Le Soleil était encore haut dans le ciel ce soir là, quand Ludvina Mc Leod mit au monde un petit garçon. Nous étions le 26 Mai 1950, et Andrès venait de naître. Lorsqu’on lui annonça qu’elle avait mis au monde un garçon, la jeune sorcière avait faillit pousser un cri de joie,  elle avait réussi à mettre au monde un héritier dés sa première grossesse : son avenir au sein du clan Mc Leod était donc assuré.
Le petit Andrès fut donc choyé pendant toute son enfance, régulièrement ponctuée par la naissance de ses petits frères. Au fur et à mesure que la famille s’agrandissait, la vieille demeure poussiéreuse de la famille semblait rajeunir, animée par les cris des garçons qui jouaient et courraient toute la journée. Le petit garçon prenait au reste ses responsabilités de grand frère très au sérieux : il s’était auto assigné le rôle de chef de la bande, organisait toujours les mauvais coups, et veillait toujours à la sécurité de ses cadets.



Enfin, elle était là, cette lettre qu’Andrès attendait depuis tout petit. Il était descendu prendre son petit déjeuner, après s’être difficilement extirpé de ses rêves, et avait trouvé, chose rare, son père et sa mère, tous deux attablés à la grande et élégante table qui trônait au milieu de la salle à manger McLeod. Les triplés, Cassio, Matthew, Lewis et Léandre s’y trouvaient également. D’habitude, les petits-déjeuners ne se prenaient pas en famille, son père partait tôt au Ministère, et sa mère avait bien autre chose à faire. Au reste, il régnait une curieuse atmosphère, autour de la tablée, une sorte d’excitation générale. Les triplés gloussaient régulièrement, tout comme Cassio, qui s’était joint à leur enthousiasme. Ses autres frères étaient trop jeunes pour saisir de quoi il s’agissait, mais semblaient curieusement partager la bonne humeur générale.  

- Bonjour père ! Bonjour mère ! lança le garçon avant de les embrasser.

Puis il s’assit à sa place désignée, à gauche de son père, au bout de la table, à côté d’Alexei. Chez les Mc Leod, on rangeait les garçons à table par ordre d’âge, et les triplés par ordre alphabétique. C’était une idée de sa mère, toujours très organisée. En baissant les yeux, Andrès avait vu l’enveloppe parcheminé et soudain compris pourquoi tout le monde était d’humeur si joviale : il venait de recevoir sa lettre d’admission à Poudlard.



Affublé d’une robe de sorcier noir qui le faisait paraître encore plus petit qu’il ne l’était vraiment, Andrès attendait impatiemment qu’on appelle son nom pour la Répartition. Il se trouvait dans la Grande Salle du château, entouré d’un groupe d’élèves qui, comme lui, entamaient leur première année à Poudlard. Pendant tout l’été, le petit garçon n’avait cessé de se gaver de livres sur les sortilèges, les enchantements, et surtout, il avait découvert une discipline qui l’intéressait particulièrement, la Légilimancie. Il n’en avait parlé à personne, mais espérait secrètement qu’elle soit enseignée à Poudlard et que dans ce cas, il puisse assister au cours. La nuit avant de partir, Andrès s’était même promis qu’un jour, il deviendrait un grand Légilimens.

- Marles… Meils… Mc Dammon… Mc Leod !

Enfin, son nom avait retenti dans la salle ! Le jeune Mc Leod se précipita vers le petit tabouret, saisit avec précaution le Choixpeau, avant de le déposer sur sa tête. Il était bien trop grand pour tenir en équilibre sur sa petite tête aux cheveux bruns foncés, et s’enfonça sur son visage, jusqu’à son nez, parsemé de tâches de rousseur.

- Tiens donc, un Mc Leod ! Je n’en avais pas vu depuis, voyons… Depuis Amanda, il y a vingt-deux ans ! Pour toi, ce ne sera pas difficile, je t’envoie chez Serpentard !

