Juillet 1981
22 ans
Se perdre dans les candeurs de tes sourires tandis que je soupire contre la peau chaude de ma belladone. Apprécier des moments reflétant aussi parfaitement la pureté du plaisir que ses traits sous les lumières d'une chandelle. N'es-tu pas heureuse ? Dans ta vision sordide de la beauté, aimes-tu te perdre dans un monde que nous construisons peu à peu, à coup de morsures, à coup de plaisir et de nos respirations tremblantes ? Prise aux pièges d'une société qui ne tente même pas de comprendre ce qui fait augmenter les battements de ton coeur. Chimère qu'elle était, ensorceler de ses cheveux aux allures de vélanes et de ses lèvres tracées de rouge qui brûlait mon derme dans le plus simple des enchantements. Charme d'un souffle, charmante de sa fatalité.
«
OBLIVIATE » - le temps se déchire, le temps se confond sous l'éclair lumineuse qui m'est destinée. C'est alors que ma soeur tente d'honorer notre serment. « Toi avant moi, moi avant toi, nous avant le reste du monde » - je me souviens parfaitement de ses longs cheveux à l'époque. Toujours magnifique, son visage illuminé par l'excitation de jouer les grandes filles. La soeur candide, la soeur crédule qui se fait bouclier. Petite sotte, elle était notre seule chance d'inverser le charme. Et pourtant, je suis fière ... Fière, mais pourquoi, pour qui ...
Comment
t'oublier. Comment
oublier la douceur de ton ventre et des réactions de ton corps tandis que je murmure ton prénom. Toi ... Ma belladone qui s'efface, qui s'explose dans une réaction en chaîne.
Comment t'oublier, comment t'oublier ...
T'oublier ... Toi et tes yeux de couleur ... Quelle était cette couleur ? Et tes cheveux ... Brun ? Plutôt blond ... Ou bien couleur miel ?
T'oublier ...t'oublier. Comment ... Je ... Toi ... Vous ... Nous ? Toi ... Mais qui es-tu ?
Personne.
Les choses ont toujours mal été, toujours bien été. Maman qui prépare le souper pour papa qui rentre tard. Il travaille fort, il travaille longtemps. Papa qui passe le plus clair de son temps dans son bureau, sans trop savoir les choses qui se passent, les choses qui déraillent. Deux fillettes, c'est beaucoup pour une femme avec si peu de caractère. Courir partout dans la maison et faire brûler les rideaux du salon. C'est beau le feu non ? Simplement pour apporter un peu de chaleur à maman qui ne souriait qu'à ses livres de romance. Rouge ... Comme les lèvres de maman. Tout est une question de couleur, d'émotion et d'acceptation. Maman est rouge, comme le vin qu'elle déguste chaque fois qu'elle se retrouve, tout seul, avec moi et Maëlys. Rouge comme ses yeux quand elle pleure trop et qu'elle se sent dépassée par toutes les bêtises que nous faisons. Papa est gris, comme ses cheveux, comme la fumé qui s'échappe de sa gorge à la voix rauque. Gris comme le ciel ombrageux qui se fend sous l'électricité qui impose son autorité. Sauf que mon père n'en n'a aucune ... il se lave les mains tachées d'encre grise de son journal d'homme important. Il y a Nana aussi, nana est bleu ciel. Comme la patience et la paix. Nana est bleue parce que son enfant est mort étouffé dans son ventre. Nana s'occupe de nous comme si nous étions de petits miracles.
Novembre 1964
5 ans
«
Nana ... Qu'est-ce que c'est l'amour ? »
« L'amour Mallory ... c'est quand deux personnes ressentent de fortes émotions l'un envers l'autre. Qu'ils veulent passer beaucoup de temps ensemble et que rien au monde pourrait les séparer. »
«
Est-ce que tu as déjà aimé Nana ? »
« Tous les jours de ma vie Mallory. Tous les jours de ma vie. »
Mai 1969
10 ans
Ce n'est pas tant la faute de nos parents que de leur incapacité à se faire autoritaires. Ils sont ainsi, maman sait parfaitement quoi faire pour se faire charmante. Elle connaît la théorie, mais elle est complètement nul pour la pratique. Papa ... Croit qu'il ne devrait pas se mêler de ce genre d'histoire. Il paie la maison et nous donne de la nourriture. Ce n'est pas sa faute, c'est aux femmes d'élever la marmaille féminine. Lui, il aurait bien désiré un fils à qui enseigner les notions d'un parfait héritier, seulement maman lui a offert des filles qui aiment prendre le thé et dessiner sur les murs du manoir. Des enfants créatifs et délurés qui voient la vie autrement. Passer des journées entières à cultiver les plantes du jardin et s'occuper de tailler les rosiers. Au moins pendant ce temps, je ne faisais pas de bêtise que maman disait. C'est pourquoi - lors de nos 10 ans - maman et papa m'ont fait construire un immense vivarium, pour que mes plantes perdurent toute l'année.
