« Aujourd'hui j'ai huit ans, et j'voudrais qu'ca dure un peu, j'écoute absolument pas ce qu'on me dit, j'fais semblant d'être assis à mon siège. »

Ils avaient tous ce grand sourire béat, qui te mets mal à l’aise, vois-tu. J’étais planté là, sur ma chaise, autour de toute ma famille réunie dans notre grand manoir. C’était quelques temps avant Noël, j’allais bientôt avoir huit ans et ma mère était dans tous ses états. Tout simplement pour le fait que je n’avais encore manifesté encore aucun pouvoir magique. Je n’avais pourtant que sept ans, ça pouvait arriver à tout moment. Je pense qu’elle avait juste très hâte, elle sentait que ça n’allait pas tarder, comme elle le disait tout le temps. Il faisait froid, à mon gout, dans la grande salle à manger, et je fixais les bougeoirs éteints, me disant qu’il était bien bête de ne pas les allumer. Alors je les fixais, et chacun leur tour, ils s’allumèrent. C’était venu tout naturellement, et tout le monde y avait assisté. Mon oncle, assis à ma diagonale, se mit à rire après le long silence qui suivit mon exploit et tout le monde applaudit. Je savais ce qui se passait, et j’en étais très heureux, surtout fier. Neala avait de grands yeux ronds, Sorrow était tout excité. Cléophée était sortie d’une de ses nombreuses transes et souriait, avant de retourner à ses petits-pois, sa petite paume écrasant les légumes verts. Ma mère accourut, ses gants pour le four en mains, se demandant ce qui se passait. Quand grand-mère lui annonça ce qu’il s’était passait, elle fonda en larmes. C’est tout ce dont je me souviens.
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Aujourd’hui, j’ai onze ans. Et je veux profiter de ses derniers moments avec mon frère, mes sœurs et mes cousines. Aujourd’hui, il fait incroyablement beau. Aujourd’hui, tout est prêt, mes valises sont bouclées. Demain, je m’en vais pour Poudlard. Irais-je à Poufsouffle, Serpentard ou Gryffondor ? Je me le demandais bien mais n’en étais pas inquiet. Ca faisait onze ans que j’étais un O’Neill. Et je n’avais jamais été aussi fière de faire partie de cette famille, si tolérante, respectueuse, avec tant de vertu, si unie et si forte. Je ne regrettais rien, ni mes disputes avec Neala, ni mes farces à Cléophée, ni les regards sévères que me faisaient mon oncle quand je faisais une bêtise. Demain, je serais plus grand. En ce moment précis, je fis mon dernier coup de pinceau sur la petite toile. Elle était lumineuse, pleines de fleurs, de paysages. C’était ça, mon talent. L’art. Ça n’a rien d’extraordinaire je te l’accorde, pour un sorcier. Mais ça m’apportait beaucoup, beaucoup de liberté, de justesse dans mes pensées. D’un bond je me redresse, et commence à courir après Cléophée, à travers les blés, avant qu’elle ne s’écroule par terre, dans les épis, se tordant de rire sous mes chatouilles. Son rire est doux, cristallin. Elle va me manquer. Je la reverrais aux prochaines vacances, je pourrais lui montrer tous pleins de sortilèges et d’enchantements, je lui raconterais tout de Poudlard. Et à Neala. Et à Sorrow. Et à Mebd. Je prends Cléophée sur mon dos et rejoint ma fratrie, avant de m’allonger auprès d’eux. Ils sont tous calmes, mais respirent de bonne humeur, même si ils sont moins démonstratifs que moi. A moins que ce soit moi qui l’est trop. Une vraie pile électrique, toujours prêt à tout. Demain je m’en vais, pour de nouveaux horizons. Et puis un jour, on sera tous réunis, frères, sœurs et cousines, à la plus grande école de sorcellerie.
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Mon dieu qu’elle est belle. Il faut que je lui demande son prénom, il faut que je saches quelque chose sur elle, n’importe quoi. Elle est seule, adossée contre mon arbre. Ce n’est pas vraiment mon arbre, bien sûr, mais j’y vais tout le temps, quand l’envie me prend d’être seul. Mais qu’est ce qui m’arrive ? Ce n’est qu’une fille, hors plus belle que tout ce que j’ai pu voir. C’est une beauté atypique. C’est pas la grande blonde qui brille de toute part, avec sa poitrine montante, ses yeux qui battent trop de fois. Non. Elle, elle est brune, incroyablement brune, avec une peau diaphane, avec un air d’enfant, d’enfant farouche. Elle, elle me plaît. Je suis dans tous mes états. Elle est plus jeune que moi, c’est certain. J’ai vingt et un ans, elle ne doit pas en avoir plus de quinze... Oui, elle est jeune, je n'ai pas l’habitude de trouver aussi jolie des filles de cet âge là, mais cette fois-ci... Elle regarde au loin, mais est concentrée. J’ai les mains moites, une sensation étrange dans l’abdomen. A petits pas je m’avance et arrive bientôt auprès d’elle. Elle pose soudain son regard merveilleusement bleu, ou vert, je en saurais pas trop dire, dans le mien. Instinctivement je m’assois à ses côtés. Elle sent très bon, comme une odeur de bois mélangée à celle d’herbe fraîchement coupée. Elle continue de me fixer, et je tourne le regard, le posant droit devant moi.