Les habituels applaudissements retentirent, mais Andrès les entendit à peine, tant son cœur se gonfla de joie : il marchait sur les traces de son père, de son grand-père, et de tant d’autres avant eux. Maintenant, c’était certain, il était un véritable Mc Leod, car ceux qui étaient dignes de la famille étaient toujours placés chez Serpentard. Son père lui avait longuement parlé de cette maison : il allait pouvoir y rencontrer d’autres sang-purs, et se garderai bien d’éviter les sangs-de-bourbes.

Andrès était promis à un brillant avenir : il était légèrement plus intelligent que la moyenne, mais son excellence provenait surtout du travail assidu qu’il fournit pendant toute sa scolarité. D’une nature très compétitive, il ne pouvait s’empêcher de tout faire pour être le meilleur, quitte à saboter les potions des autres ou jouer d’autres mauvais tours d’un goût douteux. Il était au reste assez populaire, car il s’était arrangé en grandissant, ayant décidé de changer quand il s’était aperçu qu’il avait un beau sourire, et qu’il ne pourrait pas rester petit et maigrelet toute sa vie. Le serpentard avait également réussi à apprendre par lui-même le don de Legilimancie, et s’était entraîné si dur et si intensément qu’à sa sortie de Poudlard, il le maîtrisait parfaitement. Cela ne s’était pas fait en un jour : Andrès le souhaitait si ardemment qu’il s’était infligé des entraînements quotidiens, veillant jusqu’à des heures indues la nuit, tentant d’entrer de force dans l’esprit de ses camarades endormis. Le jour, il y travaillait avec un professeur qui avait bien voulu le prendre en charge en voyant son intérêt profond pour cette technique.
Et c’est bourré d’ambition et radieux que le jeune homme rentra finalement chez lui après la fin de sa septième année : il était devenu quelqu’un.



Un cri de bébé retentit, et Andrès se précipita à l’intérieur de la chambre. Il tournait en rond devant la porte depuis plusieurs heures déjà, nerveux. Mais toute son inquiétude retomba lorsqu’il vit le spectacle qui l’attendait : sa femme, Myriam, venait de mettre au monde un joli petit bébé tout rose, qu’elle tenait contre sa poitrine et à qui elle souriait d’un air épanoui. Le jeune homme posa sa main sur son épaule, lui offrit son plus beau sourire à fossettes et se pencha vers elle pour déposer un tendre baiser dans ses cheveux. Le couple avait été marié par arrangement, et, comme il fallait s’y attendre, ne s’aimait pas. Ils éprouvaient cependant une sorte de tendre amitié l’un pour l’autre, et beaucoup de tendresse. Ils avaient réussi à trouver une sorte de rythme de vie qui leur laissait énormément de liberté, dont la première règle était que chacun pouvait avoir les liaisons qu’il voulait. Et même si parfois Andrès ressentait un peu de jalousie en apprenant que Myriam avait passé la nuit avec un autre – c’était sa femme tout de même ! – il payait volontiers ce prix pour sa liberté.

Le jeune homme admira sa femme : elle n’était pas exceptionnellement jolie, avec ses yeux un peu trop écartés, son petit visage de bébé, et ses fins cheveux blonds, mais ses grands yeux bleus pétillaient tant qu’elle en devenait parfaitement adorable. Andrès était ravi de pouvoir lui offrir une vie comme celle qu’il menait : son poste au Ministère de la Magie leur permettait une grande aisance financière, et il ne privait pas son épouse de cadeaux. Son ambition avait finie par porter ses fruits : il était devenue un Legilimens talentueux, bon également en Occlumancie, indispensable selon lui à la pratique de la Légilimancie, reconnu par de nombreux grands sorciers, et parvenait de plus en facilement à pénétrer d’autres esprits. Il avait justement été recruté pour cela, et occupait une place importante dans la hiérarchie, place à laquelle son nom n’était tout de même pas étranger.

- C’est un garçon, murmura-t-elle doucement.

Un garçon, encore un ! Décidément, ils étaient chanceux : le nom des Mc Leod se perpétrerait en ligne directe, d’aîné à aîné. Andrès et Myriam avaient déjà eu un autre garçonnet, l’année précédente, qui avait reçu le second prénom de son père, Hayden. Ses parents ne manquant pas d’imagination et possédant un goût assez douteux en matière de prénoms, le cadet recevrait celui d’Hippolyte et serait suivi quatre ans plus tard par Calliope et Cadmos, les jumeaux.