« Qu'est-ce que tu fais ma puce ? »
«
Ce sont des Belladone Nana ! Tu vois ces belles fleurs violettes en forme de cloches ? Et bien, elles donneront de petites baies qui te sembleront délicieuses. Il ne faut pas les manger Nana, c'est un piège pour les imbéciles. Il faut y aller avec modération, débuter par de complexe procédure pour les rendre utiles. Avec les fleurs, tu peux t'en servir pour décorer la maison. Les feuilles, quant à elles, peuvent faire office d'un puissant analgésique. Elles sont psychotropes aussi, mais il faut savoir comment les traiter. Les baies nanas ... Les baies sont hautement toxiques. »
« Beaucoup trop dangereux pour une si gentille petite fille comme toi Mallory. Je n'aime pas te voir jouer avec ce genre de plante. »
«
Attend Nana, la baie est ma partie préférée ! Si tu manges le fruit, tu seras conquis par la douceur de son goût. Il n'en faut pas beaucoup Nana ... Et ta peau deviendra rapidement teintée de rouges, ta bouche s'asséchera et tu auras très soif. Tu sentiras peu à peu tes membres se paralyser parce qu'elle attaquera ton système nerveux central. Tu auras des hallucinations qui te feront oublier que tes poumons ont cessé de fonctionner, augmentant considérablement l'intensité de tes mirages ... Et ensuite, Nana ... Tu seras morte. Mais toi ... Tu n'es pas idiote ... Pas comme maman. »
« Rentrons ... C'est l'heure du bain ma puce. »
Septembre 1971
12 ans
«
Tu crois que - »
La fillette roula les yeux, soupirant avec force son agacement face aux interminable questionnements de sa jumelle. À peine avait-elle fait dix minutes de train que Maëly s'était lancée dans une complexe série de remise en question, usant pratiquement le tapis en faisant les cent pas.«
Maë ... Bois ton thé s'il te plaît. Je suis persuadée que Poudlard est assez fortunée pour chauffer l'école entière, que les professeurs sont compétants, que la nourriture sera aussi bonne que celle de Nana et que la bibliothèque fournira assez de livre pour nous permettre d'étudier convenablement. »
Sa soeur l'observa un instant, perplexe. Elle hocha finalement la tête avant de reprendre sa place sur la banquette et de porter à ses lèvres sa fine tasse de porcelaine.«
Ce ne sont que des questions, tu sais, je veux m'assurer que nous serons bien. »
Mallory glissa délicatement sa main contre la sienne, observant droit devant elle, resserant ses doigts contre les siens. Elle inspira longuement, pinçant les lèvres, ses traits s'adoucissant l'espace de quelques secondes. Au fond, elle savait bien que sa soeur était simplement nerveuse. Certains auraient facilement pu s'y méprendre avec de la prétention, sauf qu'elle savait. Elle était ainsi, elle avait toujours été ainsi. Incapable de contenir autant d'énergie dans son petit corps. Combien de fois avait-elle pleuré alors que Nana avait dû peigner ses cheveux pour défaire tous les nœuds qu'elle s'était faite en se faufilant dans les grandes haies de la cours arrière ?«
J'ai peur aussi Maë ... Nana me manque. Toutefois, n'es-tu pas excité par l'opportunité ? Nous avons maintenant un si grand monde à découvrir. Tellement de nouvelle expérience à vivre ma petite perle. Toi et moi avant tout ... Toi et moi avant tout le reste. »
Sa soeur haussa les sourcils, hochant vivement sa petite tête de gamine. Ses beaux cheveux de blé dont les boucles rebondissaient sous son approbation frénétique. Trop d'énergie pour une gamine. Elle s'empressa de boire à nouveau son thé, tandis que Mallory tentait de réprimer un sourire amusé. Elle l'observa quelque seconde avant de froncer les sourcils, sa main frappant sans gêne celle de la plus jeune, offusquée par ses mauvaises manières.
