Nobody said it was Izzie.
[SEPTEMBER 1972] Poudlard. Ca y était enfin, elle avait réussi. Depuis que sa lettre était arrivée, elle ne tenait plus en place. Ses parents oscillaient entre fierté et exaspération de la voir s’en aller et n’avaient pas manqué de le lui faire savoir et sentir. Mais ils semblaient loin, tellement loin de ce nouveau monde qui lui tendait les bras. Et du haut de ses onze ans, Kathleen Rosier, aka Kat, était bien décidée à la conquérir. Il y avait tellement à faire, à voir, à expérimenter ! Les sorts ! Les livres ! Et le Quidditch, oh, le Quidditch ! Son premier cours de vol avait été magique (elle n’avait pas arrêté de glousser avec Luis en élaborant des stratégies pour se faire remarquer par des élèves plus vieux pour qu’ils leur donnent un coup de main) et elle n’avait qu’une envie : être au suivant. Un sourire heureux sur les lèvres, elle se rendait à la Grande Salle pour y prendre son déjeuner et ne vit pas le coup venir. Il venait d’une fille visiblement plus âgée (probablement un ou deux de plus), qui arborait un blason différent du sien et avait un regard on ne pouvait plus méprisant.
Bouge de là, vermine ! Apparemment, Kat se trouvait sur le chemin qu’elle avait décidé d’emprunter et duquel elle ne voulait absolument pas bouger. Elles étaient devant la Grande Salle et il y avait énormément d’élèves et :
Tu n’as qu’à regarder où tu vas, gros cul ! C’était sorti avant même qu’elle ne puisse s’en empêcher. La princesse se stoppa net avant de se retourner vers elle, visiblement outrée :
Je te demande pardon ? Rongeant son frein, Kat calcula ses chances. Elle n’était pas du genre à foncer dans le tas, loin de là. On ne pouvait pas dire que la bravoure ni la bravade soient vraiment des cordes de son arc habituel … mais il était hors de question qu’elle se laisse maltraiter. Personne ne devrait se laisser marcher sur les pieds. Ce n’était pas normal. Ce n’était pas
juste.
Mais elle n’en menait pas large quand l’autre lui fit face. Elle n’était pas seule, en plus, elles étaient une bande de trois ou quatre filles qui s’étaient retournées. Et elles étaient plus grandes qu’elle. Et elles connaissaient sans doute plus de sorts. Et en plus il y avait plein de monde qui les regardait. Qui s’était arrêté sans doute pour voir Madame-Princesse-du-Château-ou-au-moins-du-couloir-des-toilettes donner une bonne leçon à cette petite morveuse qui avait osé l’insulter. Elle déglutit difficilement. Cela ne se présentait pas exactement bien, c’était le moins qu’on puisse dire. Mais pas question de s’enfuir en courant, même si elle en mourrait d’envie. Levant son petit menton et le calant bien droit, elle la regarda alors qu’elle s’arrêtait bien trop près d’elle :
Qu’est-ce que tu as dit ? Que tu n’avais qu’à regarder où tu allais. Gros cul. Les deux derniers mots relevaient plus du couinement que de l’insulte bien sentie. Mais au moins, elle n’avait pas flanché, elle ne devait pas être si ridicule que ça, pas vrai ? PAS VRAI ?! L’autre en face ne semblait pas en revenir, elle s’attendait sans doute à ce qu’elle s’effondre en sanglots ou s’écrase, simplement. Il n’en était pas question :
Et pour qui tu te prends, au juste ? Il y avait beaucoup de possibilités pour répondre à cette phrase. Elle aurait par exemple prendre cet air de parfaite petite Sang Pur qu’on lui avait appris à être en société et lui clouer le bec en lui demandant qui composait son arbre généalogique pour lui avoir donné un fessier pareil. Ou un truc spitiruel du genre « ton pire cauchemar ». Ou « la petite fille de [Insérer le nom du Fondateur / de la Fondatrice de sa Maison] ». Mais rien ne venait, là, comme ça. Et elle allait se faire manger toute crue, et …
Pour une chica qui a du cran. Elle n’avait pas encore fermé les yeux pour supplier qu’on ne lui fasse pas trop de mal, mais ce n’était pas loin, elle devait bien l’avouer. Le coeur battant la chamade, elle tourna la tête pour voir une fille se détacher de la foule. Si elle venait de débarquer ou avait assisté à tout l’échange, elle n’aurait pas vraiment su le dire. Mais elle tombait à pic et vint se placer à ses côtés. D’un revers de la main et d’un claquement de langue irrité, elle envoya la fille au séant pas si volumineux que ça, il fallait bien l’avouer, voir ailleurs si elle y était. Décidant de garder la bouche fermée pour ne pas avoir l’air d’un poisson hors de l’eau, Kat se tourna vers sa sauveuse et finit par articuler :
Merci. La demoiselle se contenta de sourire, de cette espèce de moue à la fois mystérieuse, railleuse et aguicheuse qui était, comme elle l’apprendrait plus tard, la marque de fabrique d’Isabel Álvarez. Qu’elle apprendrait à imiter, avant de développer la sienne quelques temps plus tard. D’une main sur l’épaule, celle-ci l’entraîna dans la Grande Salle. Dépassant les premières années de sa maison avec lesquels elle avait pris ses marques, elle se vit introduite à une bande plus âgée et qui avaient tous une certaine dose de sass apparent. Et entendu parler de l’incident qui faisait déjà le tour de la pièce. Ce fut donc félicitée qu’elle s’assit aux côtés de celle qui serait à la fois mentor et amie très chère bientôt. Très bientôt.
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[CHRISTMAS 1978] Impossible de dire comment Izzie avait réussi à leur dégoter cette soirée. De toutes les manières, il y avait bien longtemps que Kat avait renoncé à comprendre comment fonctionnait le charisme de son aînée et son charme ravageur. Même s’il fallait dire qu’ayant été à bonne école, elle commençait à marquer des points dans le domaine. Quand son corps avait commencé à prendre quelques formes (non, mesdames, pas de rondeurs dues à ses trop nombreux passages dans les cuisines, on parlait bien de puberté), elle avait noté les regards glissant sur ses courbes et s’était lancée corps et âmes dans le jeu, avec Izzie. Il y avait de la place pour tout le monde, dans ce moment où tout le monde se cherchait et elles ne se privaient pas. Nul besoin de dire que ça n’allait jamais vraiment loin avec Kat. Des oeillades appuyées, une ou deux danses langoureuses et un échange de salive plus tard, elle était partie virevolter ailleurs. Et elle aimait ce statut de mystère insaisissable. On l’attrapait au passage pour la relâcher, ou on passait son tour. Ce soir-là, elle avait tout misé sur ses jambes fuselées dans un pantalon ajusté à la taille haute et une paire de bottes assorties. Izzie avait annoncé la couleur en l’invitant : il y avait un prix à la clef pour celle qui scorait le plus cette soirée. Venus et Luis étaient là, bien évidemment mais nul besoin de dire qu’ils ne participaient pas à leurs excès mais pouvaient être des juges impitoyables. Cela dit, ni l’une ni l’autre ne trichait : Izzie par fierté, sans aucun doute et Kat parce qu’elle en était incapable. Ils avaient vite compris que tricher et mentir lui était impossible … sauf sur un certain sujet qu’elle gardait profondément enfoui. Ou deux, à bien y penser. Mais le mensonge direct sur question était impossible. Elle était comme ça, c’était tout.