Andrès entra dans le bureau de son père, suivi par sa mère, qui referma la porte à clef sur eux. Il était arrivé précipitamment dans la demeure familiale, alors qu'au dehors, la pluie battait à tout rompre. Arthur Mc Leod était assis à son bureau, un verre de cognac à la main, mal rasé, son col de chemise ouvert, contrairement à son habitude. En le voyant, le jeune homme eut un choc : depuis la dernière fois qu’il l’avait vu, quelques semaines auparavant, son père semblait avoir pris dix ans. Remarquant enfin sa présence, il releva la tête, et offrit un regard glacial à son fils.

- Andrès, mon garçon. Prends un siège, nous devons parler.

Il ne se fit pas prier, et se posa dans un des agréables fauteuils de cuir vert qu’il connaissait si bien, face à son père. Sa mère, quand à elle, s’appuyait légèrement sur la vitre, debout derrière Arthur. Andrès était si fier d’elle : malgré ses cinquante-cinq ans, elle était toujours la même femme, toujours belle, toujours si mince dans ses tailleurs noirs élégants. Son visage exprimait la douceur, et son sourire était également resté le même depuis vingt-neuf ans, au moins. Néanmoins, à cet instant, ses traits exprimaient la gravité de la situation, reflétant l’air sombre de son mari.

- Fils, je t’ai déjà informé de ce que nous avons découvert à propos de Violett.

Arthur fit une pause, sans chercher à masquer l’air de dégoût qui avait envahit son visage. Andrès déglutit, avec un petit pincement au cœur. Il avait toujours aimé sa petite sœur, sa naissance avait réellement été une joie pour lui, ça le changeait enfin des habituelles naissances de garçons dans la famille. Et puis, elle était si mignonne, si gentille ! Mais il était l’un des rares à l’apprécier, il savait pertinemment bien que ses parents ne l’aimaient pas. Son père ne lui trouvait aucun intérêt, seuls les héritiers mâles pouvaient trouver grâce à ses yeux. Sa mère aimait sans doute sa fille, au fond, mais elle avait tant subit la colère d’Arthur après sa naissance, qu’elle en était venue à reporter ses remords et sa rage sur Violett. Alors, pour ne pas décevoir ses parents, Andrès avait feint l’indifférence toute sa vie, et maintenant plus encore, bien qu’il aurait voulu pouvoir offrir son soutien à sa petite soeur et à Lysander, qui osait la défendre.

- A toi, l’aîné, je ne peux pas cacher que cette découverte nous a profondément ébranlés. Je sais que tu apprécies ta sœur, mais nous avons du l’éloigner, parce que les intérêts de la famille doivent passer avant tout.

Son fils acquiesça, se maîtrisant pour garder un visage parfaitement impassible. Quand on naît dans la famille Mc Leod, il vaut mieux être bon à ce genre de petit jeu, surtout en face d’Arthur.

- Néanmoins, je ne veux pas que tes frères le sachent. Tu dois te maîtriser, parce que  si tout le monde se laisse aller à de bons sentiments comme ce bon à rien de Lysander, nous n’en serons qu’affaiblis. Tu me comprends, fils ?

Le jeune homme hocha la tête. Son père avait raison, comme d’habitude.

- C’est également pour cela que je souhaite te demander quelque chose. Comme tu le sais, notre famille a prêté allégeance au Lord. Hors, cette histoire de cracmolle nous met en danger. Tes frères n’en sont peut-être pas conscients, mais Violett nous a gravement discrédités. Une famille de sang-purs avec une enfant qui ne peut utiliser la magie n’est plus crédible. Les autres familles commencent à se méfier, à croire que nous nous éloignons du droit chemin.

Il but une gorgée d’alcool, avant de reprendre :

- Mais c’est là que tu interviens, fils. Ton rôle va être de redorer les galons de la famille Mc Leod. Et pour cela, tu vas prêter le serment suprême au Lord. Comprends-tu ce que j’entends par là ?