«
Lève ton petit doigt petite peste ! Ce n'est pas une bière que tu bois comme une vulgaire domestique, soit une dame ! » - «
Pardons Mallory ... »
«
Est-ce que tu crois que les douches sont mixtes ? »
«
VALKYRIE MAËLYS SHACKLEBOLT VEUT-TU BIEN TE TAIRE ? »
Novembre 1975
16 ans
La jeune femme inspira longuement, haussant un sourcil tandis qu'elle coupait minutieusement les feuilles de salvia.
« Et cette petite garce de troisième année s'est mis à embrasser Aylan à pleine bouche. Tellement de langue, je ne pouvais faire autrement que de voir sa langue qui débordait de tous les côtés. T'imagines Mallo ? Elle l'embrassait devant moi ! Alors que je venais de passer trois heures à écouter ses baratins sur ses performances à la dernière partie de Quidditch. TROIS HEURES à l'entendre m'expliquer comment il avait fait gagner son équipe. Et puis cette gamine se ramène comme une foutue reine qui s'excite après une seule bière. Elle a encore la couche aux fesses et elle se croit tout permis ? Non mais je vais lui faire regretter ce soir. Elle n'est pas prête la petite - Tu m'écoute dis ? »
La blonde redressa la tête, haussant les épaules avec désinvolte. Qu'est-ce qu'elle pouvait raconter comme connerie dans une seule soirée. La Shacklebolt laissa infuser ses feuilles, mélangeant soigneusement les feuilles de menthe et quelques morceaux de chocolat à ses ingrédients. Un thé bien spécial, pour des jeunes femmes bien spéciales. Elle se retourna finalement, ouvrant grand les yeux alors qu'elle posait une tasse dans les mains de son amie qui s'étendait de tout son long dans son lit. Elle ne se gênait pas pour défaire ses draps la petite impolie !
«
Mais oui ... Tu m'expliquais comment tu avais raté ton cours de balais en première année. Aller boit, Maëlys devrait arriver bientôt pour se préparer. Ensuite, on ira retrouver les autres à la fête. »
Son amie ouvra grand les yeux, ses lèvres entrouvertes tandis qu'elle se faisait offusquée par ses paroles.
« T'es pas sérieuse là ... »
«
Leonie ... Ne soit pas si sotte. Tu crois que je te laisserais parler pendant vingt minutes sans savoir de quoi tu parles ? Allez ... Bois. Ensuite, on ira détruire sa vie à cette petite. »
La blonde haussa les épaules, rassurée par les affirmations de Mallory, s'empressant d'avaler la décoction que lui offrait la jeune Shacklebolt. Elle hocha la tête, imitant les gestes de son amie, se laissant retomber mollement contre le matelas du lit.
«
Leonie ... Est-ce que parfois, tu as l'impression d'être différente ? »
Son amie éclata d'un rire incontrôlé, fermant les yeux alors qu'elle levait ses bras pour les bouger au rythme de ses propres hallucinations. « Les autres sont étranges, pas moi. Qu'est-ce que tu veux dire !? Je suis bizarre ? » - Mallory se redressa sur un coude, souriant bêtement à son amie qui se laissait emporter. Elle était belle. De ses cheveux blonds qui ondulaient pour encadrer son fin visage parsemé de taches de rousseur. «
Tu sais très bien ce que je veux dire. Un peu comme si j'avais l'impression d'aimer des choses différentes ? » Avait-elle soufflé, se redressant pour monter à califourchon contre Leonie, attrapant ses mains au passage. « Bon déjà, que tu passes autant de temps avec Logan, c'est vraiment étrange ma vieille ! » - avait-elle dit, sa voix secouée par ses rires, faisant rire Mallory à son tour. «
On s'entend bien, c'est tout ! » - « Oh pitiez Mallo ! La moitié des filles de la classe tentent désespérément de se faire inviter par lui et monsieur ne fait que te suivre partout comme un petit chien de poche. » - Leonnie prit une pause, haussant un sourcil avant de rouller ses hanches sous son amie. « Je ne sais pas ce que tu lui fais, mais il doit adorer pour être aussi obsessif ! Petite coquine ! » - Mallory retroussa les lèvres aux insinuations de son amie, haussant un sourcil. Définitivement, elle devrait avoir une conversation avec le jeune homme si Leonie disait vrai. Elle se laissa retomber contre la blonde, fermant les yeux quelques secondes pour apprécier les sensations qui lui donnaient l'impression d'être si légère, sa tête reposant contre la poitrine de Leonie. «
J'embrasse très bien, tu sauras. » - « Je ne t'ai même jamais vue embrasser. » - Elle releva son visage, l'inclinant pour l'observer de ses yeux brillant, pupilles dilatées au maximum, réaction en chaîne.