Après avoir salué le petit groupe (un baiser sur la joue pour Luis, une étreinte pour Venus), les deux chasseresses s’étaient emparées de deux Whisky Pur Feu. Que des jeunes dans cet appartement, visiblement sorciers quand on considérait les boissons, quelques têtes connues mais … ils étaient quelque part dans Londres, elle connaissait l’adresse. Le reste n’avait pas vraiment d’importance. Scannant la pièce du regard, elle finit par repérer sa première proie : un jeune homme entouré de ses potes qui avait visiblement déjà un verre dans le nez et était, elle devait bien l’avouer, fort charmant. Entrechoquant son verre avec celui d’Izzie, elle leva un sourcil provocateur :
It’s on, biatch ! L’élève et le maître, elle devait bien l’avouer. Mais elle était contente d’avoir lancé les « hostilités » cette fois. Balançant négligemment ses cheveux derrière son épaule, elle se fraya un chemin à travers les personnes qui étaient arrivées (déjà nombreuses, il n’était jamais question d’arriver en avance). Ignorant volontairement et superbement le cercle du jeune homme en question, elle se planta devant lui :
Bonsoir … Un léger sourire affleura les lèvres de l’inconnu alors qu’il faisait signe aux autres du partir. Bonne pioche. Plus ils étaient arrogants, plus c’était simple de prendre la main. Et vu son physique, il avait de quoi. Ses yeux la détaillèrent sans vergogne et elle pencha la tête sur le côté pour en faire autant. Pas de raison d’être le seul bout de viande. Son examen sembla le satisfaire et il ouvrit la bouche pour dire :
Enchanté, je suis … Un doigt sur ses lèvres le fit taire immédiatement. Kat semblait de plus en plus certaine de l’avoir déjà vu en soirée mondaine chez des Sang Pur. Pas besoin d’introduction.
Les noms ne sont pas importants ce soir, souffla-t-elle, les yeux pétillants. Attrapant sa main, elle l’entraîna vers l’espace dégagé pour danser qui était pour l’instant complètement vide. Elle le sentait sur le point de protester, il n’en eut pas le temps. D’un mouvement du poignet, elle tourna autour de l’axe de leurs bras et se retrouva contre son torse en moins de temps qu’il ne fallait pour dire « Quidditch ». Plus de protestations. Juste un grand moment de danse.
Epuisée après plusieurs danses, et potentiellement plus de deux heures de sourires et de flirt éhonté, elle se laissa tomber sur un canapé dans lequel Izzie la rejoignit quelques minutes auparavant.
Alors ? demanda-t-elle. En réalité si elle voulait être honnête elle avait complètement perdu le compte. Non qu’il y en ait eu tant que ça étant donné qu’elle avait décidé de tenter l’art de jongler pendant cette soirée, ce qui limitait malheureusement le nombre de candidats. Nul doute que son amie avait remporté les oscars haut la main, vu le nombre de jeunes gens qui la regardaient … qui les regardaient, en réalité. Battant des cils d’un air innocent, elle se retourna vers son aînée pour le verdict … pour la trouver très proche d’elle, un sourire gouailleur sur les lèvres :
Et si on restait sur une égalité, chica ? Retenant un rire - elle avait perdu le compte des verres qu’elle avait bu - elle se pencha un peu plus. Après tout … elles étaient belles, elles étaient sexys, elles étaient désirables … et ce serait un moyen imparable de faire ba…ver. Et lentement, les deux jeunes filles unirent leurs lèvres, sous quelques murmures étouffés par la musique. Envie, sans le moindre doute. C’était bel et bien la première fois. Mais ce ne serait pas la dernière, cette technique venant de passer dans leur panel officiel d’armes de séduction massive.
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[OCTOBER 1979] Qu’on se le dise : ça n’allait pas. Et cela n’avait rien à voir avec sa voie, choisie par défaut, certes. Cursus ordinaire, on ne pouvait pas dire qu’elle s’épanouisse réellement dedans. Mais quand tout ce dont vous avez toujours rêvé était de faire carrière dans le Quidditch … C’était plus un marasme inextricable. Depuis l’attaque du Belize (depuis le Belize, même, elle n’était pas assez stupide pour avoir oublié pourquoi ils avaient été « parqués » tout l’été, pas avec cet étudiant qui était mort), elle portait un masque. Un masque jovial de celle que tout le monde avait toujours connu. Et qu’elle maîtrisait à la perfection. Mais en réalité, elle était morte d’inquiétude. Même si Adam était un ajout fort appréciable à leur petite bande, elle n’était pas prête d’oublier dans quelles circonstances ils s’étaient rencontrés. Ni la vision du corps de Luis dans ce lit, son teint hâlé soudain aussi pâle que les draps. Enfin, non pas que lui ne se soit pas bien remis, visiblement. Amère ? Légèrement. Ce n’était pas une bonne combinaison. Elle savait qu’on lui ferait payer son absence de la maison familiale de cet été quand elle rentrerait, elle n’en pouvait plus et Izzie et lui avait décidé d’en profiter pour se rouler des pelles à qui mieux mieux « en toute discrétion » (comme si le règlement allait les en empêcher). Eh oui, croyez-le ou non, leur groupe d’amis s’était brutalement transformé en « deux amis et deux lapins en chaleur ». Mauvaise ? Pas du tout, elle n’était juste pas d’humeur à supporter ça. Mais bon, visiblement l’Argentin s’était très bien remis vu qu’il … elle n’aimait pas être comme ça. Mais alors qu’elle sortait de son cours de Sortilèges, et qu’elle aperçu la chevelure d’Izzie un peu trop proche du visage de Luis (sans doute pour lui donner rendez-vous dans un placard), elle péta les plombs. Intérieurement. Tournant les talons, elle fit la chose la plus mature à faire : plutôt que de retrouver la petite bande pour l’après-midi, elle se dirigea vers les cuisines. Son havre de paix personnel, dans lequel elle pourrait se morfondre tranquillement tout en s’enfilant sucrerie sur sucrerie.
Les elfes la connaissaient, depuis le temps. Aussi, qu’elle elle débarqua et se posa à une table, coudes enfoncés dans le bois, menton dans ses mains et moue boudeuse, il ne fallut pas trois minutes avant qu’une assiette remplie de ses pâtisseries préférées ne soit poussée devant elle. Remerciant l’elfe avec déférence, elle s’empara de la première qu’elle goba entièrement, retournant à sa position initiale. Elle en avait juste marre, en ce moment. Décidant que de toutes les manières, elle était mieux seule dans son marasme, elle ne broncha pas quand elle entendit des pas résonner dans la cuisine (d’humain, pas d’elfe), jusqu’à ce qu’elle apparaisse dans son champ de vision, s’asseyant SUR la table, juste à côté d’elle. Gé-nial. Izzie, justement la personne qu’elle n’avait absolument pas envie de voir. Incapable de remettre son masque en place et surtout n’en ayant aucune envie, elle l’ignora superbement, piochant dans son assiette pour avoir l’excuse d’avoir la bouche pleine. Technique qui aurait pu fonctionner si … la fille en face ne l’avait pas imitée. Bad, bad move. Dans la liste des choses sacrées aux yeux de Kat, la nourriture arrivait dans les premières positions. Et si d’habitude ses amis étaient au-dessus, dans ce cas-là, absolument pas. Et elle grinça :
Ca va, à l’aise ? Prends toute l’assiette tant que tu y es. C’est plus facile de prendre aux autres, après tout. Et plus drôle. Ouh, c’était sorti de travers. Mais elle en avait assez.
