1960.

Leur enfant était magnifique. C'était ce que Aslinn et Maksim Przybyski se disaient chaque jour. Ils n'auraient jamais cru pouvoir être si heureux. Les deux cracmols avaient choisi d'être intégré au monde moldu plutôt d'être marginalisés dans le monde sorcier. Ils avaient réussi leur paris. Ils étaient plus heureux loin de la magie. Et leur fils ne connaitrait sans doute jamais cela. Pour leurs familles, c'était une honte de ne pas espérer perpétuer une lignée de sorciers. Mais pour eux, cela n'avait aucune importance. Ils voulaient juste que leur fils soit heureux. Dans ce monde-ci, personne ne les insultait, ils seraient heureux.

Alors quand leur fils, Gwennael Lucjan présenta des signes précoces, très précoces de magie, ils ne surent pas bien comment réagir. Cela défiait la logique. Mais ils ne pouvait rejeter leur enfant. C'était bien une chose que jamais ils ne feraient subir à leur fils. Alors, ils ont accepté sa différence. Ils ont accepté que leur fils ne seraient pas « normal » et conforme leurs envies.


1969.

Poudlard. Pour le rouquin maigrichon, pas bien grand, et naïf, ce nom n'évoquait qu'une grande école où il apprendrait tout un tas de choses. Il avait écouté ses grands-parents maternels en parler avec ferveur, mais pour lui, ça n'avait pas grand sens. Et à dire vrai, il n'était pas spécialement pressé d'y aller. Ses parents avaient beau le rassurer sur le quai de la voie 9 ¾, il aurait carrément préféré continuer de vivre avec eux. Parce que ses parents étaient plus important qu'une prétendue magie qui les avait oubliés eux.

Son trajet en train fut assez calme, bien qu'il ait alors eu du mal à comprendre pourquoi on le regardait parfois avec mépris. C'était le fait d'être roux qui lui valait encore ces regards là ? Ou... Il était si peu au fait du monde magique que tout cela lui paraissait énigmatique. Il ne comprit pas vraiment ce qui lui arrivait quand la répartition eut lieu. Mais il fut bien accueilli au sein des Gryffondors. Il ne tarda pas à réaliser que la plupart des regards bizarres qu'on lui lançait venaient plutôt de Serpentards, ou de "Sang-Pur". Quand quelques semaines plus tard, il comprit que cette attitude était due au handicap de ses parents, il en fut révolté. Qui étaient-ils pour juger sa famille ? Il tenta de fuguer de l'école, ce qui se solda par un passage dans le bureau du directeur. Qui contre toute attente fut plutôt bienveillant. Au lieu de fuir, pourquoi ne pas leur prouver qu'ils ont tort ? Cette suggestion le marqua plus que les moqueries.


1975.

Plus jamais on l'y prendrait. Plus jamais on l'y prendrait à croire aux paroles d'un crétin de Sang-Pur. Plus jamais on l'y prendrait à croire en l'amour. C'était que des conneries. L'amour. Une putain de connerie inventée par des filles en manque d'attention. Il s'isola un peu plus. Son regard devint plus dur, plus révolté peut-être aussi. Les bagarres dont il était l'origine se firent plus nombreuses aussi. Pourtant, il ne pouvait s'empêcher de le regarder parfois. Il ne pouvait s'empêcher d'espérer qu'un jour, il s'aperçoive qu'accepter les fiançailles avec cette fille, c'était une connerie. C'était stupide. L'amour le rendait stupide et faible. Quelle connerie. Tout ça pour un abruti pas foutu d'assumer ses promesses.


1981.

Quitter Poudlard, cela lui avait procuré un sentiment étrange. Sans doute parce que malgré les déboires, c'était entre ces murs qu'il avait le plus vécu. Maintenant, tout allait être différent. Surtout avec le climat politique actuel, il n'avait pas l'impression d'arriver dans un monde merveilleux. Il n'avait eu de cesse de se battre pour ses idéaux jusque là, mais ce n'était probablement rien face à ce qui l'attendait. A peine sorti de Poudlard, il s'engagea pour partir à l'étranger suivre des événements en Pologne. Ses articles firent un peu parlé de lui. Quelques mois plus tard, en revenant en Angleterre, il commença à traiter de sujets très divers. Mais il fallait avouer que la politique était de loin le sujet qu'il préférait suivre. Ses écrits ne plaisaient pas beaucoup à la Gazette, probablement trop incisifs, mais il trouvait toujours à qui les vendre -un peu au rabais-. Cumulé à des jobs vivriers, comme le service au salon de thé Pieddodu sur les fins de semaine, il réussit rapidement à vivre indépendant, dans une petite maison biscornue de Pré-au-Lard.


1982.

Qu'importait s'il se foutait en danger. Qu'importait qu'il ne soit qu'un fils de Cracmols un peu trop prétentieux pour beaucoup. Qu'importait qu'il soit le mouton noir de la profession. Pas de concessions, jamais. Son but était clair, si le gouvernement ne se bougeait pas plus pour résoudre ce climat de peur, il ne serait pas de ceux qui restent silencieux. Les Mangemorts pouvaient bien venir le voir quand il écrirait l'article de trop question provocation, il ne voulait pas avoir peur... Mais au fond peut-être que son assurance n'était qu'une feinte pour faire taire la peur qui le prenait au trippes. Son grand-père avait quitté la Pologne en voyant le spectre d'un dictateur moldu, il ne voulait pas quitter l'Angleterre pour fuir un potentiel dictateur sorcier.