« L'amour Mallory ... c'est quand deux personnes ressentant de fortes émotions l'un envers l'autre. Qu'ils veulent passer beaucoup de temps ensemble et que rien au monde pourrait les séparer. » - Logan se faisait toujours si charmant avec elle et pourtant, il n'avait jamais réussi à la faire frisonner comme Leonie le faisait au moment présent. Pouvait-elle sentir son coeur se débattre contre sa poitrine ? Elle avait envie de lui montrer, de lui prouver. Aller à cette fête ne l'intéressait pas plus que ça, simplement son amie en avait envie. Elle faisait toujours et encore ce que Leonie avait envie. Seulement maintenant ... Elle déposa ses lèvres contre les siennes, franchissant la limite que sa nervosité semblait lui imposer. Deux femmes, c'était mal. Mais Leonie ne la jugerait pas ? C'était pour rire, pour lui montrer ... Qu'elle embrassait bien.
Son amie cambra légèrement le dos, ses hanches se pressant contre les siennes tandis qu'elle répondait à son baiser. Peut-être était-ce simplement la salvia qui faisait son effet. Pour rire, ce n'était rien de sérieux. Elle glissa un genou entre ses cuisses, ses doigts fins s'insinuant dans sa longue chevelure bouclée tandis qu'elles approfondissaient les caresses, se laissant doucement vaguée sur un terrain inconnu, gémissant contre ses lèvres, simplement pour augmenter les frissons qui se dessinaient contre sa peau. Un tempo lent et intense qui s'harmonisait aux vibrations d'amusement causé par les effets psychotropes de son thé sur-mesure. Elle le savait. Elle l'avait toujours su, que Leonie la regardait autrement que les autres filles. Qu'elle-même se laissait allée sous les compliments et les petites attentions de la blonde. Elle soupira doucement, laissant sa main s'aventurer contre son corps, découvrant la peau douce de sa cuisse, remontant légèrement l'ourlet de sa robe.
La porte se claqua brusquement, faisant sursauter les deux jeunes femmes, Mallory se redressant brusquement tandis que sa soeur laissait tomber son sac contre le sol. «
Dites-moi que vous êtes bientôt prête pour la soirée ! Je n'en peux plus de toutes ces révisions ! » - Les deux jeunes femmes éclatèrent d'un rire frénétique, réajustant leurs vêtements avec maladresse. Mallory se releva, pour verser du thé dans la tasse personnelle de Maëlys, lui offrant celle-ci en déposant un bref baiser contre la joue de sa soeur. «
Bien entendu, mais avant ; c'est l'heure du thé Mademoiselle Shacklebolt. »
Septembre 1981
22 ans
Il y a des choses que l'on n'oublie jamais, des choses qui restent gravés dans notre mémoire jusqu'à la fin des temps. Et pourtant, je n'arrive plus à me souvenir, à me rappeler ... Des trous béants dans ma tête qui se confondent, qui se mélangent et qui tourbillonnent pour s'entrechoquer. Les noms se mélangent, s'effacent et se transforment. Je n'arrive plus à comprendre ce qui arrive et pourquoi il me reste si peu d'informations après mes seize ans. J'aimerais simplement savoir ... Maman dit qu'il est arrivé une chose qui nous a tellement perturbés que nos cerveaux ont bloqués les informations. Elle ne veut pas répondre à nos questions et dit que c'est mieux comme ça, que de toute façon, ce serait simplement nous blesser pour rien. Nana ne veut pas non plus répondre ... Je ne comprends pas. Et puis il y a ces lèvres rouges ... Rouges comme le vin de maman. Je me souviens faiblement, mais ça fait si mal ... Si mal.
Des lèvres rouges ... Si mal.
Personne.