Passe-moi un gâteau, chica. Pardon ? Elle venait de lui éclater au nez et tout ce qu’elle trouvait à faire c’était … ça ? Se relevant, incapable de supporter sa proximité plus longtemps, elle fit glisser l’assiette de gâteaux vers elle dans un mouvement virulent, crachant :
Tiens, je te les laisse. C’est pas comme si t’avais besoin de ma permission, de toute façon. Izzie se leva. Kat savait qu’elle l’avait provoquée et que ça allait être sanglant mais en même temps, elle en avait besoin, pour une fois. Juste hurler.
Si t’as quelque chose à dire, dis-le, chica. Pourquoi ne pouvait-elle pas juste rentrer dans son jeu, se jeter sur elle, whatever ?
La langue de bois c’est pour les minettes de Sang Pur.La classe aussi, mais ça, c’est pas nouveau. Ca allait trop loin. Ce n’était pas du tout ce qu’elle voulait dire, loin de là. Et ça finit par sortir, tout plutôt que de partir sur ses origines, elle n’aurait pas supporté de lui faire du mal comme ça, même si elle aurait très bien su où appuyer :
Je peux savoir ce que tu fous avec Luis ? A travers sa colère, elle perçut la surprise qui se peignait sur les traits d’Izzie. Qui ne dura qu’un temps. Retrouvant une expression neutre, elle se rassit à sa place et reprit la dégustation du gâteau là où elle l’avait laissée. De
son gâteau.
Tu sais très bien que je te préfère à Luis, chica. Un grognement s’échappa des lèvres de Kat alors qu’elle se détournait, se passant la main dans les cheveux. Ce n’était pas la question, malheureusement. Même si cela avait fait mouche, quelque part. Oui, mais ça ne changeait rien. Elle était toujours avec lui et cela la tuait autant à petit feu.
Et lui te préfère à moi. Ce qui est logique. Elle secoua la tête, s’en voulant. La mini-déclaration d’Izzie avait douché sa colère et ses épaules s’affaissèrent alors qu’elle revenait à la mine défaite qu’elle arborait quelques minutes plus tôt.
Logique, peut-etre, mais cela ne veut pas dire que tu dois t'avouer vaincue. Venant d’une autre elle l’aurait étripée. Mais c’était Izzie. Et elle ne pouvait refuser le clin d’oeil complice qu’elle venait de lui envoyer. Rendant les armes, elle se percha sur la table à ses côtés et attrapa une des viennoiseries. Elle haussa une épaule :
Je ne veux pas jouer. Pas avec lui. Evidemment que la Colombienne lui avait appris un tas de tours dont elle aurait pu se servir pour mettre le jeune homme à ses pieds. Mais c’était différent cette fois. Et c’était ce qui était aussi compliqué.
C’est pas une affaire, chica. Tu ne rates rien. Etouffant un léger rire, elle lui donna un coup dans l’épaule avant d’y poser sa tête. Ce n’était pas la faute d’Izzie. C’était la sienne. Et pensivement, attrapant une autre sucrerie, elle soupira :
Allez, encore une ou deux et on retourne à la pâtisserie … tu m’aideras à choisir un meilleur modèle. Et ce fut toute l’histoire. Cela ne dura même pas entre les deux - sans apparemment que ça ait quoi que ce soit à voir avec elle. Mais peu importait. Cela avait entamé une nouvelle page de son histoire avec cette
chica dont elle ne pouvait définitivement pas se passer.
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My Clarity. Venus.
[FEBRUARY 1976] Ce fut la chaleur d’un corps se blottissant contre le sien qui la fit réagir. Ce n’était pas violent, ce n’était pas froid, ça ne semblait pas dangereux. Ce qui fit que la seule réaction de Kat fut de passer un bras autour de cette nouvelle source de chaleur qui n’était pas sans lui déplaire. Les longs cheveux de la demoiselle lui tombaient sur le visage et partout autour, sur son oreiller. Les rideaux de son lit ne bougeaient pas et pourtant, des ombres mouvantes dansaient à leur surface. S’il y avait une chose que les camarades de chambre de Kat avaient rapidement compris au fil des ans à Poudlard, c’était qu’on pouvait chanter extrêmement fort à côté, faire exploser une potion ou encore hurler à cause d’une nouvelle coiffure n’allant absolument pas, il était impossible de la réveiller. Ce qui avait de nombreux avantages comme la préservation du sommeil, bien évidemment, un beauty rest toujours impeccable qui faisait qu’elle se réveillait fraîche comme une rose, ce qui était, il fallait bien l’avouer, fort ennuyeux. Mais aussi le désavantage certain de la mettre en difficulté certains matins. Quand son réveil avait échoué et que c’étaient ses camarades qui devaient essayer de la réveiller … ce n’était pas une mince affaire et ce n’était rien de le dire. Mais il y en avait une qui en avait pris son parti : c’était Venus. Ce n’était pas la première fois et à vrai dire, ce ne serait sans doute pas la dernière que cette scène se produisait. Ce qui expliquait peut-être aussi l’absence totale de panique de la demoiselle de sentir quelqu’un se glisser dans son lit. Même si les garçons ne pouvaient pas avoir accès à leur dortoir, ce n’était quand même pas anodin comme situation.
Il lui fallut plusieurs minutes pour émerger des bras de Morphée. Elle mit plusieurs minutes à comprendre où elle était et ce qui était en train de se passer. Quand son oeil eut capté les couleurs familières et rassurantes de sa maison, que son esprit eut analysé la douceur de la couette et de l’oreiller qui l’enveloppaient, elle put reprendre le cours normal de ses pensées. Un soudain flash lumineux continua à imbriquer les pièces du puzzle nocturne dans son esprit. Il y avait de l’orage et, au son, il ne devait pas être qu’un peu violent. Cela ne l’avait jamais dérangée (elle aurait même été du style à descendre pour danser sous la pluie si elle l’avait pu) mais ce n’était pas le cas de tout le monde. Son étreinte se resserra sur le corps frêle de sa camarade, déposant un baiser dans ses cheveux bouclés. Venus savait qu’elle pouvait toujours trouver refuge dans son lit si elle le désirait (sans la moindre arrière-pensée, désolée messieurs) et usait et abusait du passe-droit qu’elle avait concernant l’espace sacré qu’était le lit de Kat. (Car oui, on n’y entrait pas impunément, ne serait-ce que pour profiter de son matelas. Non mais.) La première fois, elle avait essayé de lui fausser compagnie juste le temps d’aller lui faucher quelques sucreries pour la réconforter, mais Venus s’était accrochée à elle, mi-poulpe, mi-koala et depuis, elle savait qu’il ne fallait sous aucun prétexte qu’elle ne s’éloigne d’elle. Bien noté. Chacun ses secrets, chacun ses manies et elle n’allait certainement pas juger, bien au contraire. Se calant, elle lui fit un peu de place pour qu’elle puisse s’allonger un peu plus confortablement. Rajustant la couverture sur ses épaules, elle déposa un dernier baiser sur son crâne avant de passer ses bras autour d’elle. Le nez dans ses cheveux, bouche fermée, elle se mit à fredonner une berceuse rassurante. Luttant elle-même contre le sommeil, elle ne s’endormit cependant pas avant d’être certaine que Morphée s’était emparé de Venus. Il y avait des priorités, dans la vie. Et dans l’échelle de valeurs de Kat, ses amis passaient avant son lit et son estomac. Ce qui n’était pas peu dire.