Oui, Andrès comprenait, parfaitement, même. Ses parents lui demandaient, ni plus ni moins, de devenir un Mangemort. Cependant, une question lui vint aux lèvres, et il ne put s’empêcher de la poser. En principe, il ne se serait jamais permis de rediscuter un ordre de son paternel, mais il pensait en avoir le droit, vu la situation. Et puis, il avait maintenant vingt-huit ans, tout de même.

- Pourquoi est-ce-que c’est à moi d’entrer dans cette… communauté ? Je veux dire, je suis certain qu’Alexei, Miller ou William seraient ravis de prendre ma place, vous savez comment ils sont.

- Justement, je connais leurs penchants et leurs idéaux, je sais qu’ils pensent d’une façon bien plus extrême que toi – ou même que moi ! Ils sont extrémistes, et agissent avec parfois trop de cruauté. De tous mes enfants, Andrès, tu es celui qui réfléchis le plus avant d’agir, et sans doute le modéré également. C’est pour cela –outre ta place d’aîné, que c’est à toi de prendre cette place, parce que je sais que tu n’iras jamais dans les extrêmes et que tu sauras faire ce qui est bon pour la famille sans toutefois la mettre en danger.

Il n’y avait plus rien à répliquer. Le jeune homme discernait maintenant beaucoup mieux le dessein de son père. En devenant Mangemort, Andrès protégeait en réalité ses frères des dangers qu’ils pourraient encourir en prêtant serment de la même manière que ce qu’il ferait. Cela le dotait d’une excellente excuse pour empêcher ses cadets d’adhérer à ce groupe, qui tentait au moins les triplés.

- Je vous obéirai, père. Cependant, je souhaiterais que seuls mes frères le sachent. Je veux que Myriam et les enfants soient tenus à l’écart de tout cela, ils ne doivent en aucun cas y être mêlés. Je ne le crierai pas haut et fort, car je souhaite garder mon poste au Ministère, alors personne ne doit savoir.




C’est avec joie que j’ai reçu votre réponse concernant le poste de professeur de Légilimancie. Mes connaissances au Ministère ont eu raison de vous recommander : je suis certain que vous saurez parfaitement enseigner à nos chers élèves la science qu’est la Légilimancie.
Néanmoins, il me reste une requête à vous soumettre. Comme vous le savez peut-être, nous craignons ici un déchaînement des mages noirs contre nos élèves, et leurs précieux patronus. La situation étant un cas de force majeur, nous avons décidé, l’équipe des professeurs et moi-même, de les emmener pendant les deux mois de congés d’été au Honduras – terre Britannique, afin de les entraîner et de les préparer à une vulnérable attaque. Il s’agit, je le pense, d’un lieu sur.
Comme vous le savez également, nous avons le plaisir d’accueillir dans notre établissement cinq de vos nombreux frères, qui passeront comme les autres élèves, leurs vacances au camp. Vous nous feriez un immense honneur en vous joignant à nous, afin de tenter d’inculquer avant l’heure quelques principes de Légilimancie, qui, joint à des cours d’Occlumancie, permettront à nos étudiants de se prémunir contre une éventuelle attaque mentale.
J’espère vous compter parmi nous lors de ce voyage.

Avec mon amitié sincère,





Andrès reposa la lettre qu’un hibou lui avait apportée quelques minutes auparavant. Son regard se posa alors sur le long tatouage noir, représentant un serpent et une tête de mort, qui ornait son avant bras depuis maintenant plusieurs mois. Il passa lentement ses doigts dessus, et il disparut : le jeune homme était un sorcier assez habile pour réussir à le camoufler, et maintenir ainsi le secret sur son appartenance aux Mangemorts. Accepter ce poste à Poudlard et d’aller passer l’été dans ce camps était de la folie pure : le Lord ne tarderait pas à l’employer comme taupe, afin de connaître les moindres mouvements à l’intérieur de l’école. Cependant, lâcher quelques maigres informations valait la peine : être sur les lieus lui permettrait d’assister et peut-être même d’empêcher les éventuels – et même probables - débordements à l’avenir. De plus, il aurait ainsi ses frères sous la main, et pourrai donc les protéger en cas de coup dur.