-Tu sais que c’est mon arbre.

C’est tout ce que j’ai su lui balancer, qu’est ce que je dois avoir l’air idiot. Je repose mon regard dans le sien, puis ses joues, son nez, ses oreilles. Elle est tellement belle.

-Si tu le dis, mais il a l’air d’avoir de la place pour deux. Je vais rester.

C’est quand elle me dit ça que je me mets à rire. Elle me regarde plus intensément, je lui réponds juste que j’aime bien sa répartie, et qu’il n’y a pas d’inconvénient. Plus tard, je lui dirais que j’aime sa voix, sa peau, ses yeux et ses cheveux. Je lui dirais qu’elle est belle, je lui dirais tout ce qu’il y a de bien chez elle, et j’espère qu’elle fera de même avec moi. Parce que je crois bien, et cela pour la première fois de mon existence, que je suis tombée amoureux d’elle. Elle ne m’a dit pourtant quelques mots. Un long silence s’en suit. Puis m’apprends qu’elle s’appelle Liza. Je lui réponds que moi, c’est Keelin, et c’est à son tour de rire. Je suis amoureux.
Huit mois plus tard, elle aura seize ans et moi toujours vingt et un, sous ce même arbre, je lui dirais. Elle ne dira rien tout de suite. Elle me prendra juste la main, posera sa tête sur mon épaule. Elle me dira qu’il fait froid et qu’elle voudrait rentrer, qu’elle doit se laver. Je l’accompagnerais, et juste avant de pénétrer dans sa salle commune, elle me regardera comme elle l’a fait lors de notre première rencontre. Intensément. Et elle déposera ses lèvres sur les miennes.
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J’ai vingt-trois ans. J’ai un talent inné pour toutes formes d’arts, notamment la peinture. J’aspire à être auror. Je suis con et fier, et je suis amoureux. J’ai des amis aimants, une famille aimante. Ils me supportent tous, malgré mon caractère bien pourri. Je suis un brave, quelqu’un de bien finalement. La vie est parfois répugnante, mais je profite du jour comme si c’était le dernier. Je m’appelle Keelin  Madan O’Neill-Cox. J’ai redoublé ma septième année de cycle primaire. Liza m’aime. Je vois Sorrow, Neala, Mebd et Cléophée tout les jours, le plus souvent possibles. Je les aime, mêmes si on est différent. Ils sont calmes, intelligents. Moi je ne tourne pas trop rond, mais ça me plaît. Je m’appelle Keelin O’Neill. Et bon sang, malgré tout. J’aime la magie. J’aime l’amour. J’aime mon manoir. J’aime ce que je fais. Bon sang, j’aime la vie.