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[CHRISTMAS 1979] Le Chemin de Traverse était bondé en cette veille de Noël. Cela rassurait un peu Kat, que tout le monde ait fait comme elle et Venus et qu’elles ne soient pas les seules à être plus qu’en retard pour leurs emplettes. La foule de sorciers et sorcières, tous vêtus de manteaux colorés avait quelque chose d’absolument charmant, avec la neige tombant dru. Qu’elle soit magique ou pas, la jeune fille s’en moquait : elle était heureuse d’être dehors et de retrouver son amie. Elle avait besoin de ce bol d’air mais refoula les pensées négatives qui s’accumulaient dans son esprit. Emmitouflée dans son écharpe adorée, aux couleurs de sa maison, Kat se dirigea vers la boutique de Florian Fortarôme, où elle avait rendez-vous avec son amie. La petite soeur du groupe, sans doute sa préférée à bien des égards (mais chut, il ne fallait pas le dire aux autres). Profitant de sa légère avance, elle en profita pour acheter deux créations de saison, des glaces chaudes au goût merveilleux de pumkin pie qui fumaient dans l’air froid. Et soudain elle fut là :
Winnie ! Tant bien que mal, mais se moquant de bousculer quelques personnes au passage, elle la prit dans ses bras, en faisant par contre bien attention à ne pas renverser leurs gourmandises de l’après-midi.
Tu m’as manqué ! Et c’était vrai. Depuis sa première année, chaque période de vacances était une torture, chaque minute passée loin d’eux, sa vraie famille. Alors que Venus lui rendait son étreinte, elle dut dissimuler une grimace. Ses côtés étaient plus que douloureuses. Mais cela n’avait aucune importance pour l’instant.
Bras dessus bras dessous, les deux jeunes filles s’engouffrèrent dans chaque boutique qui voulait bien d’elles, et dans lesquelles elles espéraient trouver
le cadeau convenant à chaque membre de leur joyeuse bande. Pour Adam elles passèrent un temps certain dans Fleury et Bott, pour choisir le volume le plus épais et le plus ennuyeux de l’univers pendant que Kat taquinait Venus à propos du nouveau venu de la bande. Cela faisait plusieurs mois que le jeune homme les avait rejoint (cette attaque des plus désastreuses avait eu au moins cela de positif - cela, et le fait qu’aucun membre de leur petite bande n’avait été tué. Pour les blessures, ils avaient eu Luis, et la vision de l’un d’entre eux sur un lit de l’infirmerie était suffisante pour la traumatiser entièrement). Et elle n’avait pas été sans noter l’intérêt qu’il avait suscité chez leur petite chérie. C’était évidemment bon enfant et n’allait jamais trop loin. Elles gardaient le cadeau d’Izzie pour la fin parce qu’elles n’étaient pas encore arrêtées sur une idée précise et passaient à celui de Luis (qu’elles étaient certaines de trouver dans la boutique de Quidditch) quand l’après-midi prit un tour … disons, particulier. Elles étaient en train d’hésiter entre une nouvelle paire de gants en cuir ou un maillot de l’équipe qu’il supportait cette saison quand le regard de Kat accrocha un pull des Flèches d'Appleby, dont elle était une fervente supportrice. Il y avait beaucoup de monde, et elle avait décidé que l’essayer par-dessus ses vêtements ne serait pas une mauvaise idée. Tendant son sac et son manteau à Venus, elle l’avait donc enfilé sur son haut et paradé dans l’allée avec. Il était superbe et elle avait une folle envie de se faire un cadeau. Et en l’enlevant … son maillot était parti avec, coincé dans les manches de l’article tant convoité. Dévoilant ses côtes … et une marque violacée.
Un frisson la parcourut et elle essaya de s’en dépêtrer, rabattant le tissu sur sa peau meurtrie. Mais il était trop tard. Ce qui passa dans les yeux de son amie ne laissait aucun doute sur le fait qu’elle avait vu, qu’elle avait compris et qu’elle ne laisserait rien passer. Il fallait qu’elle le tente pourtant et elle se détourna, essayant de changer de sujet. Sans succès :
Tu viens de cacher quoi, là ? Pause. La jeune fille ferma les yeux un instant avant de se retourner vers son amie. Plus de masque. Juste un profond désespoir, pendant une fraction de seconde. Se mordillant la lèvre, elle souffla :
Pas ici, d’accord ? Attrapant le cadeau de Luis, elle passa à la caisse rapidement, sentant le regard de Venus sur elle. C’était difficile. C’était au-delà de ça. Mais il fallait bien que ce jour arrive, c’était déjà un miracle que ça ne se soit pas produit plus tôt. Elle lui devait des explications … mais étaient-elles réellement nécessaires ? Ce fut sous le feu de ce regard qu’elle quitta la boutique, puis s’engouffra dans la chaleur rassurante du Chaudron Baveur. S’installant à l’écart, dans un coin où on ne risquait pas de les surprendre, elle prit le temps d’enlever ses gants, son écharpe et son bonnet, de former une pile parfaite avant d’affronter le regard de son amie. Qui était à mi-chemin entre l’inquiétude et la colère. Ce qu’elle avait voulu éviter à tout prix.
Promets-moi que tu n’en parleras à personne … Une demande qui venait du fond du coeur. Elle n’avait aucune idée de ce que la demoiselle avait compris, mais il était hors de question que qui que ce soit d’autre l’apprenne. Il n’y avait pas eu d’hésitation. Mais pas de concession non plus. Devant une Bieraubeurre, Kat avait été contrainte de tout déballer, sans s’arrêter. Jusqu’à un silence. Et une sentence, définitive :
Il est hors de question que tu retournes là-bas.Le couperet tombé, Kat avait tout essayé. De minimiser. De plaider l’habitude. Des choses qui n’étaient pas tolérables pour son amie qui ne fit que s’enflammer davantage. Alors elle avait parlé des conséquences. Les Rosier avaient le bras long, ils ne la laisseraient pas partir aussi facilement. Chaque argument était contré, avec une flamme qui la réchauffait sans la brûler. C’était la honte, qui causait le rouge qui lui montait aux joues. La tristesse. L’impuissance. Mais Winnie ne lâchait rien et menaça même de l’ensorceler pour qu’elle reste en place, quitte à la traîner de force chez ses parents. Ce qu’elle n’eut pas à faire. Comprenait qu’elle n’y échapperait pas et en étant hautement soulagée, Kat échafauda un plan avec la demoiselle, incluant une lettre d’invitation à des vacances chez une amie de Poudlard et un départ extrêmement rapide. Inutile de dire que le nom n’était pas celui de Oswald et suffisamment ronflant pour qu’on la laisse tranquille. Les bagages seraient gérés par l’elfe de maison familial. Et en moins de temps qu’il ne fallait pour le dire, les deux jeunes filles sortaient du bar, doigts entrelacés, pour acheter le dernier cadeau avant d’aller passer Noël chez les Oswald. Et tous les mots du monde ne suffisaient pas pour les remercier. Et leur fille, plus particulièrement. Un joyau à l’état brut. Qu’elle défendrait bec et ongles un jour à son tour. C’était une promesse.
