents à déménager. Là-bas c’est plus compliqué. »

Comme toujours la demoiselle restait intarissable en ce qui concernant les inégalités entre sorciers. De toutes, celles du sang lui tenait particulièrement à cœur. Juger d’un sorcier par son origine était quelque chose qui la scandalisait. Etendre ces idiots proférer que tels ou tels individus étaient supérieurs à d’autres de leurs naissances lui donnait des envies de pugilats. Au sens propre.

« Et ton adaptation s’est bien passée ? Changer de pays n’est jamais vraiment facile »

L’étudiante haussa les épaules.

« J’étais encore jeune alors je suppose que ça été plus facile… Et puis j’habite dans un endroit très vivant avec beaucoup d’enfants de mon âge. Avoir des amis ça aide… »

« Comme cette Miss Greer ? »

Elle dodelina de la tête pour confirmer.

« C’est ma meilleure amie. Je la connais depuis… Pfou je ne sais même plus. Elle a toujours été là pour moi. Et vice-versa bien sûr. A part Lizzie c’est elle qui me connaît le mieux »

« Lizzie c’est ton Patronus, n’est-ce pas ? »

« Exact sherlock » siffla cette dernière.

Nouvelle tape de sa sorcière.

« On s’entend très bien »

« Même depuis sa… Récente réapparition ? » questionna le psy.

Cet évènement traumatisant restait bien vivace dans l’esprit de la jeune sorcière. En reparler encore aujourd’hui la mettait mal à l’aise.

« Lizzie a souffert de la peste… Elle… Elle a disparu à mes pieds alors que j’étais encore à l’hôpital… A cause de l’attaque du train »

« C’est ce qui a causé ton amnésie, c’est bien ça ? »

« Ça aurait pût être plus grave selon les médicomages. J’ai littéralement volé dans mon compartiment. Ils ne savent pas si ça va me revenir un jour… J’espère… »

« Et ces troubles du comportement ? Le corps professoral dénote plusieurs cas étranges ? »

« J’ai des… Absences. Des maux de têtes aussi et des difficultés à me contrôler par moment… Lorsque je suis en colère par exemple »

« C’est lié à votre changement de… De look ? »

L’Ukrainienne passa machinalement une main dans ses cheveux d’un blanc platine. Autrefois blonde, cette nouvelle coloration en avait surpris plus d’un. Etait-ce pour ressembler un peu plus à la nouvelle couleur de Lizzie ? Ou cela cachait-il une souffrance plus profonde ? Nul ne pouvait encore le dire avec certitude et encore moins la demoiselle elle-même. Inspirant un grand coup, elle tenta de se justifier :

« Lorsque Lizzie est réapparue sous sa nouvelle forme j’ai… Enfin j’ai ressenti le besoin de faire ça. Je ne l’explique pas… C’est… Enfin certains me disent que c’est une séquelle comme un trouble dissociatif ou un truc de ce genre. Comme… Comme si j’étais plus forte. C’est idiot je le sais bien… »

« Tu as besoin de te sentir plus forte ? »

« Oui » affirma Angy sans détour.

« Tu souhaites toujours rejoindre la Brigade magique des tireurs d’élites ? Ton relevé de notes dans le cursus Offensif est plutôt bon »

Nullement flattée, Angyalka déclara :

« Exact. Et ce n’est pas à cause de mon redoublement que je vais me décourager ! Au contraire ! Ça ne fait que renforcer ma détermination. J’y arriverais »

« Nous y arriverons » intervint Lizzie en se lovant sur ses genoux après un bâillement qui ferait pâlir d’envie un hippopotame.

« Oui… Nous y arriverons », susurra Angy avec un sourire.

Et personne ne s’interposera entre elle et son rêve.