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[SEPTEMBER 1980]
Merlin ! Venus, reviens par ici ! Secouant la tête d’un air revêche lui donnant l’air d’une vieille bibliothécaire pas du tout sexy, Kat prit en chasse la jeune fille qui caracolait en tête, dans le couloir, son sac de livres
BIEN TROP LOURD pendant sur le côté. Elle
savait que Venus n’avait pas
vraiment besoin qu’elle la surveille, maintenant qu’elle était sortie de l’infirmerie, mais c’était plus fort qu’elle. Même si elle le prenait sur le ton de l’humour, cette attaque avait été la goutte d’eau. Il y avait eu le Belize, il y avait ces prisonniers en liberté … Ce n’était pas irréel, ça l’était un peu trop à son goût. Et même si elle s’en était sortie indemne à priori … sa future carrière brisée lui pesait énormément. Elle avait minimisé la chose devant les autres, dit que ce n’était pas important, qu’elle serait une excellente journaliste sportive ou un arbitre hors pair … Cela piquait. Elle ne serait pas handicapée au quotidien par ce problème au niveau du coude, mais les impacts de Cognards sur la batte qu’elle tenait de cette main étaient entièrement proscrits. Et comme elle n’avait jamais voulu faire que ça … Passons, ce n’était pas le sujet. Le sujet était que pendant cette attaque, quelqu’un avait « pris cher ». Et ce quelqu’un n’était pas n’importe qui, c’était Venus. Quand elle s’était rendu compte de la gravité de la situation, elle avait cru perdre la tête. Elle en aurait hurlé si elle n’avait pas été seulement en état de gémir et rien de plus. Pas elle. Pas ce petit bout de femme, fait de force et de fragilité mêlées. Mais elle s’était relevée. Bien sûr qu’elle s’était relevée. Et se concentrer sur elle était sans doute le remède à son coeur brisé, à ses rêves partis en fumés et surtout, à l’inquiétude qui lui rongeait les entrailles jour après jour. Il y avait Luis, et Adam, dans ce foutu lit, puis Venus, qui serait le suivant ? Il n’était pas question d’envisager la vie comme ça … et il n’était pas question de prendre le risque que Venus se fatigue trop ou se blesse de nouveau.
Venus, ça suffit ! Elle menaçait, mais ne pouvait cacher son sourire. Si elle cavalait de la sorte c’était bien que la vie reprenait ses droits, et c’était une bonne chose. Elle n’allait évidemment pas la pourchasser toute la journée, mais elle préférait s’assurer que tout allait bien avant de la lâcher pour sa nouvelle journée de future Médicomage mondialement reconnue. Elle-même avait des cours auxquels elle devait se rendre, dans ce nouveau cursus qui aurait du être le paradis mais avait un léger goût extrêmement amer quand elle voyait Luis s’éclater avec d’autres alors qu’ils auraient du partager cet accomplissement ensemble. Il n’en savait rien, il l’avait déjà suffisamment protégée pendant l’attaque du train. Elle avait encore un peu de temps, elle avait en tous cas pris celui de passer dans les cuisines pour récupérer des friandises en tous genres pour son amie, qu’elle tenait dans un sac en papier, très « maman qui a préparé le déjeuner de son enfant » et qu’elle voulait absolument lui remettre. Elle n’était pas assez rapide, il y avait trop de monde dans les couloirs, elle ne parviendrait jamais à la rattraper avant qu’elle n’arrive en c… Et voilà. Venus venait de passer en courant la porte de la salle et allait prendre place à un des bureaux avec un grand sourire victorieux. Refusant de rentrer pour faire une scène, Kat lui tira la langue de façon extrêmement mature avant de froncer le nez. Pas de réaction peinée en face. Bien, qu’à cela ne tienne. Posant son sac de cours à ses pieds, elle s’empara de celui de victuailles qu’elle prit tout le temps d’ouvrir, les yeux fixés sur Winnie. Le professeur n’était pas encore arrivé, ce qui lui permis de prendre tout son temps en sortant le premier cupcake (velvet, pour être précise) qu’elle admira sous toutes les coutures de façon exagérée, avant de reporter son attention sur Venus. Toujours rien ? Un sourcil partit à l’assaut de son front comme pour lui dire : « ah ouais ? tu veux vraiment me mettre au défi ? ». Dans un lent mouvement, elle le porta à ses lèvres, mordant dedans de façon plus que suggestives, pour le bonheur de quelques veinards qui se poussèrent du coude en la montrant. Elle leur aurait bien adressé un grand sourire mais un : elle devait avoir du chocolat plein les dents et deux : ils n’étaient pas la cible de son petit manège. Battant des cils, elle allait prendre une seconde bouchée quand une petite main lui arracha le sac:
Pas touche ! Cette fois-ci, ce fut un clin d’oeil que lui administra Kat, assortie d’une tape sur les fesses alors que Venus allait reprendre sa place, comme si de rien n’était :
J’te vois à midi, mon chou ! Et après une dernière oeillade pour son public, elle vida les lieux, emportant sac et reste de cucpcake avec elle. Les bases étaient posées. La journée pouvait bien commencer.
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Million Reasons. Luis.
[Avril 1981] Il n’était pas content. Cela arrivait, parfois, quand elle se dérobait quand ses baisers se faisaient un peu plus pressants ou qu’elle pirouettait en évitant certains sujets. Cela faisait plusieurs mois bientôt qu’ils étaient ensemble. Sans doute son histoire la plus longue. Et il le savait, elle ne le lui avait jamais caché. Il n’était pas le premier garçon avec lequel elle flirtait à Poudlard et il ne serait sans doute pas le dernier. Mais avec lui elle avait voulu prendre un peu de temps, pour le découvrir, pour se découvrir elle-même. Si elle l’aimait ? Difficile à dire. Sans doute, oui, mais pas comme elle l’aurait voulu et elle en était consciente. Et lui aussi, patient comme il l’était la plupart du temps. Sauf parfois, quand c’était trop long, quand ce n’était pas assez. Elle dissipait souvent le malentendu ou faisait avorter la dispute d’un baiser mais cette fois-là, ça n’avait pas suffi. Et elle ne supportait pas qu’il lui fasse « des scènes » en public. Ce n’était le style ni de l’un, ni de l’autre. Il était vraiment peiné. Sans le moindre doute. Mais elle n’avait pas envie de lui donner d’explications, pas cette fois. Ni une autre, d’ailleurs. Ils sortaient de cours et il l’avait rattrapée en lui disant qu’ils devaient parler. Elle n’en avait pas envie.
Non. C’était clair, c’était précis et elle ne dirait sans doute pas grand-chose de plus. Ils étaient beaucoup trop jeunes pour se devoir quoi que ce soit. Elle ne lui appartenait pas, elle était indépendante et il le savait. Comme elle savait qu’il lui correspondait parfaitement et qu’il était adorable, insupportablement beau gosse, qu’il saurait l’écouter si elle lui en laissait l’opportunité. Mais elle n’y parvenait pas. Cette certitude de ne pas être normale, de ne pas être une fille lambda la rattrapait chaque fois qu’il essayait de se rapprochait et la tuait à petit feu. Peut-être fallait-il simplement qu’elle se laisse aller, qu’elle accepte de baisser la garde une bonne fois pour toutes. Il le méritait, réellement. Mais c’était mission impossible. Et elle en connaissait l’autre raison, même si elle luttait contre de toutes ses forces. Et tout ceci ….
Le flot de ses pensées fut arrêté net par un étau autour de son poignet. Arrêt sur image. Son sang se figea dans ses veines alors que l’empreinte sur le poignet se dessinait lentement, comme à l’encre indélébile. Brûlant. D’un feu puissant. D’un froid mordant. Il y avait de la force dans ce geste. De la tension. Un ordre. Impérieux. Une violence. Mal contenue. Qui envoya une décharge dans tout le corps de Kat. Mais avant qu’elle n’ait eu le temps de faire quoi que ce soit …
Lâche la tout de suite. Elle ne se retourna pas vers l’origine de la voix. Pas immédiatement. Pas alors que tant de signaux s’abattaient sur elle. Qu’un signal d’alarme strident résonnait dans sa boîte crânienne. Que toutes les brèches de sa carapace, qu’elle avait créées pour lui se refermaient brutalement. Se colmataient irrémédiablement. Il fallait qu’elle se reprenne, elle ne pouvait s’effondrer maintenant. Mais cette bataille était la sienne, et celle de personne d’autre. Aussi leva-t-elle les yeux vers Luis et Nayla. Un éclair émeraude de détermination. Une manière de lui dire de se mêler de ses affaires, surtout après avoir passé autant de temps à l’éviter. Mais surtout, sans doute, un véhicule puissant pour l’assurer qu’elle avait la situation bien en main et que cela ne resterait pas impuni. Adam et Venus s’occupaient déjà de lui, ce qui l’aidait. Elle n’avait pas besoin qu’il s’interpose. Elle n’avait besoin de personne. Même si elle avait envie de pleurer. Parce qu’une fraction de seconde, quand cette main s’était abattue sur elle, elle avait eu
peur. Elle avait voulu se recroqueviller, mettre ses bras au-dessus de sa tête pour prendre l’impact. Se cacher sous son lit en attendant que l’orage passe. Pendant une inspiration, elle était redevenue cette enfant apeurée qu’elle cajolait après chaque cauchemar, qu’elle fuyait comme elle le pouvait, qu’elle refoulait tout en en prenant un soin jaloux … et que c’était hors de question.
Alors lorsqu’elle pivota pour lui faire face, ce n’était pas le visage toujours jovial de Kat qu’il découvrit, qui faisait rire tout le monde, ni même l’expression de profonde détermination qu’on lui voyait quand elle maniait la batte. Non. C’était quelque chose d’inédit, de plus profond. Un éclair qu’on pouvait capter au fond de son regard lorsqu’une bagarre éclatait. Un regard dur, un visage fermé. Et au fond de ses yeux, pour qui savait le voir, le fantôme de moments douloureux qu’elle revivait, à cause de lui. A cause de ce moment d’égarement qui allait lui coûter cher.
Enlève. Ta. Main. De. Là. Même Jack, à ses pieds, s’était figé. Quelques élèves les regardaient mais elle s’en moquait. Tant pis pour cette fois. Pour cette fois elle serait cette écorchée vive qui se défendait, ce monstre qu’elle refoulait, qui hurlait à mort à chaque injustice, à chaque coup, à chaque brimade. D’une torsion de son poignet, elle se libéra, violemment. Il avait déjà relâché son étreinte, sans doute surpris. Mais ça n’avait plus d’importance. Elle leva un index impérieux sur ses propres lèvres pour lui faire comprendre qu’elle ne voulait pas l’entendre. Que ça ne servait à rien. Que tous les mots ne pourraient racheter ce qu’il venait de faire. Ce geste qui lui semblait si anodin. Qui, aux yeux de beaucoup, ne justifieraient sans doute pas ce qui allait suivre. Mais elle n’était pas « beaucoup ». Elle était elle.
Je ne veux plus te voir. Etait-il sonné ? Essayait-il de parler ? Elle ne le savait pas. Mâchoires serrées pour ne pas hurler, pour garder ce ton glacial que personne ne l’avait jamais entendu utiliser, elle continua :
Et la prochaine fois que tu poses la main sur moi, je te la casse. C’est clair ? Elle n’attendait pas de réponse. De toutes les manières, elle n’en pouvait plus. Jack sauta lestement sur le rebord de la fenêtre attenante, puis sur son épaule alors qu’elle pivotait sur ses talons et quittait les lieux à grandes enjambées. Partir. Quelques instants. Heures. Le Terrain de Quidditch. Courir. Respirer. Voler. Exorciser. Ne pas trembler. Ne pas pleurer …
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[Summer 1981] Inspirer. Lentement. Expirer. Tirer sur son t-shirt des Flèches d'Appleby. Vérifier que son short en jean n’avait pas la braguette ouverte. Et frapper à la porte. De la chambre de Luis.
SIIIIIIIIIIII ? Traduction en langage Luis-esque : « entrez c’est ouvert ». De la main droite, elle actionna la poignée, ouvrant juste assez la porte pour glisser dans l’embrasure une bouteille bien reconnaissable. Non, pas d’alcool, il ne buvait pas de cet éthanol-là mais bel et bien du virgin mojito. Elle l’agita deux ou trois fois avant de pointer le bout de son nez au-dessus :
Je viens en paix, déclara-t-elle, tentant un sourire pour son ami. Ami … cette année avait été compliquée pour eux deux. Ils ne s’étaient pas vraiment parlé, enfin, pas de choses importantes. Ils s’étaient pas mal évité, même s’ils avaient fait tout ce qu’il fallait pour que le groupe n’en souffre pas. Ce qui s’était passé l’été d’avant n’avait pas aidé … et plein d’autres choses en suspens entre eux. Comme cette fois, dont elle aurait voulu parler. S’il le voulait. Il pouvait tout aussi bien l’envoyer paître, elle s’était fait le film une vingtaine de fois dans son esprit et à chaque fois, ce n’était pas brillant …
J’appellerais plutôt ça de la corruption… Mais je suis faible alors ramène toi par là. Le temps que ça fonctionne, c’est de bonne guerre. Soulagement profond, même si elle essayait de ne rien laisser paraître. Mais son sourire devait être un poil plus large. Faisant son possible pour ne PAS laisser ses yeux glisser sur le torse du jeune homme, elle s’installa sur le lit à ses côtés comme si elle était chez elle (ce qui était, quelque part, le cas, sauf dans sa chambre) pendant qu’il mettait de côté les pages d’un manuscrit. Jack se percha sur le bureau, non loin d’eux alors qu’elle faisait venir de la cuisine deux verres d’un mouvement du poignet :
Leandra est toujours aussi douée ? J’ai bientôt fini donc je te laisserais répondre toute seule à la question. No spoil. Il était insupportable. Evidemment. Mais ça faisait partie de son charme. Aussi.
Laissant sa baguette de côté, elle se fit un devoir de remplir les verres avant de lui en tendre un. Et comme elle savait qu’ils pouvaient tourner autour du pot vingt ans à ce rythme-là si elle ne se lançait pas, elle le fit. Sans aucune subtilité ni entrée en matière.
Je voulais te remercier. Pour ce jour-là. Quelque part. Et en même temps l’engueuler. S’adossant au mur en entrechoquant son verre avec le sien, elle ajouta :
Même si je suis contente qu’Adam et Venus soient intervenus. Mouais. J’ai quand même toujours envie de lui coller mon poing dans la figure. Ses doigts se raidirent autour de son verre, tout comme sa nuque. Jack le sentit et sauta sur le lit, entre Luis et elle, foudroyant le jeune homme du regard. Avec un rire sans joie, elle secoua la tête :
Pourquoi est-ce que vous, les mecs, vous pensez que la violence est une réponse ? Son regard s’était voilà, comme ce jour-là. Ce n’était pas ce qu’elle voulait entendre … mais c’était ce qu’il avait à dire et elle était là pour écouter. Aussi.
C’est vraiment à moi que tu dis ça? C’est justement parce qu’il en a fait preuve que je rêve de lui faire payer ce foutu réflexe. Comme si j’allais croiser les bras calmement alors qu’on te touche comme ça… Fermer les yeux, deux secondes. Frissonner. Que ce soit à cause de la menace sous-jacente ou à cause de ce qu’il ne savait pas. Qu’il ne pouvait pas savoir.
Pas en le frappant, s’il te plaît. Il y a d’autres manières de lui faire mal … je crois qu’il a déjà bien assez souffert. Elle porta le verre à ses lèvres. Elle aurait préféré qu’il y ait du rhum dedans. Mais il ne supportait pas ça. Et même si elle n’en connaissait pas les raisons, elle respectait cela. La plupart du temps. Ce qu’il lui avait dit n’était pas tombé dans l’oreille d’une sourde mais s’appesantir dessus … mènerait à trop de complications. Même si elle l’aurait aimé. Nouveau rire :
Imagine, privé de ma radieuse personne … Même si le coeur n’y était pas vraiment.
J’aimerais pas être à sa place, c’est clair. Un rire nerveux échappa à l’Argentin alors que Kat se tournait vers lui. Jack n’était nulle part en vue et un nouveau frisson la parcourut, qui n’avait rien de désagréable, cette fois-ci. Ils n’étaient pas si éloignés. S’était-elle rapprochée ? S’était-il rapproché ? Elle déglutit difficilement, incapable de détourner le regard.
Y a pas de risque, s’entendit-elle répondre. Un éclair de surprise passa dans les yeux de Luis qui recula brusquement. Sa tête heurta le mur violemment et le renvoya vers l’avant … sur elle. Nez à nez. Impossible de déglutir. Impossible de fuir. Son verre était … quelque part. Et ses lèvres étaient si proches … étaient sur les siennes. Avait-elle bougé ? Ou était-ce lui ? ça n’avait pas la moindre importance. Tout son corps, tout son être criait victoire alors qu’elle se rapprochait, passant une main dans les cheveux de l’Argentin. Elle en mourrait d’envie depuis ce baiser, l’été précédent … ne pas y penser. Juste savourer l’instant présent. Sa chaleur, la proximité de son corps … pas assez proche. Son buste effleura le sien alors que leurs langues faisaient enfin plus ample connaissance et qu’il l’allongeait sur le drap. Elle voulait se perdre entièrement dans l’instant, et en lui. Savourer ses mains sur … sa peau nue. Une sonnette d’alarme retentit soudain. Sa peau. Son ventre, il remontait sur ses côtes, nues … marquées de plusieurs zébrures qui ne s’effaceraient jamais. Il découvrirait bientôt son dos, marbré également en quelques endroits.
Comme si j’allais croiser les bras calmement alors qu’on te touche comme ça… Non … Un gémissement, contre ses lèvres alors que son corps se tendait à cette simple pensée. Qu’il
sache. Qu’il la regarde autrement. Mr Martin l’avait prévenue. Lui avait expliqué. Et elle ne pouvait pas … il n’était pas question … elle ne voulait pas voir l’agonie dans ses yeux. Provoquer sa colère. Son inquiétude. Sa …
Non. Elle venait de se redresser. Et ses yeux étaient emplis de larmes, évitant ceux de celui qu’elle voulait, plus que tout. Elle avait essayé de se mentir toute l’année, avait manqué de réussir. Mais elle ne pouvait pas faire ça. Il ne pouvait pas savoir. Jamais.
Je suis désolée. Une larme avait coulé, qu’elle ne retint pas alors qu’elle réarrangeait son haut, et qu’elle se levait. Et s’éclipsait. Lâche ? Ou courageuse, de renoncer à ce qu’elle voulait depuis si longtemps pour le protéger ?
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[END OF AUGUST 1982]
Tu NOUS appartiens ! Il avait beau avoir quitté les lieux depuis une heure, le son de sa voix continuait de résonner aux oreilles de Kat. Dans la chambre qui était la sienne depuis deux étés, recroquevillée par terre, contre le mur, elle tremblait de tout son corps et ne semblait pouvoir arrêter de pleurer. C’était couru et elle avait eu de la chance qu’il ne découvre pas avant où elle résidait depuis qu’elle avait quitté la demeure familiale. Ses larmes ruisselaient sur sa pommette droite endolorie, qu’il avait atteinte de sa main portant sa chevalière avant que Mr. Martin ne l’attrape et ne le mette dehors. Sonnée, elle avait essayé de faire bonne figure mais ses entrailles s’étaient retournées quand elle avait aperçu la chevelure blonde de Leandra disparaître dans les escaliers. L’étreinte de l’homme l’avait achevée, même si elle lui était infiniment reconnaissante de ce qu’il avait fait pour elle. Il lui avait dit que Leandra et lui dîneraient dehors et elle n’avait pas eu les mots pour le remercier. Elle le ferait plus tard, sans le moindre doute. Et depuis que la porte de l’entrée s’était refermée, elle essayait de se reprendre, sans y parvenir. Ce fut la porte de sa chambre, grinçant, qui la fit sursauter. Se redressant tant bien que mal, elle chercha sa baguette du regard, pensant qu’il était revenu en voyant que Leandra et Mr Martin avait quitté la maison mais … Jack n’avait pas réagi. Et elle savait donc qui était là. Sans relever le visage vers lui, dissimulée par un rideau de cheveux, elle retint sa respiration deux secondes avant d’essayer d’avoir une voix assurée :
Oh … c’est toi. Ton père et Lea’ sont sortis dîner. Mais elle tremblait, comme tout le reste de son corps.
Ah d’ac… C’est quoi cette marque sur ton visage? Les mots ne voulaient pas sortir alors qu’il laissait tomber ses affaires et s’approchait d’elle. Elle ne put pas bouger alors qu’il s’agenouillait devant elle et lui prenait délicatement le visage. Et elle ne parvint pas à mentir quand ses yeux furent dans les siens.
Mon père … m’a retrouvée. Sa gorge était nouée. Il ne savait pas. Il n’avait jamais su. Ils n’en avaient jamais parlé. Un accord tacite entre eux. Peut-être s’était-il dit qu’elle était partie à cause de la pression familiale des Sang Purs. Mais ça … jamais il ne l’avait ne serait-ce qu’aperçu.
Il se redressa brusquement en jurant en espagnol et se mit à faire les cent pas. Même Jack restait à distance respectueuse de Nayla qui s’était soudainement transformée en jaguar. Le coeur battant la chamade, Kat restait fixée sur lui. Elle ne savait pas quoi dire ni quoi faire.
Depuis quand ? Il ne semblait pas réellement là et elle ne savait pas si elle avait vraiment envie de répondre. Mais …
Depuis toujours. Enfin … aussi longtemps que je me souvienne. C’était douloureux. Plus encore sans doute que l’hématome qui ne manquerait pas de se développer sur sa joue.
Pourquoi tu ne m’en as jamais parlé ? C’était … plus délicat. Ses yeux trouvèrent finalement le plancher alors que ses larmes recommençaient à couler, lentement.
Je ne voulais pas que tu me voies … comme ça. Comme une victime. Comme une chose fragile. Un grand bruit la fit sursauter alors que sa lampe de chevet rentrait brutalement dans son champ de vision. Elle se raidit, complètement paniquée … avant de le voir partir comme une furie vers la sortie.
Non ! Un gémissement. Elle savait où il allait. Jack sauta sur son épaule alors qu’elle se relevait tant bien que mal, s’élançant à sa poursuite. La vue brouillée par les larmes qu’elle essuya d’un revers de manche rageur, elle déboula les escaliers, manquant de trébucher. La porte d’entrée était grande ouverte mais elle le voyait, traversant la portion avant du jardin.
Luis ! Elle était dehors, il était rapide mais elle l’était également.
Luis ! S’il te plaît … Sa voix se brisa alors qu’elle accélérait pour le rattraper.
NON! Rentre ! Et il partit en courant. Il n’en était pas question. Qu’il aille là-bas, qu’il fasse … ils feraient pire. Et elle ne les laisserait pas le toucher. Ce fut ce qui lui donna la force de solliciter son corps entièrement, et de le rattraper par la manche alors qu’ils tournaient au coin de la rue. A bout de souffle, elle attrapa son autre main, la forçant à la regarder. A plonger dans son regard émeraude, qui débordait de larmes :
Luis … arrête. Ce … ça ne servirait à rien. Ce ne serait sans doute pas suffisant. Elle n’était pas en état de gérer ça. Elle n’était pas en état de gérer quoi que ce soit. Etouffant un gémissement, elle tira un peu plus fort.
Je te le demande … je t’en supplie …Ses traits si durs s’adoucirent seconde après seconde, battement de coeur après battement de coeur. Il laissa finalement échapper un juron en espagnol. N’osant pas bouger, à peine respirer, elle attendit ce qui lui sembla être des heures avant que les épaules du jeune homme ne se relâchent. La main de l’Argentin trouva la sienne et il se dirigea vers la maison. Tremblant, elle se rendit compte qu’elle pouvait à peine marcher. Mais elle tint bon jusqu’à ce que la porte ne se referme derrière eux. Ses bras furent bientôt autour d’elle et elle se blottit contre lui. Fermant les yeux, elle inspira, se gorgeant de son odeur. Ses doigts se crispèrent sur son t-shirt alors qu’elle se laissait finalement aller. Elle ne pleurait plus. La main gauche de Luis était dans ses cheveux et son corps se pressait contre le sien. Le silence qui les entourait était rassurant en un sens. Ainsi que sa douceur. Lui. Tout simplement. Elle finit par se décaler très légèrement pour plonger son regard dans le sien. Et articuler :
Je suis désolée. De ne pas le lui avoir dit plus tôt. Qu’il ait à endurer ça. Pour cette fois, pendant les vacances, où elle avait paniqué. D’être ce qu’elle était. Et de ne vouloir que lui … alors qu’il méritait tellement mieux.
Arrête tes bêtises. C’est moi qui suis désolé. J’aurais dû m’en rendre compte plus tôt, c’était juste sous mon nez…. Un léger rire lui échappa, sans joie :
C’est une seconde nature de le dissimuler … personne n’a rien vu, toutes ces années. J’ai été bien dressée. Elle parvint même à esquisser un léger sourire. Elle était bien loin, la Kat qui aguichait, qui riait, qui dansait, qui jouait au Quidditch.
Dis pas ça… ou cette fois tu pourras pas m’empêcher d’aller là-bas. Bon. Tu peux me raconter ce qui s’est passé avant que je rentre? Elle secoua la tête. Elle n’avait pas envie de parler mais elle lui devait bien ça.
Pas ici. Tirant sur sa main elle l’entraîna jusque dans sa chambre. Elle se jucha sur son lit, Jack sur ses genoux, l’invitant à prendre place à côté d’elle.
Mon père a fait irruption chez vous. Il a fini par me retrouver, sans doute m’a-t-il finalement croisée dans le quartier. Elle secoua la tête. Ce n’était pas très malin de sa part.
Il m’a ordonné de rentrer et quand j’ai résisté … Elle essayait d’aller vite, elle ne voulait pas s’étendre sur le sujet. Et trouvait ses cuticules très intéressants.
Bref, c’est là que ton père est intervenu. Il l’a mis dehors et … Elle secoua la tête :
Leandra a tout vu. Ils sont sortis tous les deux.Il se posa sur le lit, à côté d’elle en soupirant.
Il a bien fait. Ca a dû la chambouler… P… Pourquoi t’es pas partie avec eux? S’il était revenu plus tôt… avant que je rentre… J’avais besoin d’être seule. De faire le point. Et elle l’attendait, quelque part, c’était certain.
Le point sur quoi? Elle releva les yeux vers lui en sentant une certaine tension dans ses mots. Elle déglutit difficilement.
>Sur moi. Mes mensonges par omission. Et sur ce que ça m’a coûté … Se mordillant la lèvre, sans prévenir, elle enleva son t-shirt, révélant les estafilades blanches sur sa peau nue. Frissonnant de sa soudaine quasi-nudité, elle finit par confesser :
Je ne voulais pas que tu voies ça … l’été dernier. Une lueur de compréhension s’alluma dans les yeux de Luis. Elle en aurait pleuré de soulagement. Les doigts du jeune homme se tendirent vers son corps et elle se contenta de hocher la tête, sans le quitter des yeux.
Tu sais… J’ai une sacrée collection de cicatrices donc je suis le dernier que ça va rebuter. Il caressait sa peau, envoyant des décharges électrique partout dans son corps.
C’est comme des médailles… de stupidité, dans mon cas, la plupart du temps… Un rire la secoua doucement alors qu’un sourire s’épanouissait sur ses lèvres :
Ca fait partie de ton charme … Il était si proche. Encore une fois. Et elle n’avait aucune excuse pour reculer, cette fois. Les doigts du jeune homme écartèrent une mèche de cheveux de son épaule et ses lèvres se posèrent sur sa peau nue. C’était trop. Lentement, elle se retourna pour lui faire face. Les yeux dans les siens, le souffle court, elle approcha son visage du sien, comme une question.
A la mieda… Et il l’attira à lui, leurs lèvres se trouvant, leurs corps s’entrelaçant. Cela faisait longtemps, bien trop longtemps qu’ils attendaient cela. Demain, ils reprendraient le Poudlard Express. Et plus rien ne serait comme avant. Mais pour l’heure, ils s’en moquaient. Ces deux amoureux du Quidditch avaient un objectif à court terme : atteindre le septième ciel sans balai.
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L'état des lieux n'était pas catastrophique, bien au contraire. Se forçant à respirer convenablement, la jeune fille finit par attraper Jack qui ne faisait que la rassurer depuis qu'elle était levée. Il s'en était passé, des choses depuis sa première année. Et le monde ne tournait pas exactement rond. Même si elle refusait de se laisser atteindre par tout ce qui se passait, c'était difficile. Elle avait vu ces gradins s'effondrer, elle avait assisté au déclin de la santé d'Izzie, elle avait vu s'effondrer ses rêves de jouer un jour au Quidditch pour de l'argent pendant l'incident du Poudlard Express, elle avait connu le Belize, elle portait une marque qui l'identifiait comme Sang Pur et "Partisan", grâce à sa famille ... et cela l'écoeurait. Il fallait avancer, pourtant, se concentrer sur son cursus, prendre soin des uns et des autres ... et d'elle-même. On avait fini par lui faire entendre et comprendre que c'était important. Et elle y croyait, maintenant. Avec un soupir, elle se releva, emmenant Jack avec elle. L'année s'annonçait longue et compliquée. Et il était hors de question qu'elle la commence avec des cernes sous les yeux.
Don't be afraid, I've taken my beating. I've shared what I've made. I'm strong on the surface, not all the way through. I've never been perfect, but neither have you.